Chalon sur Saône

Dans L'heureux élu Bruno Solo et Yvan le Bolloc'h aimantent des affres de la condition humaine en les rendant bidonnants

Dans L'heureux élu Bruno Solo et Yvan le Bolloc'h aimantent des affres de la condition humaine en les rendant bidonnants

Lorsque jalousie maladive et couardise pactisent au point de s’encanailler avec perte et fracas, cela peut donner une comédie vaudevillesque intitulée L’heureux élu. Les apparences, bien que fort peu glorieuses, ne manquent alors pas de s’attirer les faveurs du rire, tant les caricatures poussent le bouchon loin. Et avec Bruno Solo et son compère Yvan Le Bolloc’h en fers de lance d’une pièce finement ciselée signée Eric Assous, dont Jean-Luc Moreau assure la mise en scène, la soirée de ce samedi ne pouvait que faire le plein de moments durant lesquels la pesanteur est allée voir ailleurs si elle y était…

Le cinq majeur s’est tiré d’affaire haut la main

Les Théâtrales 2016-2017 ayant tiré leur révérence le mercredi 12 avril, les chantres du meilleur du théâtre parisien sont donc restés sur leur faim près de six mois. Ce 30 septembre ils ont enfin pu mettre fin à leur « cure de désintoxication » entreprise à leur corps défendant par le biais de l’exercice 2017-2018, et reprendre le cours normal de leur vie culturelle. Bien leur en a pris au demeurant, car partir à l’abordage d’un nouveau cycle en compagnie de Bruno Solo et d’Yvan le Bolloc’h avec dans leur sillage Yvon Back, Mélanie Page et Mathilde Penin a été un gage de réussite. Justesse de ton, postures outrancières, amalgame de sentiments, morale sauve, auront entre autres contribué à tout le moins à créer un climat de franche décontraction dans les travées, préalable au lâcher prise sans retenue. La passion amoureuse et ses déviances ont réussi leur sortie. Qu’elles soient louées dans ce contexte !

 

Un marié qui ne fait pas l’unanimité…

Un soir, alors que Jeff (Bruno Solo), las d’errer dans son appartement cossu de l’Avenue Foch où il « passe son temps à se déprécier et à être complexé par son argent », se retrouve chez son pote Greg (Yvan Le Bolloc’h), journaliste sportif.  Mélanie, l’épouse de ce dernier, a invité à dîner Charline, l’ex de Jeff, à son insu. Toujours follement épris, mais affichant un tout autre visage dicté par l’orgueil quand le moment de la confrontation fut venu, le compagnon éconduit a dû affronter la terrible nouvelle : son ancienne dulcinée doit se marier avec Noël, un être propre et lisse qui est dans l’immobilier international…toutefois sans atomes crochus avec le commun des mortels, puisqu’il est antisémite, radical, n’hésitant par ailleurs pas à user de la gâchette lorsque les circonstances l’exigent, prix à payer pour que sa promise ne tombe pas entre les mains de sinistres violeurs. Il va sans dire que l’antagonisme entre Jeff et Noël s’avère criant, surtout de la part du premier. S’ensuivent nombre de tirades peu amènes, au milieu desquelles poltronnerie et bassesse ne font jamais semblant…Finalement, l’image que dégage Noël ne plaît ni aux deux acolytes, ni à Mélanie, ni au père de la future mariée...et ni à Charline surtout, qui reconsidère sa position initiale, tirant un trait sur le fait de convoler en justes noces, livrant de manière si peu sibylline que Greg et elle ont eu une brève aventure lorsqu’elle était encore avec Jeff…l’info venant mettre à mal sur le coup le niveau d’estime réciproque des deux copains et le taux de confiance avec la femme de Greg. Cependant, fenêtre entrouverte sur une possible période bénie des dieux, le fortuné Jeff achète l’immeuble où a décidé de s’installer Charline. Des fois que, comme au bon vieux temps…

 

                                                                                             Michel Poiriault

                                                                                             [email protected]