Chalon sur Saône
« Stop violences familiales Chalon » : un réseau complet pour que les victimes s’en sortent
Publié le 18 Octobre 2017 à 07h35
La violence entre conjoints n’est pas un choix d’ambiance : c’est une entreprise de destruction, c’est donc un délit (qui peut, si on laisse faire, devenir un crime). Gilles Platret, maire de Chalon, a décidé dès son élection en 2014 d’y répondre spécifiquement.
Les violences conjugales sont celles qui s'exercent à l’encontre d’un conjoint ou concubin, que le couple soit marié, lié par un PACS, en simple concubinage ou même séparé. Il peut s'agir de violences psychologiques (mots blessants, insultes, menaces, cris), physiques (coups, blessures), sexuelles (agression sexuelle, viol), et même économiques, car la situation de violence est caractérisée par un mode de domination répété voire constant.
En droit pénal, ce sont des « violences aggravées », et les lois protègent les victimes, quels que soient leur sexe, leur âge, leur situation sociale. On le précise car personne n’est à l’abri de ces violences, il ne suffit pas de porter beau socialement pour que les choses soient belles dans le huis-clos de l’intimité, à l’abri des regards.
Un regard extérieur est pourtant salvateur. La municipalité, soutenue activement par Damien Savarzeix, chef du Parquet du TGI, et par le commissaire Pic, a donc voulu le rendre opératoire.
Ce regard intervient à la minute où une victime se signale, soit au 0800 800 071, soit en parlant, dans une des structures dont la liste est sous l’article : dans chacune, un ou une référente dédié(e) au dispositif, rentre alors en contact avec celle qui le coordonne, Stéphanie Rousseau. A partir de là, la coordinatrice rencontre très rapidement la victime, fait avec elle une évaluation de la situation puis oriente (situations de conflits liés à des contextes ponctuels, comme un divorce, ou un épisode de vie qui génère des réactions de crise), ou met en branle le maillage du réseau* et dans les pires des cas, la ville s’est donné les moyens de mettre à l’abri la victime, de la loger, de lui fournir des packs d’urgence (nourriture, effets de première nécessité), de faire intervenir la CAF, des bailleurs sociaux, des médecins, des psy, etc.
Le dispositif chalonnais, opérationnel depuis le 25 novembre 2016, a d’abord reposé sur les épaules de Sandra Barjon, coordinatrice du CLSPD**, accompagnée par Hervé Dumaine, premier adjoint au maire en charge de la sécurité, Stéphanie Rousseau, éducatrice spécialisée, est arrivée en avril 2017, salariée par la Ville pour assurer l’entrée et le suivi dans le parcours de toutes les victimes de violences conjugales qui veulent (s’)en sortir. A ce jour, elle recense déjà 121 situations suivies, c’est impressionnant. Stéphanie Rousseau assure un mi-temps de présence dans les murs du commissariat, elle est sur place pour relayer immédiatement les policiers qui reçoivent plaintes ou mains courantes, la plainte n’est toutefois pas une condition sine qua non, toute personne subissant des violences caractérisées (physiques, psychiques, économiques) peut la solliciter, et sans doute le doit-elle, tant il est inacceptable de se maintenir dans une situation qui attaque son intégrité, physique comme morale.
Les réseaux VIF existent dans plusieurs villes du département, mais chaque municipalité élabore le sien selon son souhait, et les ressources existantes. A Chalon, l’équipe a voulu intégrer toutes les dimensions autour des pôles fondamentaux : santé, logement, judiciaire. Le maillage avec tous les partenaires est pensé pour que la victime n’ait pas à répéter 15 fois son histoire, le transfert d’informations se fait rapidement, dans le respect de la charte de déontologie signée par tous, et donc dans le respect de la personne.
Les membres de cette équipe sont bien conscients que ce qui arrive aux uns peut arriver aux autres, et ne sont pas en position dominante : il s’agit plutôt d’instaurer des liens de solidarité et d’entraide, et de laisser les institutions faire leur travail cas échéant.
La lutte contre les violences familiales passe également par des démarches de sensibilisation auprès des jeunes, dans les collèges et les lycées. Travail de fourmi à répéter sans cesse pour prévenir la casse des individus au sein des familles, casse qui entraîne avec elle des effets sur les descendants.
Dans 6 petites semaines l’équipe pourra saluer sa première année d’existence. « Fêter » serait inapproprié vu le sujet : toute atteinte à l’intégrité d’une personne est réprimée par la loi, à tous les degrés possibles. On voit très souvent des affaires de violences conjugales au tribunal : l’amour a bon dos quand il ne se nourrit que d’abîmer son partenaire, l’amour, ce n’est pas cela. On entend en salle d’audience correctionnelle : « je l’aime, mais ». Ce « mais » doit faire réfléchir, on n’aime pas au prix de sa propre santé, de son propre équilibre, voire de sa vie.
Comme l’écrivait Jean-Jacques Rousseau dans le Contrat Social : obéissant à la loi, je n’obéis à personne. La loi est en la matière éminemment protectrice, elle permet de se situer par rapport à des repères collectifs qui interdisent la soumission à l’arbitraire d’un conjoint ou d’une conjointe. Si vous pensez en avoir besoin, recourez au 0800 800 071, vous rencontrerez une équipe « mobilisée et bienveillante ». Demander de l’aide, c’est déjà sortir du huis-clos mortifère, c’est se retrouver avec d’autres, dans un maillage de liens qui brise l’isolement : le reste de l’histoire appartient à chacun(e).
Florence Saint-Arroman
* Le réseau ViF chalonnais compte comme principaux partenaires : la Police Nationale, la Police Municipale, la Gendarmerie , les Urgences, la Croix Rouge, le Conseil Départemental / Maison des Solidarités (assistantes sociales de secteur),l ’AMAVIP (Association de Médiation et Aide aux Victimes d’Infractions Pénales), le CIDFF (Centre d’Information sur les Droits des Femmes et des Familles), l’Association Pour l’Accueil et la Réinsertion APAR, La Croisée des Chemins, l’Association des PEP71 « la Résidence de l’Ecluse », l’Association « La Sauvegarde71 », la Caisse d’Allocations Familiales, l’Education Nationale, le Planning Familial, le SIAO / 115 Association Le Pont, les autres services du Centre Hospitalier (service social, centre de planification etc…), le Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation SPIP, la Protection Judiciaire de la Jeunesse PJJ, le TGI de Chalon (Présidente et procureur de la République), la Direction des Solidarités et de la Santé, Ville de Chalon et Grand Chalon, la Direction de la Cohésion sociale (Service Mission Familles), la Délégué départementale aux droits des femmes et à l’égalité DDCS, la FACE, l’UDAF, les Restos du Cœur, les Bailleurs, l’AEM (Association Enquête et Médiation)
Dans chaque institution : des référents VIF identifiés.
**Ce dispositif « Stop violences familiales Chalon » s’inscrit dans le cadre du conseil local de sécurité de prévention de la délinquance (CLSD), que Gilles Platret a réactivé pour que la ville soit en mesure d’apporter des réponses adaptées à la spécificité des problèmes qui se posent à Chalon, différents de ceux qui existent dans de petites communes, par exemple. Le CLSD s’organise en 3 branches, qui sont à la base des thèmes nationaux : les mineurs, la violence familiale, la tranquillité publique.
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