Chalon sur Saône

Pour Hawa Fofana, salariée de celle-ci pendant 20 ans, la régie de l’Ouest chalonnais, « c’est la lumière du quartier »

Pour Hawa Fofana, salariée de celle-ci pendant 20 ans, la régie de l’Ouest chalonnais, « c’est la lumière du quartier »

Aux Prés Saint-Jean, comme au Stade, les salariés des régies de quartier se sont mobilisés pour faire entendre raison au pouvoir en place, qui a décidé cet été de supprimer les contrats aidés. Ils n’étaient pas seuls. En effet, adhérents, associations amies, habitants des quartiers étaient à leurs côtés. Retour sur la mobilisation de la régie de quartier de l’Ouest chalonnais, hier, au Stade.

Hawa Fofana a travaillé pendant 20 ans pour la régie de quartier de l’Ouest chalonnais, dont les locaux se trouvent en plein cœur du quartier du Stade. Elle a commencé le 1er juillet 1997. Elle était femme de ménage. Sans ce travail, elle n’aurait pas pu, faute de revenus, élever correctement ses enfants. Surtout, si elle n’avait pas été « mise à disposition » auprès de la PJJ (Protection Judiciaire de la Jeunesse), sa vie aurait peut-être été plus mouvementée quand ceux-ci étaient adolescents.

En effet, en travaillant là-bas, en rencontrant des éducateurs, elle a pu discuter avec eux, bénéficier de leurs conseils. Si bien que ses enfants sont devenus des adultes sans trop de heurts. Elle se rappelle aussi que c’est elle ou encore Charwa Chandoul (20 ans de travail au sein de la régie de quartier pour elle aussi), qui expliquait dès 1998 aux habitants du Stade ce que c’était que le contrat de ville, en lieu et place des autorités qui l’avaient signé…

Alors, aujourd’hui, que l’existence même de la régie de quartier est menacée par les décisions estivales du président Macron et du gouvernement Philippe, Hawa Fofana est solidaire. Solidaire de la régie de quartier de l’Ouest chalonnais. Solidaire de toutes celles et ceux qui, en contrats aidés, sont menacés par la décision de les supprimer. Surtout, elle ne comprend pas. Pour elle, la régie, « c’est la lumière du quartier ». Si cette association n’était pas là, « le quartier serait mort », depuis longtemps.

(de g. à d. : Hawa Fofana, Charwa Chandoul et Wassila Tej, gestionnaire et comptable de la régie de quartier)

Christophe Gaudot, lui, a eu le triste honneur d’être "le premier employé en contrat aidé à ne pas être renouvelé", suite à la volonté imposée brutalement par le pouvoir en place (son contrat s’arrêtait le 12 septembre dernier). Si la régie de quartier de l’Ouest chalonnais a bien trouvé une solution provisoire pour qu’il ne se retrouve pas brutalement au chômage, en lui proposant un CDD de 24 heures par semaine jusqu’au 31 décembre prochain, il l’a mauvaise, en plus de sentir l’angoisse revenir lui nouer le ventre. Ce mercredi, c’était son anniversaire et il aurait préféré le souhaiter autrement qu’en manifestant contre une décision incompréhensible. Surtout, lui non plus ne comprend pas.

Alors qu’aucune entreprise ne voulait le recruter en raison de son âge, la cinquantaine, Christophe Gaudot s’est formé, à la propreté et à l’hygiène. En outre, quand la régie lui a proposé un poste de concierge au sein du quartier du Stade, parce que l’OPAC ne trouvait personne, il a accepté. Bref, sa détermination à s’en sortir, trouver du travail, pour subvenir lui-même à ses besoins, il l’a démontrée. En plus, comme il cherchait à avoir de l’expérience en rapport avec sa nouvelle formation, il était plus confiant, mieux dans sa vie. Pour lui, supprimer les contrats aidés, c’est refuser de reconnaître les efforts de tous ceux qui, comme lui, et avec l’aide des régies de quartier, se sont accrochés à la vie. Un choix d’autant plus incompréhensible que, sans les contrats aidés, les régies de quartier sont menacées. Et que sans elles, "les quartiers où elles sont présentes meurent".  

(Christophe Baudot)

(Josiane Stienne. Formée à la mono borsse, elle a pu apprendre aux autres à s'en servir. Elle a toujours été fidèle au poste. Aujourd'hui, pour elle, il faut faire comprendre que les salariés ne peuvent pas rester dans une telle incertitude).

Pour la Sauvegarde 71, une association inscrite dans les politiques publiques pour décliner une action éducative et sociale dans le département de Saône-et-Loire, l’utilité des régies de quartier n’est plus vraiment à démontrer. Pour ses représentants, présents aux côtés des salariés en contrats aidés qui manifestaient hier, la régie de quartier de l’Ouest chalonnais, c’est bien souvent le « seul moyen de trouver du boulot à des jeunes qui ne sont encore pas tout à fait prêts à travailler ». De leur trouver du boulot mais aussi de les insérer sur le marché de l’emploi. Car la régie de quartier ne fait pas que proposer des contrats aidés. Elle accompagne, forme au besoin. Et si jamais il n’y avait pas moyen de faire entendre raison aux plus hautes autorités nationales, les conséquences ne seraient, pour la Sauvegarde 71, rien moins que terribles.

Faire entendre raison, le directeur de la régie de quartier de l’Ouest chalonnais, Yannick Barbier, ne désespère pas encore que cela puisse arriver, même s’il est visiblement inquiet, la moitié de ses salariés (50 au total) étant en contrats aidés. Il a bon espoir que les choses ne restent pas figées parce qu’il estime avoir été entendu par tous les institutionnels locaux qu’il a sollicités semblent avoir clairement pris « la mesure du danger » et des désastreuses conséquences sociales que peut engendrer la décision de cet été. En effet, dit-il, « on a pu entendre des signaux positifs » et « chacun s’accorde à dire que l’existence de la régie est fondamentale pour la vie du quartier ». Même si, dans les faits, il « attend toujours la traduction en actes de tout ce qu’on lui a dit ». En attendant, il fait des demandes individuelles, pour chaque contrat menacé, pour obtenir, par dérogation, de pouvoir le renouveler. Un travail de longue haleine, qui coûte de l’énergie et du temps. De l’énergie et du temps qui pourrait être employé à meilleur escient. C’est pourquoi, en lieu et place de dérogations individuelles, il demande de pouvoir déroger globalement, pour tous les emplois d’urgence sociale, à la nouvelle règle édictée sans concertation cet été par le couple exécutif arrivé au pouvoir au printemps dernier.

Samuel Bon