Chalon sur Saône

Mardi Alternatif d'ACTE consacré au déclin des oiseaux

Mardi Alternatif d'ACTE consacré au déclin des oiseaux

Les mardis alternatifs reprennent vie, Salle Pierre Bridet, à Saint-Jean-des-Vignes. Hier, le thème était «Les oiseaux, un indicateur du déclin de la biodiversité». Une soirée animée par Alexis Révillon, membre de la Ligue de Protection des oiseaux (LPO). Plus de détails avec Info Chalon.

Hier, mardi 13 octobre, à 19 heures, signait le grand retour des mardis alternatifs d'ACTE (Association Chalonnaise pour la Transition Énergétique), dans la salle municipale Pierre Bridet, à Saint-Jean-des-Vignes, avec pour thématique «Les oiseaux, un indicateur du déclin de la biodiversité».


Dédiée au très regretté Francis Mastrolia, un militant de longue date notamment dans ACTE, qui s'est éteint, le jeudi 30 avril 2020, des suites du COVID-19, la soirée était animée par Alexis Révillon, membre de la Ligue de Protection des oiseaux (LPO).


Avant que ce spécialiste des oiseaux commence, Mickaël Bouteilley, le président d'ACTE, et Nicole Estevenon, autre membre actif, ont pris la parole pour annoncer les événements à venir.


La diversité de l'avifaune, c'est environ 11 000 espèces dans le monde, 550 déjà vues en France dont 300 qui s'y reproduisent et 350 visibles en Bourgogne en Bourgogne, 150 qui s'y reproduisent.


Alexis a expliqué à l'assistance, comment évaluer l'évolution des populations d'oiseaux, d'après les quatre méthodes de suivi (le suivi participatif à grande échelle, le suivi d'espèces bioindicatrices, le suivi des espèces migratrices et le suivi par baguage.


D'après la LPO, les oiseaux sont un groupe d'êtres vivants menacé partout dans le monde, avec plus de 2,9 milliards d'oiseaux disparus en l'espace de 50 ans! De son côté, l'Europe a perdu 400 millions d’oiseaux lors des trente dernières années.


Sur les 11 000 espèces d’oiseaux qui peuplent la planète, 1500 sont placées sur liste rouge.


Il existe une érosion des espèces, mais aussi une diminution massive des populations d’oiseaux. Ce déclin avien n'est pas qu'une impression, c'est un impitoyable baromètre de cette crise écologique.


À quoi doit-on cette érosion?


Le principal facteur du déclin de l'avifaune est la perte ou la dégradation de ses habitats et de la nourriture qui leur est associée, l'utilisation massive des pesticides, en particulier l'impact des néonicotinoïdes qui a des effets délétères sur les oiseaux migrateurs — une fois encore, la liste des dommages liés aux néonicotinoïdes s'allonge mais personne n'a le courage de les interdire définitivement... —, en particulier l'imidaclopride, le néonicotinoïde le plus courant, qui a provoqué de nombreux cas d’empoisonnements d'oiseaux surtout en milieu agricole.


À l'échelle mondiale, la déforestation est un problème majeur alors qu’en France, les zones cultivées et les habitats humides sont les plus touchés, du fait de l'urbanisation du territoire et d'une agriculture encore trop intensive.


L'impact des changements climatiques est déjà à l'œuvre. Songeons qu'avec l'augmentation des températures sur la planète, plus de 2300 espèces, soit près d'un quart de l'avifaune mondiale, risquent tout simplement de disparaître. Une autre preuve s'il en faut des dangers du réchauffement climatique.


L'introduction d'espèces exotiques ou invasives a aussi un impact sur la population aviaire. Par exemple, les populations d'oiseaux des archipels océaniques souffrent de l'introduction artificielle d'espèces comme les rats ou, plus près de nous, les ragondins, mammifères qui causent des dommages considérables.


Dernière menace, et non des moindres, nos chers chats domestiques, véritables prédateurs, qui sont un fléau pour la biodiversité, à ne pas prendre à la légère. En effet, sous ses airs attendrissants, le chat est un véritable tueur en série qui occupe une partie de sa nuit à chasser un peut tout et n'importe quoi. Il s'attaque principalement aux petits mammifères, petits oiseaux mais aussi à toute proie à sa portée. La plupart du temps, il n'a pas pour objectif de se nourrir mais plutôt de satisfaire ses instincts naturels de carnassier.


Au niveau planétaire, le chat, est, derrière le rat mais devant le renard et le chien, à l'origine de l'extinction de centaines d'espèces. Ainsi, les chats domestiques tuent environ 324 millions de petits animaux par an même s'ils ne sont pas les seuls responsables : ce sont, avant tout, les activités humaines et notre empreinte de plus en plus forte sur le «milieu naturel» qui constituent la principale cause de déclin de la faune sauvage. La chasse y participe : sur le territoire métropolitain, entre 149 000 et 895 000 oiseaux sont tués illégalement chaque année...


Au niveau mondial, avec le déclin des populations aviennes, la chasse devient de moins en moins durable.


Rien qu'en Méditerranée, chaque année, 25 millions d’oiseaux sont tirés ou attrapés avec des filets ou de la glu sur les branches, souvent à des fins commerciales. Comme les bruants ortolans (Emberiza hortulana), auparavant, les fauvettes (Sylvia melanothorax) qui sont aujourd’hui vendues en grillades, sur l'île de Chypre, à des clients russes argentés.


Les vitres des abribus et des bâtiments translucides ou réfléchissants créent aussi de gros dégâts. Enfin, d'autres causes anthropiques de mortalité sévissent, comme l'implantation des pylônes, de lignes électriques et de parcs éoliens qui, selon leur emplacement, provoquent des risques de collision et dérangent les espèces sensibles.


Dans la même idée, la LPO, doit sans cesse se battre contre les pratiques illégales en regard du droit européen, type chasse à la grive.


Les conséquences d’un tel appauvrissement?


À court terme, des pertes de rendement dans les zones cultivées, l'attaque plus fréquente des ravageurs (insectes, petits rongeurs) dont les oiseaux sont des grands régulateurs et l'appauvrissement de nos sols. Plus globalement, les écosystèmes ainsi étiolés vont présenter moins de résilience en cas d'événements climatiques hostiles.


Même le moineau, volatile urbain qu'on imagine invincible, figure sur la liste rouge de certains pays européens. Au départ, le moineau est, par excellence, l'oiseau qui s'est le mieux adapté à l'Homme. Il s'est répandu dans nos cités lorsque l'être humain s'est mis à nourrir le cheval domestique avec de l'avoine. Les moineaux sont alors sortis des grottes et ont suivi les êtres humains — enfin, surtout l'avoine! — au cœur des habitats urbains. Aujourd’hui, les moineaux raffolent des graines, mais peuvent très bien se contenter de restes de fast-food ou autres reliques de nos aliments.


C’est ce qu'on croyait en tout cas...


Récemment, les Anglais ont tiré la sonnette d4alarme en remarquant que les house sparrows diminuaient drastiquement. En étudiant les causes de ce déclin, il a été établi que si les spécimens adultes profitaient de la générosité des déchets, les petits, eux, mouraient dans leur nid, car seuls les insectes sont appropriés à leur croissance. Or, les villes manquent d’insectes.


Pour les faire revenir, il faudrait planter des prairies parsemées de fleurs indigènes, car les fleurs exotiques sont de peu d'intérêt pour eux. Le mieux pour eux serait de ramener des marguerites et des sureaux à la place des forsythias et autres laurelles.


Par ailleurs, beaucoup d'oiseaux souffrent de l'architecture contemporaine qui, avec sa prédominance de cubes de béton et de verre aux lignes pures, a aboli les nichoirs potentiels (corniches, encorbellement, recoins) prisés par les martinets et les hirondelles.


Un autre oiseau typiquement urbain et qui, pour certains, ne se porte que trop bien? Le pigeon, bien sûr!

Autrefois élevé pour servir d'ornement ou de messager, le pigeon biset (Columba livia) est redevenu (relativement) sauvage, mais attaché à nos villes où il trouve largement de quoi manger. En réalité, les élevages de pigeons existent encore. Certains de ces éleveurs vont même jusqu'à poser de gros problèmes, en empoisonnant les faucons pèlerins (Falco peregrinus) qu'ils estiment responsables de la mort de leur cheptel!


Le pigeon a proliféré dans notre environnement urbain grâce aux corniches, anfractuosités où nicher et surtout grâce à la nourriture et aux graines qu'il trouve en profusion. C'est toujours compliqué de parler de surpopulation — évitons de faire preuve d'anthropocentrisme! — mais nous ne devons pas être opposés à la politique de stérilisation menée par plusieurs municipalités, dont celle de Chalon-sur-Saône, pour éviter une prolifération trop importante de pigeons.


À cette fin, la municipalité a favorisé l’installation des pigeons dans un nid très confortable, du côté des Granges Forestier, afin qu'on puisse supprimer leurs œufs. C'est une méthode moins dangereuse que le recours à des graines qui stérilisent avec le risque qu'elles soient ingérées par d'autre oiseaux. Contrairement à l'idée reçue, les pigeons ne sont pas sales et ne transmettent aucune maladie, mais ils occasionnent, c'est vrai, des problèmes de souillure des bâtiments avec leurs fientes.


Par ailleurs, même s'il niche librement, force est de reconnaître que le pigeon biset des villes fait pâle figure à côté de son ancêtre le pigeon biset sauvage que l’on trouve dans les falaises de Bretagne. C’est sûr qu’à manger des restes de hamburgers, de tacos, de pizzas et autres kebabs, le pigeon urbain a perdu pas mal de ses instincts!


Va-ton vers un ciel et des matins sans oiseaux?


Pourtant, préserver la biodiversité, c'est assurer à l'être humain un avenir sain et serein.


En fait, chacun peut contribuer à un avenir moins sombre pour la gent ailée.


Mais attention, , là aussi, il y a des croyances qui ont la vie dure! Nourrir les oiseaux en hiver n'est pas une mesure de conservation pour eux, il s'agit plutôt d'une sensibilisation, à pratiquer avec modération. D'autant que de nouvelles études précisent que certains aliments riches en graisse diminuent la fertilité des oiseaux…


Le bon geste pour l’avifaune urbaine?


Tout simplement, faire revenir la biodiversité près de chez soi, sur son balcon ou dans son jardin. Malheureusement, la manie du propre est un obstacle au mieux vivre ensemble entre hommes et oiseaux.


De toute façon, les initiatives individuelles sont à elles seules insuffisantes pour inverser la tendance. Les pouvoirs publics et tous les autres secteurs de la société doivent mettre la protection de la biodiversité et du climat au centre de leur agenda, sinon ce sont les êtres humains qui en pâtiront très vite!


Pour les oiseaux, les meilleurs havres de paix restent toutefois les réserves naturelles.


Pour beaucoup d'entre nous, un monde sans oiseaux est impensable. Ce serait de très mauvais augure pour l'humanité, comme l'observaient les devins de l'Antquité dans les entrailles des oiseaux.


Et, finissons sur ces quelques mots de Jacques Prévert : «Un seul oiseau en cage et la liberté est en deuil».

 

 

Karim Bouakline-Venegas Al Gharnati