Culture

Cet Ary Abittan qui n'a d'ordres à recevoir que du rire imposant

Cet Ary Abittan qui n'a d'ordres à recevoir que du rire imposant

Pourquoi en définitive aller chercher loin ce que l’on a sous la main ? Fort de ce constat, l’humoriste Ary Abittan n’a fait ni une ni deux vendredi soir en la salle Marcel-Sembat de Chalon-sur-Saône, en circonscrivant son champ d’intervention langagier à sa personne. Autrement dit, c’est le récapitulatif accommodé à sa sauce de ses quarante-trois années d’existence qui a constitué le fil conducteur de son one-man-show My Story. Sa verve mordante n’a laissé qui que ce soit indifférent…

Passer en revue les étapes de sa vie, et s’en moquer ouvertement

« C’est comme une séance de psy ce soir, sauf que c’est vous qui payez », a-t-il parlé à la cantonade. L’auscultation de son itinéraire a, cela va de soi, été déformée par le prisme du décalage, toutes les opportunités se montrant bonnes pour aimanter le rire. Et dans ce registre le public n’a pas été soumis à la portion congrue, Ary se débattant comme un beau diable dans son marasme…le « malheur » de l’un faisant le bonheur des autres ! Son enfance, ses parents, son mariage, ses enfants, son divorce, les femmes à conquérir…le déballage aura été d’une belle intensité. S’amusant très souvent de ses vannes, se dépensant sans  compter en arpentant en long, en large et en travers la scène, et en joignant le geste à la parole, le théâtral Ary Abittan a été l’instigateur d’ondes de plaisir systématiquement renouvelées. « Mon père, c’est le seul père au monde qui a tout voulu faire comme son fils ! ». Ca sous-entendait déjà pas mal de choses !

Celui dont le premier métier a été vendeur de clémentines sur le marché de Sarcelles, a dû composer avec les aléas de la vie : »La moitié de ma classe est morte, l’autre moitié est en prison ! » Pauvre de lui ! Quand il était malade, sa mère lui conseillait de tremper ses pieds dans une célèbre boisson anisée, mais ça n’allait pas mieux, et fait aggravant, il « sentait Gérard Depardieu » ! Ne lui parlez surtout pas de la famille recomposée, « la plus grande enculerie du siècle » ! Les vicissitudes de l’amour lui ont fait porter le fardeau de l’ingratitude, car « le vrai problème du couple c’est qu’on nous oblige à être fidèle ». Partant de là, ce fut le parcours du combattant pour retrouver l’âme sœur après sa séparation. Sans grand résultat, même après avoir rencontré tous les genres de femmes. Comme on le subodore peu ou prou, Ary Abittan ne se sera pas ménagé, puisque l’autoflagellation et la baisse d’estime étaient les  figures de proue de son spectacle, au sein duquel ses assertions furent bariolées d’extraits de chanson d’interprètes illustres (Prince, Maé, le king Elvis, Queen, Piaf…). Parfois convient-il de savoir raison garder, sous peine d’en payer le prix fort. «Il faut être gentil avec ses enfants, d’abord ce sont eux qui vont choisir votre maison de retraite ! » Bref, tout était matière au détournement, et ces subtilisations furent salutaires à plus d’un titre au regard de la condition sine qua non : faire glisser les spectateurs sur le terrain de l’hilarité.

                                                                                                 Michel Poiriault

                                                                                                [email protected]