Faits divers

Après le meurtre de Sylvie Aubert en 1986, la mémoire reste toujours vive pour Martine, une des sœurs ainées

Après le meurtre de Sylvie Aubert en 1986, la mémoire reste toujours vive pour Martine, une des sœurs ainées

C’est l’une des plus anciennes affaires connues sous le nom générique et inexact des « Disparues de l’A6 » en Saône-et-Loire. Le 14 novembre 1986, Sylvie Aubert, une jeune caissière de 23 ans, disparaît entre son lieu de travail, le Mammouth de Chalon-Nord et le domicile de ses parents à Saint-Loup-de-Varennes. Sa mobylette, toujours conservée dans le département des scellés du TGI de Chalon-sur-Saône, est retrouvée sur une petite route de la commune. Son cadavre, étranglé et à moitié dénudé, resurgit à trente kilomètres de là, six mois plus tard, le 20 avril 1987, dans la rivière Dheune, à Géanges. Rencontre pour info-chalon.com avec Martine, une des sœurs aînées de la victime, qui, presque trente ans plus tard, continue à poser des questions.

La photo de sa sœur trône sur le mur de son salon, dans un cadre au-dessus de celle de ses parents. Sylvie Aubert, dans un autre cadre à la cuisine, tient dans ses bras un petit bébé, son neveu. Le nourrisson d’hier a désormais un métier et du poil au menton. Sylvie, sa tante n’est plus là pour le voir. Sylvie Aubert, 23 ans  à jamais depuis 1986, appartient à la triste liste des jeunes femmes disparues de Saône-et-Loire, des dossiers criminels douloureux.

Martine, optimiste par nature, espère pour sa sœur et sa famille un dénouement similaire à celui des affaires Maillery du Creusot et Blétry de Blanzy. Des dizaines d’années après les faits, les nouvelles techniques d’analyses ADN peuvent « matcher », révélant un profil ADN du tueur présumé. Soit de nouveaux témoignages, comme dans l’affaire Mura,  permettent de confondre un suspect. Des pistes croisées qui à force d’acharnement, émaillées par des phases de découragement, arrivent à donner une réponse. Savoir, aussi terribles soient –ils, comment se sont déroulés les derniers instants de la victime.

A l’époque de la disparition de sa sœur, en 1986, Martine est déjà soignante mais est surtout jeune maman. Elle habite loin de la ferme familiale. Ses parents, ses frères et sœurs plus proches s’investissent beaucoup dans des appels à témoins, l’enquête. Elle n’est pas sur place et du fait de sa maternité comme de son emploi, loin de Saint-Loup vit moins au jour le jour avec cette tragédie familiale. Depuis, fatiguée des piétinements de l’enquête et bouleversée par le cauchemar vécu par leurs parents, la fratrie n’y croit plus autant. Trop de mauvais souvenirs, trop de douleur, trop de proximité, trop lourd à porter pour des parents brisés, décédés aujourd’hui. Ces dernières années, Martine et son frère cadet sont les derniers à croire qu’un jour, ils sauront pourquoi et par qui leur sœur a perdu la vie. Alors, chacun sa piste. Martine creuse celle d’artisans locaux décédés, son frère s’intéresse à la bande de jeunes d’un café proche, les derniers à avoir aperçu la jeune femme au cyclomoteur. Peut-être déboucheront-elles une nouvelle fois sur des impasses. Des analyses ont jadis pu trouver une trace d’ADN masculin sans l’identifier sur des scellés. Le meurtrier de Sylvie est un homme. Voilà tout ce qu’on sait.

 Selon le parquet chalonnais, une action l’an suffit à laisser l’enquête vivre sa vie. A laisser surtout l’espoir vivre, malgré le temps qui s’écoule. Martine, pour sa part, a adhéré à l’association Christelle, créée en 1997 après le meurtre de Christelle Maillery à Blanzy. Une communauté faite de douleurs, de souvenirs et d’espoir entre onze familles de victimes de crimes non élucidés qui permet de tenir au fil des ans. Martine a vécu le procès Mura en 2014, se demande, comme tous, si elle aura le courage et la dignité que Mme Pichon, la mère de Christelle Maillery, a montré dans le box face à l’accusé, chaque jour d’audience, si jamais le meurtre de sa sœur connaît le même dénouement judiciaire. Martine reconnaît toutefois avoir personnellement beaucoup de mal à se rendre à la cérémonie d’hommage annuel, chaque 28 décembre,  devant la stèle de Blanzy, à la date anniversaire de la disparition de Christelle : « ça me bouleverse trop, tout remonte ». Ce mois de janvier, Martine et ses avocats espéraient que les résultats de nouvelles analyses permettraient d’ouvrir de nouvelles pistes. Il faudra hélas encore attendre, rien de tangible n’est sorti des éprouvettes selon le parquet chalonnais pour l'instant. Un constat décevant mais qui peut basculer du jour au lendemain, au fil de nouvelles trouvailles. Savoir se préserver est crucial pour la famille, pour mieux résister et voir, un jour sans doute, aboutir une quête de vérité vieille de presque trente ans.

 

Florence Genestier

 

Le site de l’association Christelle : http://www.association-christelle.com/

 

Jean-Pierre Mura, reconnu coupable du meurtre de Christelle Maillery en première instance par les assises de Saône-et-Loire attend son procès en appel. Pascal Jardin, bourreau présumé de Christelle Blétry s’apprête à comparaître devant la Cour d’Assises de Saône-et-Loire fin 2016.