Côte chalonnnaise

Grâce à Arthur & Marie Rodet, le partage entre voisins n’a jamais été aussi simple à Rully

Grâce à Arthur & Marie Rodet, le partage entre voisins n’a jamais été aussi simple à Rully

Il a fallu un geste simple, comme créer la page Facebook « Je partage à Rully », pour convaincre 1/3 des habitants — plus de 500 — que l’entraide entre voisins ne demandait qu’à se manifester. Le vœu de Marie et de son frère Arthur ? Être imités dans chaque commune !

Arthur et Marie ne sont pas des activistes écologistes. Leur génération a simplement été sensibilisée à la conscience écoresponsable.

Le frère et la sœur : des Ruyllotins engagés

Photographe à Rully, Marie Rodet, la petite trentaine, a souhaité installer son studio dans son village natal : « Ici, on est proche des gens, j’aime mon village, j’en suis fière. Je me suis toujours intéressée à l’écologie et surtout à cette question : comment puis-je, dans ma vie de tous les jours, apporter ma petite pierre à l’édifice ? Il y a quelques années déjà que j’ai modifié mon mode de consommation, j’achète des affaires neuves seulement quand je ne peux pas faire autrement. Je me méfie des achats inutiles. »

L’attachement à sa commune, son frère Arthur, 24 ans, l’a traduit par un engagement fort : il est membre du nouveau conseil municipal. La formation d’Arthur le destinait à devenir serrurier métallier, il avait entamé son tour de France chez les Compagnons du devoir quand un accident de la vie l’a immobilisé sur un fauteuil roulant. « Je suis revenu à Rully, je ne pouvais plus pratiquer. Et je me suis investi dans des associations. » Sa passion pour les voitures anciennes l’a poussé à créer une association Les Roues Yotines. Puis à s’engager pour Rully aux élections municipales de 2020 : « Comme j’aime mon village, ça m’a plu tout de suite. » 

Comment germe l’idée…

Les achats inutiles, Marie en a eu la conscience aiguë en regardant un reportage sur les ressourceries. « J’ai appris qu’une perceuse, par exemple, est utilisée en moyenne 12 min sur sa durée de vie. Ça a été un déclic. Je voulais partager avec d’autres ma conviction qu’on peut consommer autrement, en limitant notre impact sur l’environnement. » Pour contourner les difficultés de la ressourcerie (local, gestion…), Marie et Arthur cherchent un moyen simple : ils créent une page Facebook « Je partage à Rully ». « Nous n’avons rien inventé, ça existe ailleurs. Ce que nous aimons dans ce principe, c’est le lien qui s’établit naturellement entre les Ruyllotins » précise Arthur.

C’est l’attitude écoresponsable et l’esprit village en un clic !

Page Facebook : Je partage à Rully, mode d’emploi

Une seule règle d’or : aucune vente, seulement du don et de l’échange. Échange d’objets, de services et de bons plans. Vous avez besoin d’un lit parapluie le temps d’un week-end pour recevoir vos petits-enfants ? Des objets qui ne servent plus ? Vous proposez vos services de jardinage contre un autre service ? Ou alors un bon plan : je dois annuler un rendez-vous médical, je propose de le céder à qui en a besoin…

Les exemples d’Arthur et Marie sont légion et reflètent l’engouement des habitants de Rully : « Bien sûr au début, il y a eu un flottement, nous mettions nos propres annonces. Le confinement a fait décoller la page Facebook et aujourd’hui, plus de 500 abonnés utilisent ce réseau, il n’y a pas un jour qui passe sans nouvelles demandes, commente Arthur. Ce qui est génial, c’est que les gens se rencontrent, nous n’intervenons pas, ou seulement en tant que modérateur pour le respect de notre règle d’or. »

Et voilà comment créer une communauté solidaire et bienveillante, qui réfléchit à sa consommation !

Un dernier souhait ?

« J’adorerais que des gens d’autres villages fassent pareil, s’exclame Marie, je leur donnerais volontiers des conseils. Le but, c’est créer une communauté de proximité. Si chaque village avait son “Je partage à…”, les gens se connaitraient facilement. Moi, je ne suis pas partie en vacances, alors j’ai prêté ma tente tout l’été. »

La part du colibri

En rencontrant Arthur et Marie Rodet, j’ai repensé à cette légende amérindienne, citée par Pierre RABHI dans son livre La Part du colibri :

« Un jour, dit la légende, il y eut un immense incendie de forêt. Tous les animaux terrifiés et atterrés observaient, impuissants, le désastre. Seul le petit colibri s’active, allant chercher quelques gouttes d’eau dans son bec pour les jeter sur le feu. Au bout d’un moment, le tatou, agacé par ses agissements dérisoires, lui dit : “Colibri ! Tu n’es pas fou ? Tu crois que c’est avec ces gouttes d’eau que tu vas éteindre le feu ?” “Je le sais, répond le colibri, mais je fais ma part.” Telle est notre responsabilité à l’égard du monde, car nous ne sommes pas totalement impuissants si nous le décidons. »

Bravo à nos deux colibris ruyllotins !

Nathalie DUNAND
[email protected]