Chalon sur Saône

Les AED de Chalon-sur-Saône ne veulent plus être considérés comme de simples «pions»

Les AED de Chalon-sur-Saône ne veulent plus être considérés comme de simples «pions»

Ce 1er décembre à Chalon-sur-Saône fut marqué par la journée nationale de grève des assistants d'éducation (AED) en collège et lycée. Les «pions» réclament une vraie reconnaissance, la possibilité d'être titularisé et dénoncent leur précarité, exacerbée depuis la crise du coronavirus, alors qu'ils sont en première ligne pour faire appliquer le protocole sanitaire mis en place. Plus de détails avec Info Chalon.

Ce mardi, dès 7 heures 30, les assistantes et les assistants d'éducation (AED) du lycée Mathias se joignaient au mouvement de grève national lancé par plusieurs syndicats pour les personnels de l'Éducaction nationale.


Parmi les représentants syndicaux, Cyrille Bernizet, secrétaire général de la CGT Éduc'action 71, et Claude Cadot, autre membre de ce même syndicat, dénoncent les conditions dans lesquelles, ceux qu'on surnomment affectueusement les «pions», travaillent.


«Nous sommes au bord de l'épuisement!!!», lancent ces derniers en guise de ras-le-bol, devant les grilles du lycée.


Pour cause, depuis le début de la crise sanitaire, en plus de leurs missions quotidiennes déjà nombreuses, ils doivent faire face à une surcharge de travail due au protocole mis en place à la demi-pension, à l'internat et la gestion des absences des élèves en augmentation.


Tous dénoncent des situations de plus en plus précaires ainsi que la dégradation constante de leurs conditions de travail. Les AED revendiquent notamment un accès aux primes, une revalorisation des salaires ou encore un recrutement et une gestion académique.


«On demande à faire moins d'heures par semaine pour pouvoir faire des études à côté éventuellement et pour ceux qui le souhaitent d'être titularisés», nous explique Florence Rateau, la porte-parole des AED du lycée Mathias.


Pour l'heure, ils n'ont que des contrats de 1 an renouvelables pendant 6 ans.


«Au bout de 6 ans, c'est fini! Étant donné qu'on a de plus en plus d'AED qui n'ont plus 20 ans ou 30 ans, on souhaiterait pour ceux qui le souhaitent avoir une titularisation des postes. C'est vrai qu'avec le COVID et le Plan Vigipirate, ça fait remonter tout ce qui n'allait pas au sein des vies scolaires. Par exemple, là (au lycée Mathias), on a des collègues qui sont malades du COVID, ils ne sont pas remplacés», nous explique-t-elle.


A priori, 3 AED ont été décelés positifs.


«Plus tous ceux qui sont en cas contact. Quand on est en cas contact, on est pendant une une semaine à l'arrêt, le temps d'attendre les résultats du test ou quand on est en suspicion COVID. Par exemple, moi, ça m'est arrivé d'être en suspicion COVID alors qu'il n'y avait rien, et bien on est à l'arrêt pendant 8 jours et il n'y a pas de remplaçant. Il y a une semaine, on était 4 d'absents — j'étais dans les absents — : pas de remplaçants! Donc ceux qui sont présents font les remplacements de ceux qui ne sont pas là. On se dédouble en permanence et même on triple notre temps temps de travail», poursuit Florence.


«À l'internat, on se retrouve seules à surveiller des couloirs de 90 élèves», précise une de ses collègues.


Conséquence du non-remplacement des AED absents, il y a un surveillant de nuit par étage dans l'internat du lycée.


«Il y a personne qui vient nous remplacer, en fait donc on se débrouille avec ce qu'on a. On demande des créations de postes, parce que c'est vrai qu'avec le COVID, on voit cruellement le manque», ajoute à son tour, Émilie Le Broc'h, une autre AED.


Dans cet établissement, il y a 14 «pions» payés au SMIC pour 1200 élèves. Bien qu'ils soient en premier ligne comme les enseignants face à la crise sanitaire, ils ne bénéficient d'aucune prime COVID.


«À Mathias, nous sommes quelques uns à être étudiant et quand on est à temps plein, c'est hyper dur. Bon, on a quelques heures en moins, nous faisons 37 heures par semaine au lieu de 41. Personnellement j'ai zéro jour "off" dans ma semaine. Je commence le dimanche soir ici et je finis ma semaine le samedi matin au Conservatoire. J'ai quasiment pas de week-end et j'enchaîne comme ça. Certes, j'ai les vacances scolaires. Dès qu'on fait un stage ou autres pour nos études, on le fait pendant nos vacances scolaires. Du coup, on a quasiment pas de vacances», se désole une autre de leurs collègues.


Et pourtant, tous le disent : en dépit des difficultés et de la précarité, ils adorent leur métier. Car oui, insistent-ils, c'est un métier qui mérite une vraie reconnaissance.


«Pourtant on a pas que la fonction d'AED, on fait psychologues, parents, frères, sœurs, assistantes sociales, secrétaires, aides au devoir, vigiles. Vous voyez, on a beaucoup de casquettes mais on est payés que pour un seul travail», conclut Émilie avant de rejoindre la Maison des Syndicats à 10 heures où d'autres surveillants venus des différents établissements du Chalonnais se sont rassemblés ainsi que des soutiens parmi lesquels on retrouvait quelques jeunes et la conseillère municipale d'opposition de la liste Bien Vivre à Chalon, Amandine Ligerot.


Au total, 80 personnes étaient réunies.


«Les AED avaient témoigné de leur quotidien. On sentait que ça leur tenait à cœur. Ils ont demandé à changer de statut, à être titularisés pour avoir un vrai métier pérenne et une revalorisation salariale. Pour l'instant, ils font tourner tous les bahuts. Ils font partie de l'engrenage qui fait tourner la machine et ils sont payés 1200 euros avec des contrats qui peuvent s'interrompre chaque année», nous explique Cyrille Bernizet.


Les manifestants ont pris la direction de la Sous-préfecture de Chalon-sur-Saône, encouragés par un autre AED de 31 ans, Ulrich Gbenou.


Le sous-préfet de Chalon-sur-Saône, Jean-Jacques Boyer, a reçu une délégation, vers 11 heures, afin de faire remonter auprès du préfet de Saône-et-Loire, Julien Charles, leurs nombreuses revendications pour que celui-ci en fasse part à qui de droit.


C'était la première fois depuis 2003, date de la création des AED que ceux-ci manifestaient. Ils promettent de poursuivrent le mouvement s'ils n'obtiennent pas des avancées significatives concernant leur situation.

 


Karim Bouakline-Venegas Al Gharnati