Faits divers

TRIBUNAL CIVIL CHALON - dans la vraie vie nombre d’entre nous continuent d’en baver...

Pendant que les gens qui vivent dans les téléfilms de Noël se gavent de chocolat chaud en recherchant l’esprit de Noël qui les a désertés, dans la vraie vie nombre d’entre nous continuent d’en baver, pour des raisons multiples et variées, dont certaines les amènent à la barre du tribunal civil.

Pour ceux qui viennent, toutefois, car comme à chaque audience, on compte pas mal d’absents, et comme le dit l’adage, ils ont tort. L’audience de ce mardi 8 décembre aura-t-elle apporté à ceux qui auront eu le courage de venir faire face à leurs difficultés, un peu de lumière ? Le président Brochard est un juge constant. Constant dans sa façon de procéder, constant dans sa façon de s’adresser aux justiciables : ici on ne vous sert pas de chocolat chaud, ici on surveille de près le respect des procédures, ici on veille à l'application des lois, mais en tâchant d’arbitrer raisonnablement pour respecter les intérêts de chacun.

Le législateur le dit : les créanciers bailleurs sont prioritaires

L’intérêt d’un locataire ? Éviter l’expulsion, « sauvegarder votre toit » comme le dit le juge à cet homme qui a bu la tasse lors de sa séparation d’avec la mère de ses enfants, lesquels sont quatre, et les quatre à sa charge. Quelles sont les emm… qui se sont abattues sur lui à ce moment-là ? On ne sait pas, il reste flou sur la question. Une certitude en revanche : il a cessé de payer ses loyers, au point de devoir à l’OPAC pas loin de 5 000 euros. « C’est un très mauvais calcul, lui dit le président, vous avez quatre enfants à charge, le loyer est prioritaire. Les crédits à la consommation, s’il y en a, viennent ensuite. Le législateur le dit aussi : les créanciers bailleurs sont prioritaires. Vous, sans revenus et avec quatre enfants, vous étiez en état de surendettement. » L’homme en convient, mais répond : « Je n’avais pas le choix. »

Cela dit, il vient avec une bonne nouvelle. « J’ai appris hier qu’on m’embauchait. » De surcroît, l’avocate de l’OPAC explique au président que monsieur s’est engagé à payer son loyer, désormais, en rajoutant 250 euros par mois pour épurer sa dette progressivement. L’OPAC ne s’oppose pas à ce qu’il bénéficie de délais de paiement. L’intérêt du bailleur est alors respecté également. Le juge rendra sa décision en février prochain. Ce monsieur repart peut-être d’un pas plus léger.

Justifier de ses ressources et de ses charges, le B.A - BA

Être présent à l’audience est une chose, mais venir avec ce qui justifie de ses ressources et de ses charges serait encore mieux, or cela n’arrive que rarement, et pourquoi ? Ce n’est pas logique, mais c’est un fait : les gens viennent trop souvent sans avoir communiqué les éléments qui attestent de leurs situations, puis présentent des chiffres oralement, alors que le tribunal doit légitimement savoir sur quoi il s’appuie lorsqu’il prend une décision.

Imaginons madame X, qui doit beaucoup d’argent, et vient affirmer qu’elle peut donner 250 euros par mois en plus du loyer. Imaginons qu’elle ait quelques arguments pour se rendre crédible. Elle a peur d’être expulsée, elle cherche à sauver son toit, certes. Mais si le juge lui accorde des délais de paiement et qu’elle n’est pas en capacité, en fait, de régler cette somme-là, alors elle sera expulsée. Alors que si elle justifie de ses ressources et de ses charges, le juge fixera une somme adaptée à sa situation (sous réserve que cela soit possible dans le délai de 36 mois que la loi impose). Nous voici donc face à un mystère.

Presque 10 000 euros de dette locative

Mystère qu’incarne bien cette femme, locataire de la SEMCODA dans un village au sud de Lux. Son loyer ? 630 euros. Sa dette locative à ce jour ? 9 330 euros. Ses revenus ? 2 000 euros par mois, dit-elle. Le président s’assure que la CCAPEX* a bien été saisie, car c’est une condition de recevabilité de la demande. Elle l’a été. La femme à la barre est très émue, très tendue, sa voix est mal assurée alors qu’elle explique que dès janvier elle reprendra le paiement de son loyer, auquel elle ajoutera 200 euros chaque mois pour payer sa dette. « On a pu trouver une entente », dit-elle. Très bien, mais le président se saisit de sa calculatrice, il vérifie ce point : 200 fois 36 (le délai maximum de 36 mois autorisé par la loi), ça ne fait pas 9 330. La dame dit qu’en avril elle aura une arrivée d’argent qu’elle reversera immédiatement à son bailleur. Qu’est-ce qui le prouve ? Il semble qu’elle ait fait l’objet d’une saisie-attribution sur son compte bancaire et n’ait plus été en capacité de s’acquitter de son loyer, mais de toute façon elle ne justifie de rien. Le président lui laisse une chance : elle a 8 jours pour lui transmettre les documents qu’il demande. Il insiste : « Si je n’ai pas ces documents sur mon bureau… »

FSA

* CCAPEX : commission spécialisée de coordination des actions de prévention des expulsions locatives 
https://blog.caf71.fr/logement/creation-de-la-ccapex-euh-quesaco