Chalon sur Saône

Le quotidien au commissariat de Chalon sur Saône (4) : la brigade anti-criminalité, la BAC
 - « D’abord, on sécurise »

Le quotidien au commissariat de Chalon sur Saône (4) : la brigade anti-criminalité, la BAC
 - « D’abord, on sécurise »

La BAC de Chalon-sur-Saône est composée de quatre équipages (7 policiers le jour, 6 policiers la nuit), elle tourne de 13 heures à 5 heures du matin.

Ambiance lounge à bord d’un des véhicules banalisés de la brigade anti-criminalité. Nous sommes le vendredi 26 mars, début d’après-midi, il fait beau, tout est calme, la conduite est feutrée. On a l’impression de chevaucher un puma qui avancerait d’un pas tranquille dans un environnement serein, mais qui, à la moindre menace, est capable de faire preuve de capacités hors du commun. On patrouille avec un arsenal à bord.

Chalon-sur-Saône est une ville plutôt paisible 

La BAC de Chalon-sur-Saône est composée de quatre équipages (7 policiers le jour, 6 policiers la nuit), elle tourne de 13 heures à 5 heures du matin. Les trois policiers qui nous reçoivent nous disent ce que tous leurs collègues disent aussi : à Chalon, il y a davantage de délinquance que de criminalité et la ville est plutôt paisible. « L’affaire de mardi, à la station-service, c’est typiquement notre travail. Un vol, une agression, on nous donne un signalement, et on recherche les auteurs présumés. Mais on travaille beaucoup sur initiatives, et, à Chalon, on a la chance d’être autonomes. En ce moment, on est beaucoup sur les stups. On n’a quasiment plus de délinquance de voie publique depuis que les stups se sont développés. Par exemple, il y a beaucoup moins de véhicules incendiés qu’il y a dix ans : on évite de nous faire venir dans les quartiers. » 

Depuis les attentats de 2015, les BAC sont habilités « niveau 2 »

La BAC a sa propre armurerie : ces policiers sont habilités « niveau 2 ». Depuis les attentats terroristes de 2015, le ministère de l’intérieur a mis au point un schéma national d’intervention (1). Des unités de proximité présentes sur tout le territoire sont chargées de la première intervention. Le PSIG sabre en gendarmerie et les BAC en police nationale doivent se mobiliser et intervenir, pendant que les forces d’intervention spéciales (le niveau 3, essentiellement RAID, GIGN, BRI) se transportent sur les lieux. Depuis 2015, les policiers de la brigade anti-criminalité reçoivent une formation spéciale et sont dotés d’un armement lourd.

Fusil d’assaut et protections afférentes

Lourd au sens propre comme au sens figuré. Leur fusil d’assaut, un HK G-36, est une arme de guerre. Il permet les tirs à distance et offre une puissance de feu capable de répondre à des armes du même type. Avec le fusil et ses chargeurs, le bouclier lourd, le casque lourd, le gilet lourd, prennent place dans le coffre. Le poids de ce matériel nécessite de la force physique et de l’endurance. Les BAC s’entraînent, hors service toutefois, rien n’est prévu dans le cadre de leurs heures de travail, et pourtant leurs aptitudes physiques et psychologiques sont testées tous les 3 ans. Il faut être opérationnel, comme on dit. 

A chaque sortie, un armement complet

C’est ainsi que le véhicule si confortable à bord duquel nous patrouillons est chargé à chaque sortie de tout le matériel qui permet d’apporter « une réponse proportionnée et nécessaire » à chaque situation rencontrée. A leurs ceintures, un Sig-Sauer, l’arme de base de tout policier et une matraque télescopique. Ils embarquent également une gazeuse, des Taser (pistolets à impulsion électrique), des bâtons (tonfa), soit un armement intermédiaire. Puis dans une housse rectangulaire rigide, des grenades lacrymogènes, des grenades de désencerclement, un LBD et ses munitions, et « un lance-patates » - un lanceur Cougar - pour tirer des grenades à distance. Enfin, l’équipement lourd. Dans la voiture, un stop-stick à crevaison lente, pour stopper un véhicule si besoin. 

Comme pour leurs collègues de police-secours, la base, c’est l’observation

Ambiance cosy, donc, en ce moment tranquille de l’après-midi, mais des moyens d’intervention qui placent les policiers BAC à la pointe de l’organisation qui structure les forces du commissariat. Cela dit, leur mission quotidienne est de lutter contre la petite et moyenne délinquance, et comme pour leurs collègues de police-secours, la base, c’est l’observation. Et, comme leurs collègues, ce regard ne les quitte jamais, y compris quand ils font leurs courses en supermarché. Dans le véhicule où ils embarquent une journaliste bavarde, leurs yeux ne font qu’un. Dans une rue peu fréquentée, un homme marche d’un pas tranquille, mais « il a quelque chose dans sa main droite » dit le chauffeur qui s’arrête au niveau du passant. « C’est la police, monsieur. Montrez-moi votre main droite. » La main est vide, les deux policiers passagers descendent du véhicule (ils descendent toujours en même temps), le chauffeur se gare trois mètres plus loin et les rejoint. 

Usage de stupéfiants : amende forfaitaire de 200 euros

L’homme avait lâché son joint quand il s’est aperçu qu’on le regardait. Les BAC mettent leurs brassards police, le chef de groupe procède à une palpation de sécurité, « je le fais toujours, on ne sait pas s’il porte un couteau ou autre, moi, je sécurise ». Le gars a une barrette de cannabis sur lui, il la donne. Il est verbalisé (loi du 23 mars 2019 – amende forfaitaire de 200 euros) et sera convoqué au poste pour prise d’empreintes et de photos, dont se charge le service de la police technique et scientifique. On appelle le poste pour avoir une date de convocation. Monsieur préfère un rendez-vous le matin, on lui donne rendez-vous un matin, début avril. 

Faire corps

Avoir l’œil sur tout et tout le monde, parce que « ce n’est pas la tenue vestimentaire qui fait la personne ». Les équipages se côtoient, ils doivent se connaître, ils font corps car c’est cela qui les protège. Faire corps… l’expression est belle mais raconte aussi les contraintes inhérentes au métier, prenant, exigeant, qu’à l’instar du patron, le commissaire, ils ne quittent jamais complètement, ça n’est pas possible. Faire corps, comme dans un corps de ballet, ou un corps militaire, c’est effacer une part de son individualité au profit du groupe, parce que c’est le collectif qui rend puissant. Tout cela, on le ressent dans le véhicule, alors même que l’ambiance est cool et qu’aucune intervention d’urgence ne vient faire effraction. On ressent la densité de la concentration, la densité d’une conduite parfaitement maîtrisée, la densité de ce qui peut se déployer en une fraction de seconde si les circonstances l’exigent. 

Le véhicule BAC revient au poste. Le chef de groupe formalise l’intervention sur la voie publique et monte les papiers au bureau du commandant de la BSU. L’équipage va repartir, « on a une surveillance à faire ». 

Florence Saint-Arroman

(1) Explication du schéma national d’intervention : http://www.reunion.gouv.fr/IMG/pdf/Schema_national_d_intervention.pdf

Nous avons saisi l’occasion de passer du temps au commissariat avec plaisir et intérêt, nous remercions tous ceux qui nous ont accueillie à la radio, à l’accueil, au GAJ, au poste, ceux qui nous ont embarquée avec eux, ainsi que ceux avec qui nous avons pris un café en salle de pause, ou mangé un sandwich en salle de repos. FSA