Journée Internationale des droits des femmes

Femmes à l'Honneur [Portrait 9] - Laurence Fluttaz

Femmes à l'Honneur [Portrait 9] - Laurence Fluttaz

Chalonnaise, aujourd'hui Vice-présidente au Conseil Régional de Bourgogne-Franche-Comté, ses responsabilités passées au sein de la Fédération du PS de Saône-et-Loire autour de la question des Droits des Femmes lui ont permis de rencontrer et d'échanger avec des personnalités incontournables telles que Yvette Roudy, Benoite Groult, mais aussi Christiane Taubira, Laurence Rossignol et Caroline De Haas.

Orthophoniste de profession, engagée au Parti Socialiste depuis avril 2002, Laurence Fluttaz a, ensuite, été élue conseillère municipale à Chalon sur la liste de Christophe Sirugue et nommée Vice-Présidente en charge de l'Enseignement Supérieur à l'Agglomération du Grand Chalon. Elle est actuellement élue au Conseil Régional de Bourgogne-Franche-Comté en tant que Vice-Présidente en charge de la Culture et du Patrimoine. Elle allie donc à nouveau et ce, depuis le début de l'année 2016, vie personnelle, vie professionnelle et mandat régional. Un vrai défi au quotidien.

Que représente pour vous la journée internationale des droits des femmes ?

Elle permet de faire un état des lieux général de l'avancée, ou pas, des droits des femmes et plus particulièrement de l'égalité Femmes / Hommes. En cette journée du 8 mars, j'aimerais dire encore combien je regrette les regards condescendants lorsque j'évoque « les femmes » et que j'entends « oui mais Laurence, on choisit sur les valeurs de la personne, pas sur son genre... ». Effectivement, et des milliers d'années d'histoire placent les femmes en fin de tableau malgré des « CRITÈRES OBJECTIFS ». Alors zut, je veux voir la parité partout et notre société plus équilibrée pour le bien de tous. La parité comme matrice d'une humanité la plus riche et large possible. Une humanité qui offrirait un avenir meilleur sur une planète qu'il nous faut chérir davantage, ensemble, femmes et hommes.

Depuis ces dernières années, les politiques tentent de prendre à bras le corps ce problème... La mise en place de la parité vous a-t-elle semblé être une bonne mesure ?

Il est plus que nécessaire que l'on légifère, sinon il est évident que l'on n'avancerait pas d'un millimètre. La preuve : là où il n'y a pas d'obligation légale, on est très très loin de la parité, je pense à des exemples concrets...

Pensez-vous que l'image et la place de la femme dans la société française aient évolué ?

C'est certain et heureusement. Mais certains préjugés restent tout de même tenaces, et c'est dès le plus jeune âge qu'il est pertinent de les combattre.

Être une femme a-t-il déjà été pour vous un handicap ? Une force ?

C'est parce que je suis une femme, en plus issue d'une profession paramédicale, installée à mon compte, que « l'on est venu me chercher pour m'engager plus fortement en politique. C'est aussi parce que je suis une femme, que j'ai vu des « règles du jeu » modifiées pour « ne pas me laisser la place » ...

Comment conciliez-vous vie professionnelle et vie personnelle ?

Vie professionnelle / vie politique / vie personnelle : cela reste compliqué. Dans le cadre de mes responsabilités, je suis amenée à rencontrer de nombreux acteurs culturels, à soutenir des manifestations et festivals, et à valoriser un patrimoine abondant et diversifié. Cinéma, musées, art contemporain, musique, danse, cirque, livres, théâtre, arts de la rue… il reste peu de soirées, peu de week-ends, peu de vacances mais c'est un mandat riche et passionnant, très prenant dans une nouvelle grande région Bourgogne-Franche-Comté que je parcours quotidiennement pour soutenir l'engagement fort de valorisation de la culture. Tout allier reste possible seulement avec le soutien et l'aide importants de l'entourage et notamment du conjoint. 

Quelle est la phrase que vous aimeriez ne plus entendre ?

« Les femmes, on n'en trouve pas ! » (quand il s'agit de faire respecter la parité en politique).

Que défendez-vous et que voulez-vous transmettre ?   

Les femmes doivent oser, se lancer, se sentir concernées.

Quelle est, ou quelles sont les femmes qui vous ont le plus influencée ?   

Y. Roudy, L. Rossignol, C. De Haas… Des grandes dames que j'ai eu la chance de côtoyer. Mais plus simplement, je pense à mes grands-mères ! Des femmes qui, pour leur époque, prenaient leur vie en main et étaient tout à fait autonomes, exemplaires !

De nombreuses actrices ont pris la parole ces derniers mois, qu'a suscité chez vous l'affaire Weinstein ?

« Un profond dégoût » de ces pratiques qui perdurent et qui passent les siècles, mais aussi un espoir que, peut-être enfin, une vraie prise de conscience des femmes et des hommes nous fasse avancer vraiment.

Comprenez-vous que certaines femmes n'aient pas voulu s'exprimer sur le sujet, comme certaines victimes qui ne veulent pas porter plainte alors qu'elles subissent des violences conjugales ? 

C'est très compliqué, on sait bien que psychologiquement « la victime » est « sous emprise » et prendre conscience puis franchir le cap de porter plainte, peut être un long processus… Et puis, même si les violences faites aux femmes sont une cause nationale majeure, les démarches concrètes sont encore compliquées et semées d'embûches !

L'actrice Cate Blanchett a été désignée pour présider le jury du Festival de Cannes. De nombreux médias ont commenté cette annonce en mettant en avant qu'elle avait été l'une des premières femmes à s'être élevée contre Weinstein. N'est-ce pas déroutant que l'on puisse penser qu'elle ait été choisie pour cette raison ?

C'est une excellente nouvelle. Ceci participe à réellement « mettre les projecteurs » sur ces faits gravissimes.

Qu'avez-vous pensé du #balancetonporc en France ou #MeToo lancé aux États-Unis ? ... Et d'autres initiatives, comme le mouvement Time's Up (un fonds pour soutenir toutes les victimes de harcèlement sexuel) initié entre autres par Natalie Portman et Jessica Chastain ?

Je pense que toutes ces initiatives permettent surtout de signifier que les actes, les mots, les paroles, les propos, ont un sens et ne sont jamais jamais anodins. Ces initiatives permettent de donner du sens et de mettre de la gravité là où il est nécessaire de le faire.

Chef, cheffe, auteur, auteure, autrice, madame le sénateur, madame la sénatrice... Que pensez-vous de la féminisation de certaines professions ?

C'est essentiel selon moi. Benoîte Groult, une autre personnalité marquante que j'ai également eu la chance de rencontrer, a fait reconnaître la présence des femmes dans la langue française à travers la féminisation des noms de métiers : « Quand il n'y a pas de mots pour nous, c'est que nous n'existons pas » avait-elle déclaré. Encore une fois, pourquoi cherchons-nous « à masquer » la moitié de l'humanité ?

Que pensez-vous des féministes ?

Heureusement que de nombreuses femmes ont mené des combats qui nous ont permis d'acquérir, de conquérir, l'autonomie et la liberté desquelles nous pouvons jouir maintenant ! Non seulement il est plus que nécessaire de rester « vigilantes », mais nous voyons tous les jours qu'il convient de continuer à mener des combats. Le Féminisme est une évidence et porte tous les combats pour l'égalité !

Homme/femme, un message pour un "mieux vivre ensemble" ?

Femmes/Hommes, nous gagnons tous au respect de l'égalité. Les différences sont un apport et un enrichissement : soyons curieux et respectueux les uns des autres bien au-delà du genre.

Propos recueillis par SBR - Photo : Laurence Fluttaz