A lire

Info-chalon.com a lu pour vous "Nu intérieur" de Belinda Cannone

Info-chalon.com a lu pour vous "Nu intérieur" de Belinda Cannone

Auteur de six romans remarqués, dont La chair du temps (2012) et Le don du passeur (2013), Belinda Cannone a publié récemment « Nu intérieur », aux Editions de l’Olivier. Le sentiment d’Info-Chalon.

L’homme, le protagoniste de ce roman [1], plus exactement un récit écrit à la première personne du singulier, est un architecte d’une cinquantaine d’années. Après un infarctus, qui a manqué de le terrasser, la relative insouciance avec laquelle il goûtait une vie heureuse, aux côtés d’une universitaire à l’intelligence « érotique », s’effrite. Comme si, dans le sillage de la crise cardiaque, avait point une autre crise, autrement plus redoutable celle-là : une crise existentielle. Ce type de crise qui, lorsqu’elle survient chez un homme de cet âge, est plus connue sous le nom de « démon de midi », expression qui s’avère aussi biblique [2] que délicate à définir. Une crise qui peut conduire l’être en proie au doute qu’elle frappe à franchir toutes sortes de Rubicon, constituant ainsi autant d’allers simples, sans retours…

Au travers d’un récit particulièrement bien rythmé, mis en valeur par le recours à une langue stimulante, Belinda Cannone projetait-elle de faire ressentir à ses lecteurs les doutes, les espoirs, les tourments qui peuvent s’emparer d’un homme arrivé à mi- parcours de sa vie ? Et si oui, y parvient-elle ? De même qu’il reste plus que délicat pour un homme de se mettre à la place d’une femme, il n’est sans doute rien de moins aisé, lorsqu’on est une femme, de se mettre dans la peau d’un homme. D’où, d’ailleurs, cette incompréhension mutuelle qui semble structurer depuis longtemps les relations entre les sexes. Pourtant, le récit de Belinda Cannone sonne vrai. Particulièrement vrai. Comme si celle-ci avait effectivement réussi le tour de force de faire fi de sa propre personnalité pour adopter le point de vue de son personnage masculin et, ainsi, nous restituer, sans a priori ni jugements moraux, les émotions et pensées de ce dernier. Une prouesse qui donne à celui-ci une certaine épaisseur et permet de rendre visible ce qui ne l’est pas immédiatement : le for intérieur d’un homme ayant succombé à la tentation, pour le meilleur et pour le pire, toute expérience digne de ce nom ne se faisant jamais, comme le disait le comte de Rochester, « qu’à ses propres dépens ».

A lire sans doute, ne serait-ce que par curiosité.

S.P.A.B.

[1 Belinda Cannone, Nu intérieur, Ediions de l’Olivier, 137 p, 15 euros

[2] A en croire d’aucuns, l’expression serait d’abord née d'une erreur de traduction de la Bible de l'hébreu vers le grec par les Septante qui, dans un psaume évoquant les fléaux capables de frapper les hommes en pleine nuit et ceux frappant en plein midi, auraient lu 'shêd' (démon) là où était en réalité écrit 'yâshûd' (qui dévaste).Cette erreur, reportée dans la Vulgate y est devenue "daemonius meridianus", le démon ou diable méridien. A l’origine, donc, cette expression n’avait pas de lien avec le péché de chair, le « désir de changer de compagne ou de compagnon à l’approche de la cinquantaine ou la chute tardive dans la débauche ou dans l’infidélité conjugale après une vie réglée, qu’elle sert de nos jours à désigner. (voir, notamment, http://www.expressio.fr/expressions/le-demon-de-midi.php)