A lire

« Dahlia » sort chez Flammarion ce mercredi : rencontre avec la romancière Delphine Bertholon

« Dahlia » sort chez Flammarion ce mercredi : rencontre avec la romancière Delphine Bertholon

Delphine Bertholon fait partie de ces auteurs dont on veut lire TOUS les romans. On l’a vue sur le plateau de « La Grande librairie » pour « Grâce » paru en 2012. Déjà en 2008, elle avait ensorcelé ses lecteurs avec « Twist » – récit d’une jeune fille enlevée puis séquestrée pendant 10 ans. À l’occasion de la sortie de « Dahlia », chez Flammarion, la romancière prend le temps de répondre aux questions d’Info-chalon.

« Les romans de Delphine Bertholon sont des pépites précieuses », lit-on sous la plume de ses lecteurs. C’est dit. Faut-il détailler ? Autopsier ? Parler de l’extrême sensibilité en même temps que de la profondeur de son écriture ? Être embarqué, happé, bouleversé par ses personnages et leur histoire, totalement, est déjà le signe de la magie d’un univers singulier qui opère. 

Parce qu’Info-chalon la rencontre pour la 1re fois, voici une présentation succincte de l’écrivaine. Delphine Bertholon est auteur adulte et jeunesse et scénariste. Sur le plateau de La Grande librairie, François Busnel saluait son talent à la sortie de Grâce chez JC Lattès, en compagnie, entre autres, de J.-C. Carrière, récemment décédé. Elle va à la rencontre des jeunes lecteurs des collèges et lycées. Enfin, la Bourgogne, Delphine la connait sous son meilleur jour : elle a été plusieurs fois invitée au Salon du livre Livres en vignes, au château du Clos Vougeot.
Son 10e roman, Dahlia (Flammarion), sort ce mercredi 17 mars.

Info-chalon : L’écriture a toujours fait partie de votre vie. Vous avez remporté un concours de poésie à l’âge de 6 ans, dans le quartier lyonnais où vous avez grandi. « Dès cet instant, dites-vous, j’ai écrit sans plus jamais m’arrêter. » À quoi compareriez-vous l’écriture ?

Delphine Bertholon : C’est un plaisir, mais aussi un besoin. C’est vrai, j’écris depuis que je sais écrire ! L’apprentissage de la lecture a été pour moi l’ouverture d’un monde immense et j’ai tellement aimé lire des histoires que j’ai immédiatement eu envie d’en raconter : c’est la partie « plaisir ». Et puis je dis souvent que je suis une « solitaire sociable », ou une « timide bavarde ». Dans la vie réelle, je suis assez réservée dès qu’on touche à mes émotions profondes, j’ai du mal à les exprimer. L’écriture de fiction est sans doute une façon pour moi de communiquer, depuis l’enfance. Sinon, je compare souvent l’écriture à l’artisanat, ou à la cuisine (même si je suis nulle en cuisine !)

Dahlia, votre tout nouveau roman est, lit-on « le dernier volet de ce triptyque consacré à l’exploration de la dualité de l’adolescence, entre mensonges et vie rêvée ? » Dites-nous quelques mots de ces personnages, Lettie et Dahlia et de leur trajectoire, entre ombre et lumière.

Dahlia, c’est d’abord une amitié, entre deux adolescentes que tout semble opposer, dans la France des années 1990. Jusqu’au jour où Dahlia, la brune, confie à Lettie, la blonde, un secret terrible. Cette révélation va mettre le feu aux poudres et déclencher une réaction en chaîne dont personne ne sortira indemne. De nos jours, trente ans plus tard, Lettie est toujours hantée par cette histoire. Sa récente maternité va l’obliger à éclaircir les doutes et les zones d’ombre qui persistent dans cette affaire. Que s’est-il vraiment passé, à l’époque ? Pourquoi ? Et surtout, comment en est-on arrivé là ?

J.-P. Dubois (Goncourt 2019) dit qu’il n’a pas d’imagination, que son entourage lui tient lieu d’inspiration. Où avez-vous puisé l’inspiration de cette histoire ? Fait divers comme dans Twist ? Une rencontre dans la « vraie vie » ? Le cinéma ?

Mon imaginaire se nourrit de choses très variées. Je fais du roman contemporain, donc l’actualité m’inspire évidemment – les faits de société, les faits divers… Mais ça peut aussi être une phrase dans un livre, une séquence dans un film, une conversation entendue au café, une anecdote qu’on me raconte, une scène à laquelle j’assiste… Et bien sûr, dans une moindre mesure, ma propre histoire, mon vécu, ma personnalité. L’inspiration est un patchwork, elle se noue à beaucoup d’endroits, intérieurs et extérieurs – en tout cas pour moi. Pour Dahlia, l’idée est venue des souvenirs de ma propre adolescence et de plusieurs faits divers plus ou moins récents.

Il y a presque autant de façon d’aborder l’écriture que d’écrivains. Vous, Delphine Bertholon, quel auteur êtes-vous ? Angoissée par la page blanche ? Décontractée ?

Je suis un « diesel » ! Il me faut du temps entre chaque roman – une phase de deuil, presque. Du temps pour redémarrer. De fait, après chaque livre, j’ai l’impression angoissante que ce sera le dernier. Mais reviennent tôt ou tard l’envie et le besoin d’écrire, mais pas forcément LA bonne idée. Donc j’écris des bribes, qui me serviront (ou pas) dans le futur. Et puis un beau jour, il y a le miracle : le bon sujet, au bon moment, avec la bonne énergie personnelle. Il y a une part de magie dans tout cela, quelque chose que je ne peux pas expliquer.

Vous écrivez également des romans jeunesse. L’écriture est-elle comparable ou bien guidée par un souci d’instruire ou d’édifier ?

La plupart de mes romans plaisent aux grands ados, j’ai mis en scène de nombreux personnages d’enfants, d’adolescents… Je n’ai donc pas la sensation de travailler vraiment autrement. Celle qui marche la nuit, par exemple, ressemble à bien des égards à mes romans dits « pour adultes », puisqu’on y retrouve mes thèmes habituels : l’adolescence blessée, la solitude, l’enfermement, le secret de famille, le flirt avec le polar… L’efficacité narrative est sans doute plus importante encore avec un jeune public, qui privilégie avant tout l’histoire et peut s’ennuyer plus vite. La principale différence tient peut-être à l’attention accrue que je porte à véhiculer le juste « message », d’un point de vue moral. Mais sans me censurer pour autant, ni faire de « l’éducatif ». Comme avec les adultes, j’intègre des références (littéraires, et artistiques au sens large) dans l’espoir de susciter soit la connivence soit la curiosité du lecteur. Et je pense aussi, bien sûr, à ce que j’aimais quand j’étais gamine, à une époque où l’offre en jeunesse n’était pas aussi fournie qu’aujourd’hui et où on allait rapidement vers des textes de littérature générale : Charles Exbrayat, Henri Troyat, Stephen King, Agatha Christie, Patrick Cauvin sont, pour ne citer qu’eux, des auteurs que j’ai beaucoup lus jeune ado, et qui ont participé à mon désir d’écrire un jour des romans. 

Quelles sont les perles littéraires actuelles que vous aimeriez partager avec les lecteurs d’Info-chalon ?

Moi qui suis d’ordinaire une grosse lectrice, je peine en ce moment pour une raison toute bête : j’ai pris l’habitude, depuis plus de vingt ans, de ne lire qu’au café. J’ai beaucoup de mal à lire chez moi, et la pile augmente de façon dramatique, parce que je continue d’acheter les livres qui me font envie, pour le jour béni où les terrasses rouvriront ! Plus ou moins récemment, j’ai beaucoup aimé Le répondeur, de Luc Blanvillain (chez Quidam), adoré Un livre de martyrs américains de Joyce Carol Oates, l’une mes auteures phares (sorti à l’automne en poche chez Points), et je commence le très prometteur D’après mon adolescence de Caroline Solé (qui vient de paraitre chez Albin Michel), l’un de ces textes à la fois pour la jeunesse et pour les adultes, puisque la romancière y fait dialoguer son « moi » ado et son « moi » adulte à travers ses journaux intimes de l’époque. Très courageux, et très chouette.

Propos recueillis par Nathalie DUNAND
[email protected]

Œuvres de Delphine Bertholon

Romans
2007 : Cabine commune (éd. J.-C. Lattès)
2008 : Twist (éd. J.-C. Lattès)
2010 : L’Effet Larsen (éd. J.-C. Lattès)
2012 : Grâce (éd. J.-C. Lattès)
2013 : Le soleil à mes pieds (éd. J.-C. Lattès)
2015 : Les Corps inutiles (éd. J.-C. Lattès)
2017 : Cœur-naufrage (éd. J.-C. Lattès)
2021 : Dahlia (éd. Flammarion)

Romans Jeunesse
2016 : Ma vie en noir et blanc (éd. Rageot)
2019 : Celle qui marche la nuit (éd. Albin Michel Jeunesse)

Scénarios
2007 : Madame Hollywood (mini-série pour Canal+ de Olivier Abbou)
2012 : Yes, we can (Téléfilm de Olivier Abbou)

En vente chez vos libraires chalonnais :
La Mandragore
3, rue des Tonneliers
Tél. : 03 85 48 74 27

Librairie Develay
1, place Général de Gaulle
Tél. : 03 85 48 28 08