Faits divers
La police récupère une femme sur un pont, pendant la nuit de Noël
Par Florence Saint-Arroman
Publié le 30 Décembre 2021 à 20h59

Ils avaient rassemblé leurs solitudes, en ce soir de veillée de Noël. En entrée, ils ont mangé des escargots. Et puis elle l’a traité de « gros porc ». Il rapporte s’être levé, l’avoir saisie par les cheveux, et avoir pensé, lucide : « Ah ben, le réveillon, il est mort. »
Elle, elle dit qu’un peu plus tard, alors qu’elle était assise sur le canapé, au domicile du prévenu à Sevrey, « il s’est approché de moi et m’a donné des coups derrière la tête ». Elle a juste pensé : faut que je reste calme. Mais n’en pouvant plus, il a chargé la dame dans sa voiture et l’a littéralement jetée sur le pont Jean Richard, à Chalon, en lui criant « Dégage ! ». Elle fait le 17. Au bout du fil, le policier lui demande où elle se trouve. Elle ne sait pas. Ses propos sont décousus et pas moyen de savoir à quel endroit aller la récupérer. Elle raccroche, elle rappelle, de fil en aiguille deux équipages sortent, et, à 00h35, pompiers et policiers la prennent en charge. On est le 25 décembre, c’est Noël.
Il avait une interdiction de contact, fichu Noël
C’est Noël, mais ce n’est pas le petit Jésus. C’est une femme d’un âge, qui vit sous curatelle renforcée, qui prend des traitements médicamenteux, du tabac et pas mal d’alcool. La dame a plusieurs hématomes à l’arrière du crâne. Les policiers ont dû la ramasser sur le bitume. Fichu Noël. La situation entre ce monsieur et cette dame, de même que la scène rapportée par l’un ou par l’autre, n’est pas hyper claire. En revanche, une réalité objective fait office de ligne de partage (et a permis à un parquetier d’orienter ce dossier en comparution immédiate, et au juge des libertés et de la détention de placer monsieur en détention en attendant) : ces deux-là n’avaient pas le droit de se voir. Le prévenu fut condamné en juillet dernier, en CRPC (comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité), a un sursis probatoire de 2 ans, avec l’interdiction de tout contact avec la victime.
En cette fin d’année, un air du dehors se joue à l’audience
L’audience de cette dernière comparution immédiate de l’année 2021 a quelque chose de l’air du temps. On croit voir le reflet du Bronx qui règne dehors dans la précaution du président à demander au prévenu de garder son masque puis, alors qu’il ne comprend pas ce que lui dit l’homme qui est jugé debout (contrairement aux pratiques de tous les autres présidents d’audience) et donc loin du micro, lui ordonner de baisser son masque– alors que le prévenu est dans un espace confiné avec trois hommes d’escorte. Cette volte-face dont chaque face comporte sa propre logique mais qui finit déconnectée des éléments de réalité (il y a trois personnes avec lui, et puis un micro dans lequel parler, mais assis) nous paraît illustrer à merveille ce qu’on vit dehors : on ne sait plus à quel saint se vouer. On ne sait plus quelle logique préside aux décisions qui du coup, forcément, paraissent arbitraires.
« Monsieur, vous ne pensez pas qu’il y a un problème dans votre hygiène de vie ? »
Pour faire vite, voici le topo : 52 ans, né à Chalon, célibataire sans enfants, fut pacsé il y a longtemps, entretient une curieuse relation avec cette femme dont il dit qu’il a « des sentiments » pour elle mais qui manifestement a le sentiment brutal, travaille depuis 18 ans en CDI comme préparateur de commande. Un homme assez seul, qui embauche à 3 heures du matin, qui ne boit pas lorsqu’il travaille mais lorsqu’il rentre chez lui, oui. « Ça l’aide à dormir », a-t-il dit à son avocat. - « Monsieur, vous ne pensez pas qu’il y a un problème dans votre hygiène de vie ? » s’enquiert une juge - Il n’a pas de dettes, et pas de casier judiciaire en dehors de la condamnation de juillet dernier. « Alors, cette interdiction de contact ? » lui demande le président Marchand. Le prévenu est debout, les bras le long du corps, les doigts se touchent, fréquemment, ça lui permet de garder le contact avec lui-même. Il porte une veste bleue un peu longue par-dessus un pull jacquard.
ALORS ?
Bon, et alors, cette interdiction de contact ? Le juge de l’application des peines l’avait convoqué pour lui rappeler ses obligations, averti par on ne sait par qui que madame était passée chez le condamné mi-août. Mais on a comptabilisé 724 appels et SMS entre eux ces derniers mois. ALORS ? « Ça fait deux jours que je suis en prison, du coup, plus d’alcool et plus de contact avec madame. » « Il est ralenti » plaidera maître Marceau.
« Je me suis dit : il me fera pas de mal, sinon il va aller en prison »
Et la victime dans tout ça ? Elle vient à la barre. « Qu’est-ce que vous faites chez lui le soir de Noël ? » La dame, franche comme l’or, explique aux juges. « Eh bien j’étais avec lui malgré que c’était interdit. Je me suis dit : il me fera pas de mal, sinon il va aller en prison. Mais il m’a frappée quand même ! Comme à chaque fois, d’ailleurs. » Le tribunal reproche au prévenu de ne pas avoir été franc, lui, avec les gens qui s’occupent de son suivi judiciaire. « Là, vous avez joué, vous avez perdu. Comment on peut vous faire confiance ? » L’homme a une réponse spontanée : « En juillet, j’étais pas allé au centre pénitentiaire, là, j’ai été deux jours, ça m’a fait très peur. Ça me fait trop peur. »
18 ans qu’il embauche à 3 heures du matin pour 1300 euros par mois
Dans le box, on voit toute l’année juger toutes sortes de gens, mais en matière de prison il y a ceux qui disent s’en ficher, ou qui au moins l’ont intégrée dans l’inéluctable au regard de leurs activités illégales ; il y a ceux qui disent « c’est pas ma place là-bas » ; et puis il y a ceux que ça terrifie, et cet homme, qui travaille depuis bientôt 20 ans au même poste, qui embauche à 3 heures du matin pour 1 300 euros par mois, qui a un casier parce qu’il ne sait pas avoir une relation paisible avec une dame qui ne semble pas trop paisible elle-même, celui-ci, ça le terrifie, vraiment. Mais il va y rester quelques semaine ou mois, parce que violer ses obligations judiciaires et réitérer l’infraction, la justice ne l’admet pas, ne peut pas l’admettre.
« On est censé écouter les décisions de justice, mais on finit bourrée et par terre »
La vice-procureur, madame Saenz-Cobo, clôt les CI-2021, par des réquisitions qui s’adressent d’abord à la victime. « … bêtise, alcoolisme, … , elle n’a pas su se protéger. Madame s’est crue plus maline que tout le monde, et, le 24 décembre, alors que tout le monde faisait la fête, elle appelle la police. C’est normal ! C’est un service public, hein ! Alors que toutes les mesures avaient été prises pour que ça n’arrive pas. On est censé écouter les décisions de justice, mais on se retrouve, pour finir, bourrée et par terre, à dire que la justice ne fait rien pour soi. C’est faux ! » Puis la voix de la magistrate descend d’au moins une octave, et s’occupe du prévenu : « C’est lui qui est coupable. Aujourd’hui, ça me paraît juste, normal et légitime… » qu’il reste en prison. Elle requiert une peine de 9 mois dont 4 seraient assortis d’un sursis probatoire, et la révocation du sursis de juillet, avec maintien en détention. Conclut : « On sera toujours là, la justice, la police, les gendarmes, mais si on veut éviter un vrai drame… la victime doit apprendre à se protéger. »
« Il a besoin d’être aidé, encadré, porté »
L’avocate de la victime est en congé, l’association France Victime a drivée la dame pour qu’elle se constitue partie civile et demande un renvoi sur intérêt civil, maître Marceau le regrette, « ces audiences sont surchargées, et inutiles en l’occurrence pour chiffrer un simple préjudice moral ». Cela dit, l’avocat reprend les choses, calmement : « Ils sont isolés, socialement et sur le plan sentimental. L’interdiction de contact a été mal vécue des deux côtés et les deux ont un problème majeur d’alcool. Je ne peux que comprendre les réquisitions, mais l’enfermement… On peut tenter un sursis probatoire renforcé. C’est quelqu’un qui est diminué, ralenti, il se repose beaucoup sur son CPIP*. Il a besoin d’être aidé, encadré, porté. Sa famille se mobilise. Il faut des soins, et un peu plus qu’au CSAPA-KAIRN où, en raison de leur succès, les soins relèvent plus de l’abattage administratif que d’un vrai suivi. Il faut que la justice soit patiente. Il est inséré mais il a 52 ans : si on le prive de son CDI on le désintègre. »
4 mois incarcéré
Le prévenu a la parole en dernier. La victime lève le doigt mais personne ne la calcule. « Je regrette, dit-il, je regrette et je m’excuse. »
Le tribunal le déclare coupable et le condamne à une peine de 12 mois de prison dont 10 mois sont assortis d’un sursis probatoire renforcé pendant 2 ans, maintien en détention pour la partie ferme. Puis obligation de travailler, de suivre des soins, interdiction de contact avec la victime et de paraître à son domicile, il devra l’indemniser et intégrer le dispositif AIR (accompagnement individuel renforcé). Le tribunal révoque 2 mois du sursis antérieur, ordonne l’incarcération immédiate.
Qu’il ne perde pas son contrat de travail…
L’homme est debout. Droit, muet, le teint devenu rouge, le masque sous la moustache. « Cela veut dire, monsieur, que vous restez en détention pour les 4 mois à exécuter. Il y aura bien sûr la possibilité d’un aménagement de peine, vous verrez avec votre avocat. Il faudra trouver un arrangement avec votre employeur pour suspendre votre contrat de travail. »
Et il faudra trouver quelqu’un pour s’occuper de son chat. Il s’inquiète beaucoup pour lui. En ce qui concerne le réveillon du nouvel an, c’est mort aussi.
Florence Saint-Arroman
* CPIP : conseiller pénitentiaire d’insertion et de probation



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