Chalon sur Saône

La totale avec un Jean-Marie Bigard toujours aussi peu prude...

La totale avec un Jean-Marie Bigard toujours aussi peu prude...

« Ca fait soixante ans que j’attends ce moment-là et ce one-woman-show !», s’est exclamé ce vendredi soir en la salle Marcel-Sembat de Chalon-sur-Saône Jean-Marie Bigard, entré en scène sur la musique de Pretty Woman ! Pas spécialement catalogué d’ordinaire en tant que brute épaisse, mais encore moins comme étant nanti d’une part de féminité supérieure à la virilité qui incombe au sexe dit fort, l’humoriste, transfiguré en nana durant la moitié de son spectacle « Nous les femmes » porté sur les fonts baptismaux en 2015, aura tiré régulièrement à boulets rouges sur la gent masculine. Ne s’épargnant nullement, étant même le premier à recevoir sa volée de bois vert…

Des messieurs qui doivent faire profil bas…

Tout de rouge vêtu dans sa robe seyante, Jean-Marie a incarné une femme de caractère qu’il n’a pas fallu pousser dans ses retranchements pour qu’elle se livre à cœur ouvert. « Je fais peut-être que la première partie, mais les hommes vont s’en souvenir. Ne me demandez pas de faire Le lâcher de salopes à l’envers ! » La maîtresse femme bien portée sur la chose le cas échéant, a eu trois maris. « Le premier a été une erreur de jeunesse. Ca a tenu deux ans. Le deuxième était petit, gros, moche, mais vachement bien ! Franchement, s’il n’avait pas mis ma sœur en cloque, je crois que je serais toujours avec lui. Le troisième, c’était le bon : beau, généreux, attentionné, drôle…et il est mort ce con, en plein mois d’août ! » La sexagénaire a pris à partie qui vous savez : « Je ne suis pas comme l’autre, le gros, j’ai envie de vous parler de tendresse, d’amour, des rapports homme-femme. » Un joli postulat qui a eu tôt fait de partir en vrille. « C’est quoi, les hommes, votre problème avec la sodomie ? Moi, c’est pas mon truc, une fois de temps en temps, mais ma rondelle ne fait pas le printemps ! » Dans son réquisitoire, la nénette aura agité plus souvent qu’à son tour le spectre de la vindicte populaire, par souci de transparence. Et les motifs de dézingage sont tombés dru…Tandis que ces dames passent en moyenne quarante-cinq minutes dans la salle de bains, leurs alter ego membrés, eux, expédient les affaires courantes en cinq petites minutes…avec des conséquences ennuyeuses ! Quant à leur dévorante manie de s’enraciner devant la télé, foot notamment oblige, elle ne fait pas que des heureuses ! « Si les hommes nous tripotaient autant que la télécommande, qu’est-ce qu’on aurait comme orgasmes ! » Du parler vrai…

 

Gardons-nous des apparences trompeuses…

Puis un Jean-Marie Bigard brut de décoffrage au meilleur de sa forme devait ravir la vedette à l’égérie des causes sans doute perdues, nullement freiné par la maladresse et l’indélicatesse qui lui sont reprochées depuis des lustres. « Je l’ai trouvée formidable, la grosse ! », a-t-il résumé vis-à-vis de son « dédoublement de personnalité ». Les « ta gueule », « connard », « bite », « enculé » n’ont pas tardé à fleurir dans sa bouche. Cette absence de finesse, doux euphémisme, marque de fabrique inaltérable du personnage, a en tout cas trouvé du répondant dans la salle, pliée en quatre à chacune de ses saillies verbales, dans un climat symbiotique. Ne s’embarrassant pas de pudibonderie ou de puritanisme, l’humoriste, bête noire des chastes oreilles, sait que son public ne sera pas vaincu par la somnolence ou un quelconque détachement. Oh que non ! La sphère pipi-caca connaît son apogée chez son urologue-proctologue, à l’occasion d’un TR (communément appelé Toucher Rectal N.D.L.R.). La soi-disant puissance masculine ne saurait par ailleurs s’avérer gagnante à tous les coups. « Pour les femmes c’est plus facile d’ouvrir la bouche que de tendre le bras ! ». Et une petite louche de vitriol, une ! Reconnaissons cependant à sa décharge que ses propos parfois peu amènes, voire acerbs, sont également, pour peu que l’on ne se crispe pas sur leur caractère cru, frappés au coin du bon sens. Quand il trifouille, par exemple, dans les contraintes, les inconvénients de la paternité, la période du « non », ainsi que des avantages (toutefois ici de façon ironique), est-il si éloigné que cela de la réalité ? De même à l’évocation de sondages du journal Aujourd’hui en France, ou lors du rappel, de la reconsidération des proverbes, la profondeur de champ apparaît dans toute sa splendeur. Encore faut-il lire entre les lignes…Ultime pirouette avant de tirer sa révérence, cette fois beaucoup plus connectée aux mœurs classiques : « Loin des yeux, peut-être, mais toujours tout près de mon cœur. » N’a-t-il pas laissé en grand seigneur dans la loge de sa moitié féminine bouquet de fleurs, boîte de chocolat, flacon de parfum, etc. ? Serait-il un mauvais bougre, lui qui parraine l’association Les bouchons d’amour qui vient en aide aux personnes handicapées ? La réponse est dans la question…

                                                                                                     Michel Poiriault

                                                                                                     [email protected]