Chalon sur Saône

Franz-Olivier Giesbert aurait dû canaliser à Chalon le foisonnement d'idées émanant de Michel Onfray et d'Eric Zemmour. Mais voilà...

Franz-Olivier Giesbert aurait dû canaliser à Chalon le foisonnement d'idées émanant de Michel Onfray et d'Eric Zemmour. Mais voilà...

A cause d’un nombre trop restreint de personnes ayant pris leur place, le débat Michel Onfray-Eric Zemmour centré sur «Est-ce la fin de notre civilisation ? » fixé au jeudi 25 janvier au Parc des expositions de Chalon-sur-Saône, a été purement et simplement annulé. Peu de temps avant la décision officielle, Franz-Olivier Giesbert, qui devait harmoniser les assertions de par sa qualité d’animateur, accordait une interview à info-chalon.com


 

Vous avez arbitré le match Onfray-Zemmour le 9 juin 2015 à Nice. Quel souvenir en gardez-vous ?

«C’était assez amusant, parce qu’au départ j’étais censé arbitrer, puis peu à peu je suis intervenu dans le débat, et en fait à la fin c’était plutôt un débat à trois. Je me mets volontiers en retrait, mais c’est  un débat qui est parti finalement assez fort, il y avait de nettes divergences entre Zemmour et moi, de nettes divergences entre Zemmour et Onfray, il  y a même eu des divergences entre Onfray et moi, mais ça a toujours été. Sinon on débat beaucoup ensemble même si on n’est pas d’accord, Michel Onfray et moi sommes très amis, je l’adore, j’ai beaucoup d’admiration pour lui. Souvent les gens qui écoutent ces débats sont un peu surpris de voir notre amitié malgré nos désaccords politiques. »

 

Que dire sur ces deux débatteurs ?

«Ils sont très, très différents. Zemmour a une approche vraiment très politique, et la démarche d’Onfray est différente, elle est souvent  politique, mais également très philosophique. Parfois on ne débat pas tous sur les mêmes niveaux, c’est clair. Ce qui est intéressant, c’est la façon de traiter les problèmes. Avec Michel Onfray on passe vite de la philosophie à la politique, un peu de géopolitique, et puis on retourne à la philosophie. C’est toujours bien que dans un débat il y ait un rapport philosophique fort. »

 

N’est-il pas frustrant de donner la parole à des orateurs, et de ne pas s’exprimer sur le sujet ?

« A Nice je me suis beaucoup exprimé, ce n’était pas prévu. Je n’ai aucune gêne par rapport à ça, je suis écrivain, journaliste, je suis très heureux, les romans ça marche bien, et j’apprécie  le côté journalistique et passeur. J’aime bien l’idée aussi que l’on puisse débattre ensemble, même si on dit que dans ce pays on ne peut pas le faire. Je suis très partisan du débat, il n’y en aura jamais assez. »

 

Quelle serait alors votre version sur «Est-ce la fin de notre civilisation ? »

« Là-dessus c’est sûr, je ne serais pas d’accord avec… peut-être les deux d’ailleurs, ce qui n’empêche pas que l’on puisse s’entendre très bien. Je pense objectivement qu’en ce moment notre civilisation est en difficulté, il y a un problème, ce qui ne veut pas dire que c’est la fin de la civilisation, c’est clair. »

 

Journaliste, éditorialiste, biographe, écrivain franco-américain, vous avez été présentateur de télé, vous incarnez la multiplicité des genres. N’est-il pas ardu de répondre présent au plus haut niveau de chacun de ces secteurs ?

« Je m’intéresse à tout, et par exemple, quand vous regardez mes livres, il y a des polars, des livres de philo, j’adore ça. Vous savez, quand on écrit, c’est à chaque fois une victoire sur soi-même ; j’aime bien me remettre en question, changer de genre, réessayer autre chose, parce que c’est vrai que l’idée de faire toujours la même petite soupe, présentée chaque année à la même période, ce n’est pas ma façon de faire. Découvrir, apprendre, je crois que les lecteurs aiment bien la variété et se dire : « Qu’est-ce qu’il va nous faire celui-là ? » Je continuerai à le faire, et franchement, tous les genres marchent, je ne vais pas faire la commande pour vendre des trucs. »

 

Qu’est-ce qui vous tient à coeur dans votre façon d’appréhender les choses, quelles sont vos valeurs intangibles, tous domaines confondus ?

«Il y a quelque chose de fort et d’important, c’est la sincérité. J’écris chaque  livre comme si c’était le dernier, donc je ne calcule pas, je vais au bout de l’histoire. »

 

Quand on est exposé médiatiquement comme vous l’êtes, on a forcément des détracteurs. En définitive, ne vous grandissent-ils pas ?

« Franchement, ils ne m’ont jamais gêné, je dis toujours : « Les chiens aboient, la caravane passe.» Ca ne m’a jamais bien ébranlé. Ca fait du bien, et puis ça vous remet en question. On ne peut pas tout avoir : le beurre, l’argent du beurre, la crémière…c’est normal que des gens  vous contestent, surtout quand vous avez du succès. Je suis content d’avoir du succès, et je ne vais pas pleurnicher. »

 

Vous faites le grand écart entre un roman et un essai, qu’il soit politique, historique, ou dédié à la cause animale. Etes-vous plus à l’aise avec l’imaginaire ou la réalité ? Quel sera votre prochain ouvrage ?

«Les deux. Le prochain sera sur Dieu, et devrait sortir fin du premier semestre 2018, ou au début du second. Mais moi, je le répète, je change de genre régulièrement, j’en ai besoin, c’est vraiment très important. »

Crédit photo : Kahn Renaud

                                                                                              Propos recueillis par Michel Poiriault

                                                                                             [email protected]