Faits divers

TRIBUNAL DE CHALON - Sa femme veut retirer sa plainte... mais il va quand même en prison pour violences

TRIBUNAL DE CHALON -  Sa femme veut retirer sa plainte... mais il va quand même en prison pour violences

A l’issue d’un très court délibéré - à peine quelques minutes ! - le tribunal correctionnel de Chalon a condamné à 1 an de prison avec maintien en détention Amdi, un Chalonnais de 25 ans...

poursuivi, dans le cadre d’une procédure de comparution immédiate, pour violence suivie d’incapacité supérieure à 8 jours par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin, ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité. La présidente Claire Foucault et ses deux assesseurs n’ont, semble-t-il, guère tenu compte de la longue plaidoirie du conseil du prévenu, Me Alain Guignard, qui n’a pas réussi à convaincre le Tribunal de ne pas envoyer son client derrière les barreaux du centre pénitentiaire de Varennes-le-Grand.

Tout a commencé le 4 mars dernier par un appel du service de pédiatrie du centre hospitalier de Chalon, reçu par le commissariat de police de cette même ville, indiquant qu’une jeune femme de 20 ans, admise dans le dit service en compagnie de son fils de 17 mois, craignait que le père de l’enfant ne vienne le lui enlever et qu’elle souhaitait déposer plainte pour des violences commises sur elle la veille par son mari. Au cours d’une dispute, liée à des reproches et à des soi-disant problèmes d’argent, celui-ci l’aurait frappé à plusieurs reprises et ce ne serait pas la seule et unique fois depuis leur union en 2015. Interpellé le 10 mars chez un ami, le mari, en l’occurrence Amdi, a d’abord nié les faits puis, devant l’évidence, n’en a reconnu qu’une partie lors de la confrontation avec son épouse. Admettant lui avoir collé deux gifles. Mais comment alors expliquer les autres blessures constatées par le médecin légiste de l’hôpital, lequel a accordé 10 jours d’ITT à la victime.
Interrogés au cours de l’instruction comment ils voyaient l’avenir du couple, madame a indiqué qu’elle ne resterait pas avec son mari s’il ne changeait pas tandis que monsieur a révélé qu’il ne voulait pas quitter sa femme et qu’il lui pardonnait d’avoir exagéré les violences.


Les rétractations de la victime à la barre...


Appelée à la barre par la présidente Foucault pour donner sa vision des faits, la jeune femme a opéré un revirement à 180°. « Je souhaite  retirer ma plainte. Je ne veux pas qu’il aille en prison. Je ne peux pas vivre sans lui... » a-t-elle confié, au bord des larmes.
« Ce n’est pas banal. Les violences faites aux femmes sont de plus en plus présentes et augmentent tous les jours » a rappelé le substitut Marie Gicquaud. Avant d’estimer « A mon sens, des pressions ont été exercées par sa belle-famille. Elle est bien isolée sur le territoire français - toute sa famille vit en Tunisie-, elle est sous l’emprise financière et psychologique du prévenu. On veut essayer de nous faire croire qu’elle n’a reçu que deux claques. Ses rétractations sont tout à fait naturelles dans ce contexte ». Après avoir noté le courage dont avait fait preuve la victime en se présentant elle-même aux urgences, la représentante du ministère public a ensuite estimé que les faits étaient particulièrement graves. « Lorsque les policiers sont arrivés à l’hôpital ils ont trouvé Madame prostrée et en pleurs sur son fauteuil. Elle présentait deux coquards à l’œil, des hématomes sur tout le corps et une fracture du nez ». Et de poursuivre « Monsieur s’est caché durant cinq jours. Non pas parce qu’il avait honte mais tout simplement parce qu’il avait pris conscience de la gravité des faits ». Des faits pour lesquels la magistrate du parquet a requis notamment 18 mois de prison.


« Défendre l’indéfendable... »


« Dans le contexte actuel dans lequel nous vivons, on a l’impression de défendre l’indéfendable » a fait observer Me Guignard. « C’est indéfendable, parce qu’il doit aller en prison. On veut protéger cette femme malgré elle et éloigner son mari pendant de nombreux mois, sans écouter cette femme ».
Concernant les éventuelles pressions l’avocat chalonnais s’est montré catégorique. « Jamais au grand jamais la belle-famille aurait pris le risque de faire des démarches pour retirer la plainte ». Et à propos de la disparition de son client durant cinq jours d’expliquer « Il avait peur des conséquences des coups portés sur sa femme. Il a paniqué et s’est rendu compte de la gravité de ses actes. C’a été la peur du gendarme, la peur de ne pas avoir le temps d’assurer sa défense ». Désirant démontrer que les violences, contrairement aux affirmations du ministère public, n’étaient pas régulières, Me Alain Guignard a aussi révélé que le prévenu n’avait pas été violent, quand sa jeune épouse lui avait annoncé qu’elle s’était fait mettre un contraceptif sans lui en parler. Le défenseur d’Amdi s’est également évertué à montrer que celui-ci faisait tout pour rendre heureuse la victime. Par exemple en lui payant une formation de trois semaines d’assistante maternelle. Enfin, après avoir fait remarquer que le dossier était « loin, très loin de celui qui se présente au début de l’enquête », Me Guignard a demandé « une sanction qui tienne compte des circonstances, qui tienne compte des volontés de la victime. Il faut non seulement la comprendre mais l’écouter ». En vain...

Gabriel-Henri THEULOT