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Info-Chalon a lu pour vous « Maudites », de Jeannette Bougrab

Info-Chalon a lu pour vous « Maudites », de Jeannette Bougrab

Adèle Pantre, notre féministe de service, a lu pour vous le dernier livre de Jeannette Bougrab, « Maudites », et livre en exclusivité son sentiment sur ce dernier pour les lecteurs d’Info-Chalon.

Plusieurs raisons peuvent conduire à lire le dernier livre de Jeannette Bougrab, professeure de droit public, conseillère d’Etat, ancienne président de la HALDE [1], secrétaire d’Etat de Nicolas Sarkozy et…ultime compagne du directeur de Charlie-Hebdo assassiné le 7 janvier dernier : Stéphane Charbonnier, dit « Charb ». 

On peut tout d’abord le lire parce que l’on souhaite mieux connaître celle qui fut, durant le quinquennat de Nicolas Sarkozy, un personnage public de premier plan. On peut aussi le lire parce que, sachant qu’elle aborde dans celui-ci sa relation avec Charb, on souhaite mieux comprendre comment le dessinateur communiste et cette femme engagée à droite ont pu, malgré tout ce qui les séparait, se rapprocher au point de s’aimer passionnément. 

Pour ma part, je l’ai surtout lu parce que, quoi que l’on puisse penser des engagements politiques de Jeannette Bougrab, celle-ci est une féministe, une vraie. Une femme qui sait de quoi elle parle quand évoque « cette pulsion de l’homme à dominer la femme », avec laquelle elle brûle d’en découdre. 

Ce féminisme qui la caractérise lui a-t-il pour autant permis d’écrire un livre qu’Info-Chalon ne saurait trop vous recommander de lire à votre tour ? Pour être franche, le bouquin de Jeannette Bougrab se lit plutôt bien. Plus exactement, on peine à le lâcher, ceci même quand, racontant ses rencontres et démêlés avec de sombres imbéciles, on est saisi tour à tour de dégoût, de colère, de l’envie de prendre les armes et de faire un carnage. Surtout, il est rare, de nos jours, que l’on dise aussi bien « la malédiction de naître fille », surtout en terre d’Islam. Rien que pour cela, le livre de Jeannette Bougrab mérite d’être lu. 

Ceci étant, il mérite aussi d’être lu pour beaucoup d’autres choses, notamment les développements de Bougrab sur les récentes « révolutions arabes ». Une analyse qui la conduit, non sans raisons, à conclure sinistrement que « s’il y a des sacrifiés sur l’autel de la démocratie, ce sont bien les femmes ». Ceci dans l’indifférence coupable de la France, un pays où « il est plus difficile aujourd’hui d’être féministe (…) qu’au Pakistan », les idées qui présidèrent à la libération des femmes chez nous étant de plus en plus présentées comme rétrogrades ou conservatrices, indument raillées.

 

Ceci posé, ce livre ne plaira pas à tout le monde. Mais, à la limite, ça tombe plutôt bien : Jeannette Bougrab, en distribuant des claques sur presque 250 pages, se contrefiche de plaire. Elle veut réveiller. Elle veut réveiller toutes celles et ceux qui, par lâcheté ou faiblesse, collaborent de fait à « génocide qui porte le nom de ‘’féminicide’ ». Au moins aura-t-elle essayé…

 

Adèle PANTRE

 

[1] Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité

[2] Jeannette Bougrab, Maudites, Albin Michel, avril 2015, 238 p, 18 euros