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Changer de métier : pourquoi, comment ? Les conseils d’un professionnel

Changer de métier : pourquoi, comment ? Les conseils d’un professionnel

Des parcours de reconversion, il en a accompagné plusieurs dizaines ! Bruno Durant est consultant au CIBC de Bourgogne. En clair, il accompagne les personnes dans leur grand saut dans l’inconnu : la reconversion professionnelle.

Dans le cadre de nos articles du samedi, consacrés aux reconversions, nous avons jugé intéressant que les lecteurs d’Info-chalon découvrent l’avis d’un accompagnant professionnel.

Vous travaillez pour le CIBC Bourgogne. Qu’est-ce que cet organisme ?

Bruno Durant : Le Centre interinstitutionnel de bilan de compétences (CIBC) est une association nationale qui existe depuis près de 30 ans, rattachée à un territoire et à plusieurs bassins de vie et d’emploi en Saône et Loire, par des agences dans des villes comme Chalon, Mâcon, Le Creusot et Digoin.

La structure offre des prestations en Ressources Humaines, en accompagnement notamment, via des prestations comme les bilans de compétences, la VAE, le CEP, le conseil aux entreprises et aux particuliers, etc.

Vous êtes consultant RH en bilans de compétences : en quoi consiste précisément votre métier ?

Je suis consultant RH en bilans de compétences et PSOP (bilans de compétences pour personnes handicapées et devant se réorienter, en inaptitude pour la plupart). Mon métier est justement d’accompagner et d’orienter les personnes devant faire le deuil de leur ancien métier et se projeter dans un futur parfois anxiogène.

Comment rencontrez-vous ces personnes : font-elles la démarche de vous solliciter ? Ou sont-elles orientées vers vous ?

L’essentiel des démarches s’opère de deux façons aujourd’hui : soit à l’initiative de la personne, via le compte personnel de formation (CPF) qui monte en puissance désormais, soit à l’initiative d’un prescripteur, par exemple Pôle Emploi, au bénéfice d’un demandeur d’emploi.

D’une manière générale, les personnes sont de plus en plus proactives aujourd’hui : elles prennent les devants, poussent les portes pour chercher de l’information ou un accompagnement.

Quelles sont les raisons qui conduisent vers une reconversion ?

Parce qu’il y a plusieurs vies dans une vie.

Un professionnel du XXIe siècle est amené à changer plusieurs fois d’entreprise et de métier. Évoluer fait donc partie de son ADN. Et surtout, les gens sont en recherche de SENS et ne raisonnent plus uniquement en termes de projet professionnel, mais aussi en projet de vie.

La pandémie du Covid 19 et ses différents périodes d’isolement ont accentué cette réflexion : « J’ai fait le tour de mon métier, je ne m’y épanouis plus ; je m’ennuie ; mon entreprise va mal ; n’est-ce pas l’opportunité pour changer ? » sont les constats principaux qui poussent les personnes vers cette démarche.

« Choisis une activité qui te plaît, et tu n’auras plus jamais à aller travailler de ta vie ! ». C’est un peu le nouveau mantra de notre époque. Et cela, que l’on ait 25 ou 45 ans, voire plus. Les notions d’épanouissement et de réalisation vont devenir de plus en plus prégnantes dans les années à venir.

Se réorienter, c’est s’oxygéner, s’inventer un futur réaliste, et donc se projeter dans l’avenir, plutôt que de continuer à subir et aller à reculons tous les matins au travail.

Comment se passe un bilan de compétences ?

Il s’effectue sur 8 à 10 semaines, à raison d’une séance par semaine, et dure généralement autour de 24 heures. Le premier rendez-vous sert donc à fixer le planning et les modalités d’intervention.

Je recueille des informations essentielles, je cherche à comprendre : j’interroge le contexte personnel qui a amené à cette démarche, le parcours professionnel de la personne, son cursus de formation, les objectifs qu’elle s’est fixée, ses motivations et intérêts profonds. Finalement, les 8 à 10 premières heures sont essentielles pour l’efficience de mon accompagnement. Elles pourraient se traduire par cette question, trop abrupte : « De quel bois es-tu fait ? »

Pour ma part, cela sert aussi à définir le cadre de mon intervention : nos règles du jeu en commun, fondées sur la responsabilité, la transparence et l’honnêteté, ce qu’est – mais aussi ce que n’est pas – le bilan de compétences, mon rôle d’accompagnant dans ce cadre, les pratiques et les outils utilisés.

Un échange où s’installe la confiance et où mon rôle est, aussi, de rassurer.

Quelles sont les étapes-clés de l’accompagnement ?

Une fois cette 1ère rencontre faite, le bilan s’apparente à une démarche sous forme d’entonnoir : nous partons du plus large en travaillant d’abord sur votre personnalité, vos motivations principales et secondaires, la façon que vous avez de mobiliser vos savoirs-être, (capacité d’influence, de décision, efficacité, agilité intellectuelle, coopération,…), bref votre portrait opérationnel, précis et circonstancié, qui permet souvent de mettre des mots sur des maux.

L’étape suivante s’intéresse à l’orientation concrète du métier/secteur sur lesquels vous cherchez à vous positionner : travailler sur votre employabilité, créer un CV attractif, travailler sur la lettre de motivation, observer le marché de l’emploi.

Enfin, nous finissons sur la partie fine de l’entonnoir : la validation de votre projet, couplé à votre plan d’action (démarches à envisager, formations nécessaires, budget à mobiliser,…) pour aboutir sur un document de synthèse qui reprend l’ensemble de ces données.

C’est pourquoi je dis souvent que le bilan de compétences est co-construction active avec la personne concernée. C’est la recherche et la concrétisation d’une ou de plusieurs hypothèses crédibles de réorientations, couplée avec un plan d’action individuel.

Quelle est la clé de la réussite d’une reconversion ou, en d’autres termes, quand estimez-vous qu’une personne est « prête » pour se reconvertir ?

Mon travail consiste d’abord à m’assurer que la personne en face de moi arrive à faire le « deuil » de son ancienne entreprise et de son ancien métier, qu’elle est prête à avancer : cela ne va pas de soi, mais c’est une étape indispensable pour lui permettre ensuite d’aller de l’avant et de se projeter.

Les entreprises ne chercheront plus forcément des compétences, mais recruteront demain surtout des profils, des comportements : parce qu’une « compétence » s’use vite, et devient rapidement obsolète dans notre monde technologique 4.0. ; parce que la clé de la réussite d’un bilan, ce sont les savoirs-être : une énergie, une ouverture d’esprit, une soif d’apprendre et une motivation à se former. Il faut accepter de prendre un risque à changer, lutter contre ses peurs et ses limites.

C’est à ce genre d’indices que l’on sait que la personne est prête pour sa reconversion.

Selon vous, tout le monde peut-il réussir à se reconvertir ?

Absolument. C’est une démarche ouverte à toutes et tous, facilement réalisable et finançable. Il n’existe aucune barrière à votre reconversion, si ce n’est vous-même ! Et je peux vous apprendre à ne plus être votre propre ennemi. Je dis parfois : Dans cet accompagnement, je suis l’arrangeur, vous êtes le compositeur.

 Propos recueillis par Nathalie DUNAND
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Samedi prochain : Chargée de mission dans une grande ville, elle devient floricultrice à Bresse-sur-Grosne.