Chalon sur Saône

HOPITAL DE CHALON - Plus de 400 opérations chirurgicales reportées... et ce n'est pas fini !

HOPITAL DE CHALON - Plus de 400 opérations chirurgicales reportées... et ce n'est pas fini !

La sonnette d'alarme est tirée à l'hôpital de Chalon-sur-Saône, deuxième hôpital de Bourgogne, avec des menaces graves sur le bloc opératoire et ses 9 salles mais aussi la maternité.

Les professionnels de santé de l'hôpital William Morey sont montés au créneau ce jeudi auprès de la presse chalonnaise, afin de dénoncer une situation de crise sans précédents, et dont les conséquences risquent d'être désastreuses à très court terme. 

"Une situation qui n'a rien à voir avec la COVID ni avec la vaccination ou pas des soignants". 

Parce que tout le monde n'a que ça à la bouche, il était opportun de lever toute ambiguité. La situation de l'hôpital de Chalon sur Saône peut se retrouver de manière quasi analogue sur bien d'autres hôpitaux publics. Une situation qui n'a strictement rien à voir à la crise sanitaire de ces derniers mois ou à la problématique de vaccination mais bien la résultante d'une situation structurelle en terme de personnels. 

Les anesthésistes au coeur du problème

Manque d'anticipation de la part de la direction ? Problème de ressources humaines ? Problème de désertification médicale ? Toutes les pistes sont possibles pour expliquer la situation sauf que l'appel à des médecins anesthésistes remplaçants rémunérés très fortement est désormais rendu caduc par le changement législatif. Le plafonnement d'intérim médical des rémunérations dans le public des médecins anesthésiste-réanimateur à compter du 11 octobre risque de provoquer une déperdition complète dans les effectifs. Le système qui perdurait depuis six ans vient d'être mis à bout par le gouvernement. Il permettait malgré le coût de fonctionnement de faire face au sucroît d'activité chirurgicale. La denrée rare que sont devenus les médecins-anesthésiste-réanimateurs est au coeur d'une très vive inquiétude, déplorent les chefs de service Nicolas Koutlidis ou Thierry Miras, chirugien gynécologique.

A compter de la semaine prochaine, deux salles sur les 9 fonctionneront

C'est un vrai crève-coeur que constate amèrement Alain Challot, délégué CGT du personnel, qui souligne toutes les démarches d'alerte menées auprès de la direction. Des démarches à l'origine d'un conseil de surveillance extraordinaire de l'hôpital qui s'est tenu le 15 septembre dernier, "sans qu'aucune réponse ne soit donnée. Franchement on navigue à vue, et les inquiétudes sont légitimes. La preuve en est avec déjà une déprogrammation de 40 % de l'activité de la chirurgie chalonnaise". "Les délais de reprogrammation seront variables selon la spécialité et la pathologie du patient" précise également Rachid Digoy, Président du Collectif inter-bloc, "on va devoir trier des patients. Ce n'est pas l'image qu'on veut de l'hôpital public et pourtant la réalité s'impose". 

L'hôpital de Chalon sur Saône fonctionne avec l'équivalent de 4,5 médecins anesthésistes-réanimateurs, "alors que les besoins sont de 15 pour une activité normale" pointe Rachid Digoy. "On a un bloc très attractif, de jeunes chirurgiens très motivés, un plateau technique de qualité mais aucune embauche d'anethésiste n'a été réalisée..."

Alors que l'hôpital William Morey réalise 1000 interventions chirurgicales par mois en temps normal, ce sont finalement plus que deux salles sur les 9 disponibles qui seront ouvertes avec "12 patients/jours et 5 jours par semaine !". C'est dire l'ampleur de l'hémorragie en terme d'activité chirurgicale et d'impact sanitaire sur les patients mais aussi sur toute la filière qui vit autour de l'activité chirurgicale et post-chirurgicale. 

Des pistes pour résoudre la crise autour des anesthésistes ? 

Au cours du conseil de surveillance extraordinaire, la direction a évoqué l'idée d'une passerelle avec l'hôpital privé Sainte-Marie et un partage des patients. Une situation qui ne répond en aucun cas à la problématique majeure dénonce les professionnels de santé. La petite lueur pourrait venir du CHU de Dijon lance Nicolas Koutlidis, chef de service du bloc opératoire chalonnais, "je ne vous cache pas qu'on va connaitre quelques mois compliqués mais j'ai bon espoir que la réponse vienne du CHU de Dijon avec une mise en commun des capacités interventionnelles. Il n'est pas possible qu'on laisse l'hôpital de Chalon sur Saône, deuxième hôpital de Bourgogne dans une situation qui verrait la fermeture de certains services. Aucun hôpital n'est en capacité d'absorber le volume traité par Chalon sur Saône. On travaille aussi à développer des activités chirurgicales sans anesthésie mais ce sont des actes à la marge".

Un impact sur la chirurgie mais aussi sur la maternité s'inquiètent Christelle Prat et Thierry Miras, chef de service chirurgien gynécologique. Le manque de médecin-anesthésiste en maternité pourrait avoir de très facheuses conséquences sur le fonctionnement du service, alors que la maternité chalonnaise est là aussi la 2e de Bourgogne avec 2000 naissances annuelles. 

Une situation paradoxale pour Alain Challot, "alors que toute la politique de l'hôpital public est tournée vers des dotations financières en fonction des actes réalisés, et on nous donne pas les moyens de les réaliser, puisqu'on se retrouve dans l'obligation de les reporter". "Pour le moment, on bénéficie toujours du plan d'amortissement COVID mais demain ?". 

Du côté des professionnels de santé, il y a urgence à agir et ils attendent des réponses fermes côté autorités de santé, à moins que la réponse vienne du terrain, comme bien souvent. 

Laurent Guillaumé