Saône et Loire

En Saône et Loire, répondre à la désertification médicale "en dégageant du temps médical"

En Saône et Loire, répondre à la désertification médicale "en dégageant du temps médical"

Pierre Pribile, Directeur de l'Agence Régionale de Santé Bourgogne-Franche Comté était l'invité ce samedi de la députée Cécile Untermaier dans le cadre d'un Conseil Citoyen.

Pas souvent que le Directeur Régional de l'ARS vient sur le Chalonnais, d'autant plus avec la tension qui anime l'hôpital de Chalon sur Saône, hôpital pivot de tout le Nord Saône et Loire. Alors lorsqu'il est invité par la députée Cécile Untermaier à intervenir sur la problématique de la désertification médicale, il était bien évidemment opportun de tendre l'oreille. Rassurez-vous tout de suite... ! Si vous espérez une intervention sur l'hôpital de Chalon sur Saône, vous pouvez passer votre chemin ! (mais info-chalon.com reviendra sur le sujet plus tard).

L'hémorragie du nombre de médecins généralistes fait l'unanimité

Cécile Untermaier avait convié des élus des communes de la Bresse Bourguignonne sur la question qui anime un grand nombre de bassins de vie, et pas seulement en Saône et Loire. Même si la députée de la Bresse a salué l'initiative portée par le Conseil départemental de Saône et Loire dans le cadre de ses centres de santé, Cécile Untermaier a martelé son attachement au côté libéral de la profession. Vieillissement accéléré des médecins, nombre de médecins de moins de 70 ans en baisse continue depuis 2016 ou encore évocation du numérus clausus remplacé par le numerus abertus qui vise à donner un nombre minimum d'étudiants, en fonction de la capacité de l'université. 

"Il faut 10 ans pour former un médecin"

Pierre Pribile, patron régional de l'ARS a axé toute sa dialectique sur le temps, celui qui est nécessaire à former un médecin, et celui qui nous sépare avec l'arrivée de nouveaux médecins formés. Un paradoxe, lorsque le docteur Benoît Dassonville, de Tournus est venu rappeler sans que personne ne réagisse que les signaux d'alerte avaient été activés, il y a plus de 20 ans. Car c'est bien là le souci principal, l'incapacité étatique à anticiper un mal qui allait tôt ou tard frapper à notre porte. Entre la fin des années 80 et l'explosion du nombre de généralistes au point que l'assurance maladie se proposait de racheter des diplômes et la fin des années 90 où déjà s'annonçait la situation dans laquelle nous plongeons, le temps politique est finalement toujours à rebourd du temps du citoyen. 

La seule piste évoquée.... celle du dégagement de temps médical

Benoit Dassonville et Pierre Pribile ont fait preuve d'unanimité lorsqu'il s'agit d'évoquer les pistes pour répondre aux nécessités du moment, "la solution réside dans le fait que le médecin doit faire ce pour quoi il est formé, soigner. Il faut supprimer toutes les tâches énergivores et qui ne correspondent pas à celles du soin". Soigner rien que soigner, prescrire rien que prescrire ? C'est en substance la stratégie portée par l'ARS face à la désertification médicale, "alors qu'il ne faut pas espérer une amélioration avant 2026" lance Pierre Pribile. Vous êtes prévenus !

Des délais de plus en plus long et une inéquité territoriale 

Les élus de la Bresse Bourguignonne ont marqué leurs désespérances face à la situation sanitaire de leurs bassins de vie. Béatrice LACROIX MFOUARA, maire de Cuisery est venue pétition à la main, dénonçant la situation catastrophique dans laquelle se trouvait son bassin de vie, sans que l'ARS, organisateurs des soins, n'eut été en capacité d'apporter une quelconque réponse. Jocelyne EUVRARD, maire de Frangy en Bresse, a demandé à Pierre Pribile de faire en sorte que tous les dispositifs financiers et fiscaux sont clairement établis afin d'inciter à l'installation dans les territoires ruraux. Trop de dispositifs demeurent méconnus par les professionnels de santé en l'état actuel des choses. 

11 jours pour obtenir un rendez-vous avec un généraliste, 93 jours pour un gynécologue et 189 jours pour un ophtalmologue, c'est dire l'ampleur de la situation sanitaire dans laquelle plonge les Français. 

La Bresse Bourguignonne, bientôt reconnue zone d'intervention prioritaire

Pierre Pribile a laissé entendre à Cécile Untermier que le prochain zonage de l'ARS en Bourgogne-Franche Comté devrait inclure la Bresse Bourguignonne dans le prochain zone d'intervention prioritaire. 

Le coup de gueule contre l'obligation de médecin traitant

Benoit Dassonville a dénoncé la différence de traitement en terme de remboursement pour les patients disposant d'un médecin traitant ou pas (remboursement qui passe de 70 à 30 %). Un non-sens pour Cécile Untermaier qui demande au gouvernement et à l'assurance-maladie de revenir sur cette disposition, d'autant plus que le nombre de Français ne disposant plus de médecin traitant ne fait que grossir. Renouvellement des ordonnances, déploiement des infirmières spécialisées ont été autant de sujets abordés de limiter à tout prix le recours au médecin et de faire en sorte que les dispositifs médicaux reposent davantage sur la communauté au sens large et pas exclusivement sur le médecin généraliste. Pierre Pribile a rappelé "l'importance de s'appuyer sur tous les professionnels de santé" considérant "qu'une sage-femme est capable de faire un suivi gynécologique. Elle est formée pour ça. Chacun à son rôle à jouer". 

Le centre 15 pour les urgences .. mais pas seulement

Pierre Pribile, interpellé par des élus, sur la complexité à gérer lorsqu'il y a des décès et des personnes à prendre en charge en zone rurale, a souligné que le 15 "était en capacité de répondre à vos sollicitations et pas exclusivement les urgences. Il y a la possibilité de télé-consultation". 

Des échanges qui ont permis de dresser une situation catastrophique en terme de dotation médicale sur cette partie de la Saône et Loire, malgré tous les efforts entrepris par le département de Saône et Loire histoire de compenser la faiblesse étatique sur ce dossier. En dehors de repousser les départs à la retraite des plus jeunes généralistes et de dire qu'il "faut tenir", les prochaines années s'annoncent bien compliquées sur le plan de la santé. 

Laurent Guillaumé