Saône et Loire

Le loup en Saône et Loire... "ça suffit, il va falloir arrêter les conneries...!"

Le loup en Saône et Loire... "ça suffit, il va falloir arrêter les conneries...!"

Jean-Paul Celet, le préfet référent sur le plan national d'action sur le loup, était aux côtés du Préfet de Saône et Loire ce jeudi soir à Chalon. Et face aux professionnels et parlementaires, le ton est monté.

A la veille d'une grande réunion nationale, réunissant une soixantaine de préfets sur la question du loup, Yves Séguy, a souhaité réunir tous les acteurs du dossier loup en Saône et Loire. Avec un niveau de prédation inégalé sur le territoire départemental, l'exaspération des éleveurs a atteint son paroxysme. 

Représentants de la FDSEA, de la Coordination Rurale ou de la Chambre d'Agriculture de Saône et Loire, n'ont pas mâché leurs mots à l'adresse des services de l'Etat. Mais  ce sont Jérémy Decerle, député Européen et ancien Président des jeunes agriculteurs et le député Rémy Rebeyrotte qui auront été les plus véhéments face à une situation qu'ils jugent "incompréhensible et inadmissible". 

Face au droit administratif de tuer ou ne pas tuer le loup, "ça suffit, faut arrêter les conneries" pour Jérémy Decerle.

"je vous aime bien, j'aime bien ces réunions mais à un moment, faut avancer et apporter de vraies solutions au lieu de tourner en rond. J'ai l'impression de toujours faire la même réunion. Il faut tuer le loup, ni plus ni moins" a enfoncé le clou, Rémy Rebeyrotte, lui aussi remonté face aux inerties sur ce dossier. "Ca devient inadmissible et inexplicable auprès des éleveurs".

Le loup localisé sur une zone de 40 X 20 kilomètres

Les agents de l'OFB sont unanimes. Le(s) loup(s), parce que l'éventualité de la présence de deux loups semble de plus en plus possible, semblent avoir été localisés sur un secteur précis, entre Villeneuve en Montagne et Morey. Une zone pour autant particulièrement vaste qui s'étend sur 40 kilomètres par 20, jusqu'à la limite de la Côte d'Or. L'OFB a dressé une cartographie exacte même si les contours restent encore à affiner. 

"On a un loup qui a fait l'ENA" ironise Rémy Rebeyrotte alors que Jérémy Decerle s'interroge "sur la volonté réelle de le tuer". Des propos battus aussitôt en brêche par les services de l'Etat, qui dénoncent les rumeurs qui circulent. "Oui, le loup a été aperçu 4 ou 5 par les louvetiers, sans qu'on soit en position de tir". 

Le ton est monté, un peu plus haut, lorsque Jérémy Decerle, a pointé les inerties administratives entre un loup qui attaque, qui observe, et le droit ou pas d'intervenir en fonction d'une parcelle déjà attaquée ou pas. Des situations administratives qui ont profondément agacé l'élu européen, " à un moment, il faut arrêter de se poser des questions et le tuer. Peu importe les moyens et les conditions. On est le 2e département le plus touché en France". 

Pour la DDT,  "tous les agriculteurs ne jouent pas le jeu"

Les propos de la DDT ont suscité l'agacement de Benoît Regnault, au titre de la FDSEA. "On a une douzaine d'agriculteurs qui ne jouent pas le jeu et ne mettent pas en place les filets anti-loup" a lancé Jean-Pierre Goron, Directeur de la DDT 71. Des propos qui ont fait bondir les élus de la FDSEA et de la Chambre d'agriculture de Saône et Loire, "vous poussez à la radicalisation de certains mais ils ne sont qu'une minorité. Vous ne pouvez en faire une généralité. Vous devez comprendre que c'est l'équivalent de 3 ou 4 exploitations ces prédations. Est ce que la Saône et Loire peut supporter la disparition de 4 exploitations par an ? La cohabitation avec le loup est impossible dans nos territoires d'élevage, il faut le dire clairement et l'affirmer. On ne peut pas jouer sur les mots. On ne pourra pas continuer sur ce niveau de prédation". Une manière de rappeler aux services de l'Etat leurs responsabilités dans le dossier loup. "C'est simple, nous ne pouvons plus faire de réunion en présence des services de l'Etat, sinon ça prend tout de suite des proportions incontrôlables. C'est nous qui prenons pour vous". 

Pour Jean-Michel Desmard, conseiller départemental de Saône et Loire, "on s'interroge quand même si on a envie de l'éradiquer ou pas ce loup. Il faut bien comprendre que les éleveurs n'en peuvent plus" alors que Marie Mercier a demandé des compléments sur les prises en charge des "victimes indirectes" des attaques de loups.

Le Préfet Celet, référent national, annonce la mobilisation à 100% de la Brigade mobile d'intervention de l'OFB

Face à une situation compliquée, le référent national du loup, a demandé du temps. "On a la bonne stratégie. Elle va fonctionner. Il faut juste un peu plus de temps" a lancé Jean-Paul Celet, qui s'appuie sur des situations analogues, comme celle d'une louve, abattue dans le Lot, qui avait fait un carnage dans les élevages pendant près de 18 mois. Les prises en charge d'indemnisation par l'Etat seront à pied d'oeuvre. Une manière d'essayer de temporiser, tombée quelque peu à l'eau.

Le Préfet siffle la fin de la récréation et la mobilisation générale

Sensible au sujet, le Préfet de Saône et Loire a bien pris la mesure d'une situation qui pourrait prendre des proportions incontrolables, si d'aventure les agriculteurs devaient prendre les choses en main, sans passer par la tutelle de l'Etat. Engagement a été pris d'acter une action d'ampleur face aux prédations du loup. Pour rappel, la première fois que le loup a opéré en Saône et Loire, c'était en 2019, et depuis malgré trois loups abattus, chaque année, les prédations augmentent. Pire, les prédations concernent toutes les espèces puisque dernièrement, il s'est attaqué à des juments. L'une d'elles a été euthanasiée dont la valeur avoisine les 60 000 euros, avec l'impact sur la filière d'élevage et de pension en Saône et Loire. Au total, ce sont 298 "victimes" imputées au loup en Saône et Loire depuis le début de l'année et 200 constats réalisés par les agents de l'OFB. 

Le Préfet a fixé l'élaboration d'une action majeure dont les contours devraient être connus semaine prochaine. L'idée étant d'isoler les troupeaux, de se servir d'un certain nombre comme des appâts et de mettre en protection les autres. Une action qui ne pourra se faire qu'avec la pleine et entière participation de tous les acteurs. De toute évidence, les jours sont comptés pour le prédateur... 

Laurent Guillaumé