Bourgogne

Charnier de renards dans le Jura : la justice condamne le louvetier à 10 000 € d’indemnités

Charnier de renards dans le Jura : la justice condamne le louvetier à 10 000 € d’indemnités

En mars 2024, plus d’une vingtaine de cadavres de renards étaient découverts en bord de rivière sur la commune de Fort-du-Plasne. Un louvetier a reconnu les faits.

C’était le 10 mars 2024 : un pêcheur découvre un charnier pestilentiel au bord de la Lemme : un amas de cadavres de renards, dont certains en décomposition avancée. « Mais qui a fait ça ? » : la diffusion devient massive sur les réseaux sociaux, relayée par les médias. Quelques jours après, un lieutenant de louveterie reconnaît en être l’auteur.

Sa mission : tuer des renards

La louveterie est un « corps de bénévoles chasseurs, qui œuvre pour le service public dans le cadre de missions spécifiques », dont la régulation ou la destruction d’animaux jugés indésirables. Les louvetiers sont nommés par le préfet pour un mandat de cinq ans renouvelables.

Missionné par la mairie de Fort-du-Plasne (Haut-Jura) pour « prélever » des renards entre janvier et mars, le lieutenant de louveterie n’avait cependant pas le droit de jeter leurs cadavres en pleine nature, qui plus est entassés au même endroit et en bord de rivière. Un comportement qui heurte le bon sens : créer un charnier dans le secteur protégé d’un parc naturel labellisé Natura 2000, près d’un réservoir biologique !

L’homme n’est donc pas mis en cause pour un massacre, mais pour une grave entorse au règlement : les carcasses doivent être déposées dans des poubelles dédiées afin d’éviter les risques sanitaires qui vont de la pollution à la propagation de maladies.

Le préjudice écologique n’a pas été retenu, reste la conduite irresponsable du louvetier.

Sanctionné, mais pas démis de ses fonctions

Jugé jeudi 23 mai par le tribunal judiciaire de Besançon, il a été condamné à payer 500 € d’amende à l’État et 10 000 € d’indemnités à l’ensemble des associations de protection de l’environnement qui ont porté plainte.

Elles étaient au nombre de dix : le PGP (Pôle des grands prédateurs), JNE (Jura Nature Environnement), l’ASPAS, One Voice, Robin des Bois, le Centre Athénas, l’association Stéphane Lamart, l’AAPPMA (Association agréée de pêche et de protection des milieux aquatiques), le CPE (Comité de protection de l’environnement) et la Fédération de pêche.

Mickael Paul, administrateur au sein de l’association PGP, était présent ce jour-là : « L’homme m’a semblé tranquille, il ne s’attendait manifestement pas à cette sanction. C’est cela qui est choquant : l’absence d’esprit de responsabilité. Et ne soyons pas dupes, partout en France, ça peut se réitérer en toute légalité si le règlement des louvetiers est respecté. Cette image choquante a le mérite d’éveiller les consciences : voilà ce qui est réalisé, mais ce n’était pas destiné à être au vu de tous… C’est bien une mentalité qui est en question : certains humains pensent régner en maîtres absolus sur la planète, jusqu’à éradiquer tout ce qui gêne peu ou prou l’activité humaine sous couvert d’intérêt général. C’est le danger de l’anthropocentrisme ! L’intérêt général, c’est de dépasser notre seule condition et inclure tout ce qui fait ce monde. Sans réflexion sur d’autres méthodes non léthales qui nous inciteraient à une cohabitation apaisée avec le Vivant, les destructions de renards pourront reprendre sans gêne. Ce qui voudrait dire que nous ne sommes pas allés au bout de nos combats. »

Selon One Voice, cette condamnation est « une sanction faible, mais qui a le mérite d’exister et qui envoie un message clair à tous ceux qui considèrent la nature comme une poubelle et les animaux comme des déchets ».

Photo DR

Merci à Mickael Paul, membre de Pôle Grands Prédateurs (PGP), pour ses informations.

Par Nathalie DUNAND

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