Saône et Loire

Louhans : Un pistolet automatique, chargeur plein, sous son lit

Louhans : Un pistolet automatique, chargeur plein, sous son lit

25 ans tout juste, une condamnation au casier et un tel cumul d’infractions cette année que le parquet a décidé de joindre deux procédures et d’envoyer le prévenu en comparution immédiate. Il est jugé ce 10 mai pour détention et transport de stupéfiants et détention d’armes et de munitions.

 « J’ai pas de problème, dehors » soutient le jeune homme. Alors comment expliquer qu’à chaque perquisition, les gendarmes tombent sur une arme et des munitions. Pas les mêmes : on a un pistolet d’alarme avec ses munitions, et une arme de poing, un pistolet automatique, au chargeur plein, et un seau de munitions d’autre calibre.

Des pochons, de poids variables

En outre, contrôlé positif au cannabis le 24 août dernier à Louhans où il vit, il trimballait un couteau à longue lame dans son scooter, et chez lui on trouve le pistolet d’alarme, des pochons (11) de cannabis. Il reçoit une convocation pour être jugé en comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité mais voilà pas que le 30 avril, il est contrôlé de nouveau. Il est au volant, il téléphone, il est positif au cannabis et il en transporte. Chez lui, comme en août dernier, un pain de cannabis d’un peu plus de 50 grammes, 23 sachets vides, de conditionnement, et un pistolet, caché sous le lit, « rangé » dit le prévenu. Chargeur plein.

Petit débat sur la question de  « la vérité » - grande question

La drogue : c’est pour sa conso perso.
L’arme de poing : il l’a trouvée dans un seau vers des poubelles.
Est-ce qu’il ne tremperait dans la revente de stupéfiants ? Dans un petit trafic ? Non, non, pas du tout, maintient le prévenu tout au long de l’audience, en dépit des approches soupçonneuses des juges et du procureur. « Le parquet ne le poursuit pas pour ça ! » plaidera maître Chebbah (barreau de Lyon).

« J’ai un peu du mal à écrire, donc, voilà »

Pas d’enfants, une copine, pas de diplômes, des missions intérim, une pension pour adultes handicapés (très gravement brûlé l’année de ses 12 ans : il a voulu « faire un tour de magie », « j’avais mis de l’alcool à brûler dans une sous tasse », c’est parti en catastrophe). « Maman me donne un coup de main pour les papiers, j’ai un peu du mal à écrire, donc, voilà. »
Condamné en février dernier pour « vol, dégradation, destruction », il est aujourd’hui incarcéré pour la première fois. « La détention, c’est pas facile, j’ai compris que la liberté a un prix. »

« Ça interpelle », « votre positionnement », être « irréprochable »

Un auditeur de justice, magistrat en formation, conduit l’audience. Une juge qui se tient à côté de lui intervient : « C’est le sens que vous donnez à la loi qui interpelle. » Puis : « On attend de vous un comportement irréprochable. » La réponse du prévenu montre une fois de plus qu’il a du mal, et à comprendre, et à s’exprimer, surtout devant un tribunal. La juge en trois phrases recourt quatre fois au mot « positionnement ». Mot qui peut rester abstrait à quelqu’un qui n’est pas à l’aise avec l’expression, et mot un peu vidé de sa substance comme tous ceux qu'on sort automatiquement (c'est vrai partout, pas seulement au tribunal) pour fermer l'espace de parole. Disons que c'est un mot-jalon.

La peine requise reste aménageable sous réserve que le condamné se bouge 

Le procureur estime que le prévenu revend, même si cela ne lui est pas reproché. Mais le prévenu est bien jeune, nettement défavorisé également, le procureur requiert une peine conséquente de 24 mois dont 12 mois seraient assortis d’un sursis probatoire. La partie ferme reste aménageable : les soins en prison, c’est encore moins ça qu’à l’extérieur. Et puis on ne le juge pas pour trafic.
Maître Chebbah veut que le tribunal s’en tienne à la prévention et que son client puisse « être bientôt remis en liberté ».

La mère du prévenu prend un vent

Le tribunal revient après avoir délibéré. La présidente demande que les agents de l’administration pénitentiaire « fassent remonter monsieur » dans le box. La mère du jeune homme intervient : « Il est épileptique, il n’était pas bien tout à l’heure. » Parole de mère. La présidente pourrait tout de même lui répondre, fut-ce qu’elle n’est pas autorisée à prendre la parole. Au lieu de ça, la juge se détourne ostensiblement du public, glisse quelques mots à l’auditeur. 
Chaque juge travaille aussi avec ce qu’il est, forcément, mais ce que cette attitude renforce, chez des gens qui sont visiblement d’une couche sociale (puisque la société fonctionne ainsi) dite défavorisée, c’est le sentiment d’injustice, et ça, ce n’est ni bon, ni utile. Et si la presse spécialisée doit assister aux audiences sans faire la moindre restitution de ce qui s’y passe, autant supprimer la presse et envoyer des communiqués aux journaux. Untel, tel âge, jugé pour tels faits, a été condamné à telle peine.

18 mois en prison puis 2 ans sous main de justice

Le prévenu est déclaré coupable et condamné à la peine de 30 mois de prison dont 15 mois sont assortis d’un sursis probatoire pendant 2 ans, avec obligations de travailler, de suivre des soins et de payer le droit fixe de procédure (majoré, le tribunal ne le précise pas, pour les conduites sous l’effet des produits stupéfiants). Le tribunal révoque en outre les 3 mois de sursis prononcés en février dernier.
ça fait 18 mois ferme en tout, avec maintien en détention.
Peine complémentaire : interdiction de porter une arme pendant 10 ans.

Le juge lui explique la peine : « Vous pourrez continuer votre réflexion qui a besoin d’être approfondie, puis à votre sortie vous aurez une peine avec sursis très importante (15 mois), pour vous inciter à ne pas retomber dans la délinquance. Vous avez dix jours pour faire appel. »

FSA