Opinion

Il faut un tournant dans la communication officielle sur les masques

Par un collectif de chercheurs du CNRS

Depuis le début de cette crise on assiste à un déni de la réalité minant la crédibilité de la communication officielle. On a pu voir récemment le secrétaire d’État auprès du ministre de l'intérieur nier qu'on manquait de masques. Il y a une dizaine de jours, on apprenait que les policiers avaient interdiction de porter un masque. Il a souvent été répété que les masques n’avaient pas d’utilité pour le public et qu’ils devaient être réservés au personnel hospitalier. Ainsi les personnes en charge de la garde des enfants, pour beaucoup ceux des personnels médicaux, n’ont pas droit, ou ne peuvent pas porter un masque. Quelle est la conséquence plausible, sinon déjà dramatiquement effective d’une telle ineptie ? Un enfant en bonne santé apparente pourrait infecter des membres du personnel qui, à leur tour, infecteraient d'autres enfants, qui infecteraient leurs parents travaillant à l'hôpital, qui infecteraient d'autres personnels de l'hôpital, etc, etc... Cet exemple est particulièrement important car il touche les personnels soignants, mais la conséquence dramatique est la même pour toute la population.

Ce discours officiel, qui nie l'évidence pour justifier une politique découlant de la pénurie, doit cesser.

Il faut dire que nous manquons cruellement de masques. Il faut donc encourager ce qui apparaît spontanément partout : en attendant mieux, fabriquez-vous des masques artisanaux. Il faut cesser de les dénigrer : même des médecins hospitaliers y ont recours (https://www.hospitalia.fr/attachment/1878139/). Si vous pouvez, faites-en plusieurs et distribuez-les autour de vous. Ne portez pas le même plus de 2-3 h et lavez-les après chaque utilisation s’ils sont en tissu. Portez des lunettes, car les yeux sont une porte d’entrée pour le virus. Masques et lunettes servent aussi à éviter de se contaminer avec les mains. Il faut prononcer une interdiction absolue de sortir sans masque. Il faut aussi ne plus entrer dans un magasin sans se laver les mains. Cela nécessitera d’installer eau et savon à l’entrée des grandes surfaces où la promiscuité est importante, en attendant la production suffisante de gel hydroalcoolique. Les forces de l’ordre et vigiles devront veiller au respect de ces règles.

Ces mesures très simples ne devront surtout pas être considérées comme une protection absolue, et encore moins dispenser du respect du confinement et de tous les autres ‘gestes barrière’. Mais multipliées des millions de fois, elles pourront diminuer le taux de contamination. Que l’on puisse faire que le nombre de cas double en six jours, plutôt qu’en trois, peut sauver les hôpitaux de l’asphyxie annoncée. Nous devons éviter à tout prix que les hôpitaux aient à trier les malades !

On a vu apparaître les premiers morts parmi le personnel soignant. Imaginons que ce décompte macabre continue à ce rythme et qu’une fraction de ces personnels finisse par ne plus se contenter des applaudissements de 20h rapportés par les JT. Qui ira faire la leçon à des personnels de santé toujours en première ligne qui en arriveraient à refuser de se sacrifier pour les autres ? Et qui serait susceptible de les remplacer ? 

Même si l’ego de certains doit en sortir un peu égratigné, il est urgent de changer la communication officielle pour imposer des mesures simples et sans coût, mais qui pourront sauver des vies. 

Premiers signataires (26/03/2019)

Philippe Dumas, Directeur de Recherche émérite au CNRS, IGBMC-ESBS Illkirch

Eric Ennifar, Directeur de Recherche au CNRS, IBMC Strasbourg

Lionel Mourey, Directeur de Recherche au CNRS, IPBS Toulouse

Laurent Maveyraud, professeur de biophysique, université de Toulouse, IPBS-CNRS, Toulouse

Jean-Christophe Paillart, Directeur de Recherche au CNRS, IBMC Strasbourg

Marc-André Delsuc, Directeur de Recherche au CNRS, IGBMC Illkirch

Guillaume Bec, Ingénieur de Recherche au CNRS, IBMC Strasbourg

Bruno Kieffer, Directeur de Recherche au CNRS, IGBMC Illkirch

Jacqueline Cherfils, Directrice de Recherche au CNRS, ENS-Paris Saclay

Marie-Pierre Rols, Directrice de Recherche au CNRS, IPBS Toulouse

Jérôme Cavaille, Directeur de Recherche au CNRS, CBI, Toulouse

Marie-Line Cavaille, Ingénieure de Recherche au CNRS, CBI, Toulouse

Valérie Guillet, Ingénieure de Recherche au CNRS, IPBS, Toulouse

Dominique Burnouf, Directeur de Recherche au CNRS, IBMC Strasbourg

Sébastien Pfeffer, Directeur de Recherche au CNRS, IBMC Strasbourg

Céline Cougoule, Chargée de Recherche au CNRS, IPBS, Toulouse

Isabelle Saves, Ingénieur de Recherche CNRS, responsable de la coopération internationale, IPBS-CBI, Toulouse

Marie-Pierre Rols, Directrice de Recherche au CNRS, IPBS Toulouse

Olivier Cuvier, Directeur de Recherche-Inserm (CBI Toulouse)

Dominique Dumas, praticien hospitalier retraité de médecine interne, Marseille

Pierre Genevaux, Directeur de Recherche au CNRS, LMGM/CBI, Toulouse

Mme Myriam Padin, infirmière anesthésiste, hôpital privé Sainte Marie CHALON SUR SAÔNE 

Mary Poupot, chargée de recherche INSERM, CRCT Toulouse

Abdelhadi Saoudi, Directeur de Recherche au CNRS, Toulouse

Luc Simon, Physicien Médical, IUCT-Oncopole/CRCT, Toulouse