Chalon sur Saône

François Burgun : un charlemagne aux photos choc à Chalon sur Saône

François Burgun : un charlemagne aux photos choc à Chalon sur Saône

On entre en photo comme en religion, avec dédication. C’est l’état d’esprit de François Burgun. Il vit de la photo, mais ne gagne pas sa vie grâce à elle. Ce jeune photographe -professionnel depuis 12 ans- expose à la chapelle du Carmel, avec trois autres photographes contemporains. Il nous a parlé de sa création le jour du vernissage.

Des photos subversives de gâteaux d’anniversaire. Un gâteau, c’est un moment festif entre amis ou en famille. Mais dit-on ce qu’on pense vraiment ? La phrase sur le gâteau est un souhait, en général, mais est-ce vraiment le sentiment éprouvé par l’entourage ? C’est ce que s’est demandé François Burgun. Il a imaginé quelques réponses trash, à l’américaine, genre série télé colorée.

La phrase sur le gâteau, c’est dire tout haut ce qu’on pense tout bas. C’est le décalage entre une situation et le ressenti d’un vécu. François Bourgun fait les gâteaux, les photographie dans l’instant, puis ils disparaissent. Ne reste que cela, la trace. Comme celui d’un moment où la vérité d’une situation éclate dans sa crudité, comme la marque de ces dates charnières que sont les 5 ans, 18, 40 ou 70.

Choc et choquant, au chocolat aussi ! Le gâteau est aussi un spectacle, il est vu par des spectateurs à l’expo.

Une autre série convoquait les morts. Les gens photographiés portaient sur eux une écharpe mortuaire, de celles qu’on met sur la couronne, avec la phrase qu’ils auraient vraiment aimé dire et qu’ils n’ont pu ou pas osé lors du décès. La réalité sans fard, a posteriori.

François Burguin a suivi une formation d’art plastique à Metz puis a passé le concours à Arles. Il est suivi par François Cheval, le directeur du musée Niepce depuis longtemps. Il est photographe professionnel depuis 12 ans, mais ne vit pas de son art, il fait un job à côté, ou vit de petits boulots. Il crée en partenariat avec le musée Niepce et François Cheval l’a beaucoup soutenu. C’est important d’avoir une légitimité, une reconnaissance. Le photographe est un grand égocentrique ! Cela donne confiance. Le blog sur internet aussi, ces contacts avec des gens lointains qui ont vu sur le web les photos…

Il travaille différentes thématiques, dans le même esprit que le reste, le détournement de sens, faire se rencontrer les époques, passé et présent. Ainsi, il a trouvé des presse-papiers de cristal et il pose dessus des images que collectionnent les enfants comme Goldorak, etc. puis photographie cela. C’est la superposition de deux mondes, la collection ancienne en cristal et l’univers d’aujourd’hui.

C’est casser la dualité.

Comme sur les pièces de monnaie qu’on frappe, en Amérique, dans les foires, pour la fête, il y a un recto et un verso avec deux messages différents, ce qui est et ce qui serait dans le futur et sur le bord : good luck. Ce décalage fascine François Burguin, entre ce qui est, tout le bonheur, et demain peut-être la tragédie, tout détruit.

Les presse-papiers sont en cristal de baccarat. Sa famille travaille dans la cristallerie St Louis depuis des générations, il est le seul à ne pas y être, mais pour ne pas être le trublion complètement, pour se faire pardonner, il a fait une œuvre d’art de ces objets transparents gravés, mettant en avant le talent et la technique des maîtres-verriers.

La famille, le passé, sont des thématiques importantes dans son œuvre. Même sa barbe fait l’objet de photo. Il l’a fleurie au hasard de ses pérégrinations dans les villes du monde, ne pouvant offrir des fleurs, il en cueillait ici et là dans les parcs et a pris des photos de sa barbe fleurie en bon charlemagne, amusant et sympathique !

Pour lui, le photographe plasticien est comme un médium. Le gâteau est un happening. Les gens sont pris dans leur intimité, c’est un peu gênant et ils finissaient par prendre la photo pour un déversoir de frustration psy, évitant ainsi le coût d’une analyse ! Il en était mal, finalement et a arrêté. Mais c’était l’occasion pour lui, à l’origine, de se défaire de ses propres secrets de famille, en les exposant par une phrase qui était sa clé de choc.

Ce monde étrange a séduit la Chine. Il a reçu le prix de la nouvelle photographie internationale. Etonnant dans le pays de la censure et de la dictature, dit-il. On craignait que les photos ne puissent être exposées.

Le prochain projet : des photos de flipper, les vitrines et leurs reflets.

 

S.B.