Chalon sur Saône

L'Inde à l'honneur des "Cafés de l'énergie" organisés à Chalon par l'International Nuclear Academy

L'Inde à l'honneur des "Cafés de l'énergie" organisés à Chalon par l'International Nuclear Academy

Ce vendredi à Chalon, Hamanjit Singh Nagi, représentant d'EDF en Inde, s'est penché sur son pays et sur la place pour l’industrie française dans l’électronucléaire indien. L’Inde compte près de 1,3 milliards d’habitants et mise sur l’électronucléaire pour répondre à une demande énergétique pour combler le déficit d’offre d’électricité. La part du nucléaire ne représente que 3% de l’électricité consommée, mais les perspectives de mettre 63GW en service en 2032 donnent de l’appétit.

Les cafés de l’énergie sont organisés par l’INA, International nuclear academy présidée par Eric Mermet. C’était le 2e café qui avait lieu à Chalon. Pendant 1h30, les représentants des entreprises concernées par la filière énergie nucléaire ont pu échanger autour d’un thème précis. En janvier, c’était à Lyon, sur les projets internationaux d’Edf. Ce café de l’énergie a lieu sur les grandes places du nucléaire en France (Cotentin, Flamanville, Paris, Chalon, Lyon et Marseille) pour donner l’opportunité aux entreprises de se rencontrer et d’étudier le marché. L’invité donne un éclairage sur un point particulier et d’actualité. A Lyon, il s’agissait du marché britannique puisque Edf s’est implanté en Angleterre : Edf energy.

 Hamanjit Singh Nagi est le représentant d’Edf en Inde, un petit bureau qui compte 4 personnes. Il vient régulièrement en France au siège d’Edf. INA fait de la formation continue dans le nucléaire. Depuis les élections de 2012, les projets étaient flottants quant à la part du nucléaire dans le mix énergétique, mais Eric Mermet assure que les projets sont repartis dans le monde entier : "17 projets sont dans les tiroirs en Inde. Il y a de grosses commandes pour le monde, même la Chine, c’est fabriqué à St Marcel. La France occupe une place de référent en nucléaire dans le monde. Pour cela, il faut garder cette filière dynamique en France."

L'analyse de Hamanjit Singh Nagi.

Les technologies en Inde sont pour beaucoup obsolètes. Ce sont de petites entreprises avec de petites marges de profit. Les lois sont difficiles à comprendre et à appliquer à cause de la complexité technologique. Les experts ne comprennent pas toujours bien les lois. Il y a un marché mais il faudrait changer les stratégies et le scénario du marché est instable. Ces problèmes de formation, de technologie et de stabilité pourraient être solutionnés par des joint-ventures et des apports en matière de technologie et technicité.

Les compagnies indiennes ont besoin d’améliorer la protection et la sécurité des centrales. Des entreprises diverses sont déjà présentes même si le secteur est fermé, il y a des opportunités pour les Français d’apporter leur contribution. Il y a différents champs intéressants. Des jobs métal lourd pour grandes compagnies, des jobs pour compagnies moyennes, en travail de précision pour petites compagnies (sachant qu’une petite compagnie comprend mille à deux mille personnes en Inde). L’Inde a besoin de pompes, de générateurs, de contrôle de radioactivité et en maintenance, en isolation et en "polar crane."

Hamanjit Singh Nagi évoque la compagnie Nuvia et son activité en Inde. Et des possibilités d’’expansion pour les compagnies existantes. Des offres et des problèmes.

Une quinzaine d’entreprises étaient réunies autour de la table pour écouter Hamanjit Singh Nagi parler de la situation du pays et des possibilités d’implantation pour la France, de l’apport intéressant de la technologie française et de ses connaissances en matière nucléaire. La France est bienvenue, ce qui pour autant ne signifie pas qu’elle aurait le marché. Car le pays est ce qu’il est, avec de nombreuses lois complexes, pas toujours bien appliquées, des difficultés administratives créent des obstacles. S’agit-il d’importer tout, de faire une partie sur place, de tout fabriquer sur place ?

Les entreprises parlent de leur expérience en Inde, évoquant les différences culturelles, assez ordinaires, mais difficiles pour tout homme d’affaires venant avec son produit tout fait qui ignore ces différences culturelles et veut aller vite avec un résultat immédiat comme c’est souvent le cas. Les contrats joint-venture seraient bienvenus. Mais souvent les accords se font au cas par cas, de personne à personne, et les modes de contrat et de communication sont parfois décourageants.

Peu de gens sont informés des dangers et des risques. Il y a des failles en matière de sécurité, semble-t-il. Une carte détermine les emplacements déjà existants, disséminés dans le pays.

Avoir la liste des entreprises étrangères déjà sur place est nécessaire. Elles évoquent aussi le prix du terrain industriel excessivement cher. Par contre construire sur place se fait de façon ultra rapide. Il est parfois difficile de rencontrer quelqu’un qui a le même niveau de connaissance technique. Elles évoquent le problème de la formation et de trouver des employés du personnel local absolument compétents.

Que peut leur apporter Hamanjit Singh Nagi ?

Il peut permettre la rencontre entre compagnies et faciliter les premiers pas, trouver des partenaires. Il peut travailler avec les compagnies pour optimiser les choses au mieux et les aider à s’implanter ou trouver des contrats pour développer ce marché en Inde.

Pour Eric Mermet, à l’heure où les pays tentent de dénucléariser leurs terres, la France désire développer sa technologie, malgré les catastrophes qui ont eu lieu dans l’histoire, des grandes en Russie et au Japon, de petites un peu partout, en France aussi. Le problème des déchets nucléaires reste majeur. A cela, Eric Mermet répond "plus on avance en technologie, on en est à la 3e et 4e génération de centrales, plus les centrales sont sûres, et elles produisent moins de déchets !" En produire moins ne signifie pas ne plus produire du tout, et la question reste sans réponses quant à ce moins et quant aux déchets des vieilles centrales qui demeurent : où les met-on ? Sachant que ces déchets signent une destruction potentielle de la Terre même. Que représente 63GW en matière de pourcentage de production d’énergie ? Au vu des problèmes évoqués ci-dessus en matière de sécurité, l’Inde qui comprend 1,3 milliards d’habitants prendra-t-elle ce risque de tenir une population sous le joug d’un certain danger du nucléaire en le développant ? Ce pays, qui est celui des religions de paix comme le bouddhisme et l’hindouisme, où la nature a toujours été déifiée, pense cependant à sécuriser les centrales qui existent. Ceci est une question. Alors, à quand un café des énergies ?

 

S.B.