Saône et Loire économie

Débat animé à Cluny autour du Center Parcs du Rousset

Débat animé à Cluny autour du Center Parcs du Rousset

Deux heures et demie de débat consacrées au projet de Centerparcs sur la commune du Rousset. La petite salle de la Justice de Paix a vite débordé de monde. En ce samedi ensoleillé, à 16 h, plus de quatre-vingt personnes ont échangé sur un projet aussi vanté par les collectivités locales que méconnu du public.

A l’invitation de l’association le Geai du Rousset, qui réunit les opposants à l’implantation du Centerparcs, Cluny a accueilli sa deuxième réunion consacrée à ce projet contesté. Le collectif avait lancé des invitations mais la salle s’est vite révélée trop petite pour accueillir les curieux. Premier constat : le travail accompli par les bénévoles de l’association est assez phénoménal. En une trentaine de fiches, consultables sur internet, le collectif a recueilli des données thématiques variées (économie, tourisme, impact écologique, expérience des riverains d’autres Centerparcs) en se basant sur le protocole d’accord, qui lie Département et Région à Pierre et Vacances et en procédant aussi à ses propres recherches.

Après un propos liminaire d’un des animateurs du collectif, le débat s’ouvre. Les premiers à prendre la parole sont les partisans du projet : un vieil habitant du Rousset « content qu’il s’y passe enfin quelque chose, ce pays meurt petit à petit. Ça me désole toute cette contestation». Alain, membre du Geai du Rousset lui répond : « Nous sommes tous ici pour une dynamisation du tissu rural. On pense qu’on peut le faire autrement. Un des problèmes majeurs du projet reste l’utilisation de l’argent public. On nous dit de nous serrer la ceinture à l’hôpital, dans tous les services publics et là on dépense sans compter… ». C’est ensuite l’époux de la maire du Rousset qui prend la parole en faveur du Centerparcs : « On a eu des contacts avec le maire d’Hattigny en Moselle où un Centerparcs s’est implanté. Avant, personne ne venait dans ce coin perdu, depuis, les hôtels alentour ne désemplissent pas ».

Combien d’emplois ?

Trois cents ? Deux cents équivalents temps plein ? La querelle mathématique a battu son plein et rythmé la réunion. « Tout de même, la France organise la COP21 en 2015 (Conférence climat) et le Département défend un truc sous une bulle chauffée à 30° toute l’année, c’est paradoxal !», s’insurge un participant. C’est ouvrir la porte à une longue intervention de Jean-Luc Fonteray, conseiller général PS de Cluny et candidat à sa réélection à la fin du mois. « Il y aura un débat public. Les informations que vous donnez sont-elles les bonnes ? Quelles sont vos sources ? » Interroge-t-il, soupçonneux.   Aussitôt interrompu par un membre du collectif : « l’information c’était votre rôle, vous ne l’avez pas fait. On a juste reçu voilà deux ans dans nos boîtes-aux-lettres le magazine du conseil général nous présentant le projet comme un fait accompli ! ». L’élu plaide en faveur de la Société d’économie mixte composée du Département et de la Région qui « ne se veut pas une subvention à perte mais une participation  avec espoir de retour». Il se fait chahuter en avançant que les 200 emplois équivalents temps plein seront complétés par des temps partiels. « Faux ! » braille la salle en chœur.

Régis, de Saint-Vincent, s’agace du « monologue » de l’élu : « Si le débat est sur la place publique, c‘est parce que nous l’avons demandé. On sait que M. Brémont (PDG de Pierre et Vacances) est venu en repérages en Saône-et-Loire dès 2008. On ne l’a appris qu’en 2013 ! » Robert, un Clunisois qui a une maison de famille à La Guiche s’enquiert des solutions alternatives proposées par le collectif. « Et s’il vous plaît, arrêtez de lancer des chiffres, c’est invérifiable en réunion ! » John, un dessinateur se réjouit des chantiers à venir générés par le projet : « Pensez à ouvrir les frontières de la Bourgogne à des citadins qui seront bien contents de venir y respirer ». Le propriétaire de deux gîtes ruraux déplore ce tourisme de masse : « La partie humaine de l’accueil me semble supérieure». Un membre du collectif évoque le maillage du territoire voulu par Pierre et Vacances : « C’est un Centerparcs tous les 200 km. Il y a eu 5 Centerparcs réalisés en vingt-cinq ans et voilà qu’on veut en ouvrir plusieurs à la suite ». René évoque le succès à Pont-de-Vaux d’un ensemble de chalets, avec piscine qui ne désemplissent pas et sont à taille humaine « avec des tarifs qui n’ont rien à voir avec ceux de Pierre et Vacances ». « Je trouve ce projet dément, nous confie ce militant PS de Montbellet, membre de l’association. A l’heure où les dépenses publiques sont très surveillées, j’ai peur que cela coûte cher au public. J’ai l’impression que les élus sont coincés par le promoteur ».

Une bulle chauffée avec des palmiers dedans

« Est-ce que c’est le rôle du conseil général d’acheter une bulle avec des palmiers dedans ? » lance quelqu’un. Un autre souligne la bonne affaire immobilière et la défiscalisation de l’opération pour les investisseurs grâce à la loi Censi-Bouvard : « Bercy perdra 3000 euros d’impôts sur chaque cottage, y en a 400, tous chauffés à l’électricité ». « Faut arrêter de dire que la bulle, c’est de l’argent public », tente le conseiller général. « Oui, mais si ça ne marche pas, qui va payer ? C’est bien nous les contribuables puisque le Département devra entretenir les équipements ? ». Une jeune professionnelle du tourisme compare un séjour au Centerparcs à un séjour en hôtel club en Tunisie. « Pendant la semaine, les gens ne sortent pas de l’hôtel et au retour n’ont rien vu de la Tunisie ». Applaudissements. Et d’évoquer les touristes captifs de la bulle. « L’alimentation, comme sur les relais autoroute, arrivera par camions via une multinationale spécialisée. Faut pas imaginer qu’ils achèteront le pain à La Guiche », précise Dominique Cornet, l’un des responsables du Geai du Rousset. Pas de fournisseur local envisagé. D’autres questions, sans réponses précise, ont été posées au sujet de l’approvisionnement en eau du site, de la participation des entreprises locales à la construction, du traitement des déchets, du chauffage au bois (venu du Jura, du Morvan et du Canada…) de la bulle et de la méthanisation envisagée sur site.

Soumis à la procédure officielle du débat public (CNDP), le projet Centerparcs du Rousset tiendra sa première réunion officielle le 24 avril. La procédure sera close le 20 juillet. Trois grands débats de trois heures seront organisés accompagnés de plusieurs réunions thématiques. « On a droit au débat public parce qu’il y  a eu Notre-Dame-des-Landes, Sivens, Roybon et leurs zadistes », reprend Dominique Cornet. Jean Luc Fonteray reprend la parole : « je ne vois pas d’intérêt à ce que chacun organise son débat en attendant la CNDP». « Il y a deux ans, nous avions demandé aux élus des précisions sur ce projet  qui ne sont jamais venues. Nous avons demandé à travailler avec eux, on n’a pas eu de réponse. En proposant des réunions, nous faisons notre travail associatif d’information du public» a répliqué Dominique Cornet.

 

Florence Genestier

EN SAVOIR PLUS : 

Le site du Geai du Rousset : http://centerparc-le-rousset.org/

Le protocole d’accord entre Pierre et Vacances la région Bourgogne le CG71 : http://www.google.fr/url?sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=4&ved=0CDMQFjAD&url=http%3A%2F%2Fwww.cg71.fr%2Ffileadmin%2Fuser_upload%2FPdf%2FLe_Departement%2Fcenter-parcs%2Fprotocole-accord-center-parc-crb-cg71-pvsa.pdf&ei=T2v7VNeTFIn0UuSVg8AJ&usg=AFQjCNFdJ_W7M6SqtxuyXztM92rT4ONqSw&sig2=4xleebV2BW7tpKRHcndkQg&bvm=bv.87611401,d.d24

Le site de la commission nationale de débat public consacré au projet : http://www.debatpublic.fr/projet-center-parcs-saone-loire

Le site de vacances de Pont-de-Vaux évoqué par l’un des participants : http://www.revea-vacances.fr/fr/campagne/nos-destinations-campagne/sud-est/pont-de-vaux.html