Faits divers
A Sevrey, la relation était devenue tellement toxique qu'elle termine à la barre du tribunal
Par Florence SAINT-ARROMAN
Publié le 16 Août 2021 à 20h15
« J’ai cru que j’allais mourir », dit-il au tribunal. Le grand jeune homme de 26 ans, cheveux noirs sur masque noir, se tient à la barre de l’audience de comparution immédiate de ce lundi 16 août.
« J’ai cru que j’allais mourir », dit-il au tribunal. Le grand jeune homme de 26 ans, cheveux noirs sur masque noir, se tient à la barre de l’audience de comparution immédiate de ce lundi 16 août. Il sort alors de la poche gauche de son jean la plaquette d’anxiolytiques qu’il prend désormais dès qu’une crise d’angoisse se profile.
C’était le 1er juillet dernier, convoqué devant le tribunal pour répondre de violence sur sa copine, il a demandé un renvoi pour préparer sa défense, le tribunal l’avait alors placé sous contrôle judiciaire. Il sort libre du palais de justice et là, pile là, il fait sa première crise d’angoisse et il croit mourir. Fragile, donc. Fragile mais pas que, la présidente Catala le souligne : le jour d’une des disputes, fréquentes et bruyantes d’après le voisinage, il voulait absolument discuter avec sa copine, mais « chez vous, elle ne voulait pas parler avec vous, en bas de l’immeuble elle ne voulait pas parler non plus, et 500 mètres plus loin, elle ne voulait toujours pas, et vous ne comprenez pas ?! ». Fragile mais obstiné, donc, et pas très respectueux de la volonté de l’autre.
Son ex-copine est là. Ils se rencontrent en juin/juillet 2020, et dès septembre, ils emménagent ensemble. Ils vivent à Sevrey. Sauf qu’assez rapidement, ils assaisonnent leurs voisins de cris, de coups de poing dans les murs, et de bruits de vaisselle et d’objets qu’on casse. Une première scène violente, la gendarmerie intervient, monsieur est convoqué pour un rappel à la loi. À ce moment-là, rappelle maître Brossaud pour le prévenu, la victime assure qu’elle est libre de ses mouvements et fréquentations, qu’elle jouit d’une indépendance économique. « C’est un couple qui fonctionne sur un mode destructeur, mais c’est un couple qui fonctionne comme ça. » Fragile, mais impulsif et dominant par l’expression de la violence. « Cette relation est décrite comme toxique, il était temps que les choses s’arrêtent », relève la présidente.
S’il est jugé ce lundi, c’est que madame a fini par déposer plainte, « un mois et demi après les faits », insiste l’avocat de la défense qui estime que certes, il s’est passé des choses pas acceptables, mais interroge le degré de responsabilité de monsieur à la lumière des déclarations tardives de madame. Charles Prost, vice-procureur, n’est pas de cet avis : sur les faits du 16 avril, une photo vient attester des gifles, tirage de cheveux et tentative d’étranglement, pour les faits du 29 juin, une vidéo montre des traces, et puis il y a deux certificats médicaux (deux jours d’ITT sur le second) et les témoignages du voisinage. « Il faut que ça cesse définitivement. » Le procureur requiert une peine de 10 mois de prison entièrement assortis d’un sursis probatoire de 2 ans.
Le prévenu a une condamnation à son casier, datant de juillet 2019 pour usage de stups et des faits de séquestration avec libération avant 7 jours (ça peut être d’avoir retenu une personne contre son gré pendant une heure, on n’en sait rien, ndla). Il était en sursis mis à l’épreuve, « et il s’est sorti des stups, ce n’est pas un sociopathe. Il travaille, il assume sa vie », rappelle maître Brossaud. Fragile mais pas sans ressources, donc. D’ailleurs le jeune homme, et c’est à son crédit, a de lui-même engagé des soins psychologiques, sans qu’on l’y oblige.
Il va devoir s’y astreindre pendant au moins deux ans, car le tribunal le condamne à une peine de 10 mois de prison entièrement assortis d’un sursis probatoire (l’équivalent du sursis mis à l’épreuve rebaptisé par une réforme dite de modernisation de la justice) pendant 2 ans avec exécution provisoire : l’interdiction de contact avec son ex, celle de paraître à son domicile ainsi que sur son lieu de travail (il y fut harcelant), obligation de travailler, « le travail est un facteur de stabilité » lui dit la présidente, et de suivre des soins.
Fragile donc, et aux limites inexistantes ou mal posées : la justice et ses crises d’angoisse le lui rappellent. Paradoxalement, c’est une chance pour lui, si toutefois il en fait quelque chose de constructif pour lui.
Florence Saint-Arroman
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