Agglomération chalonnaise

Pef, prince des mots et du trait, inaugure « l’échec scolaire » à l'école de Charrecey

Pef, prince des mots et du trait, inaugure « l’échec scolaire » à l'école de Charrecey
Pef, prince des mots et du trait, inaugure « l’échec scolaire » à l'école de Charrecey
Pef, prince des mots et du trait, inaugure « l’échec scolaire » à l'école de Charrecey
Pef, prince des mots et du trait, inaugure « l’échec scolaire » à l'école de Charrecey

Il était invité à Charrecey, ce samedi 14 mai, à une inauguration bien spéciale dans l’école qui porte son nom. L’auteur illustrateur Pef, prince des mots et dessins inventifs, prend part, depuis 27 ans, à la créativité des élèves de son ami, Fred Mommée.

Samedi, c’était un triangle parfait. D’un côté, vous avez un instit (joli mot oublié) tout de noir vêtu, une dégaine rock à la Bernard Lavilliers, un enseignant comme on en rêve, toujours à concevoir des projets mémorables avec ses élèves. De l’autre, mais pas loin, vous avez un Pef – Pierre Élie Ferrier de son vrai nom – auteur illustrateur renommé qui est, entre autres paternités, le créateur du Prince de Motordu, série d’albums pour enfants. Et enfin, une classe de CM1-CM2 qui connait bien son œuvre. Avec leur maitre, ils ont décliné le principe des jeux de mots, en lui créant une famille de cousins : Mopoilu, Mocrochu, Mopacru, Moperdu… pour qui ils ont inventé des aventures, mises en images par Pef.

Agrandir cette famille à l’infini, lui faire traverser les générations, l’animer sur, pourquoi pas, un jeu d’échecs géant ?

Pef ou la fantaisie poétique

Né à Saint-Jean-des-Vignes, Pef est toujours revenu dans la Bourgogne. Il garde au fond de lui les paysages de son enfance chez sa grand-mère, à Saint-Gengoux-le-National, en particulier la colline de Saint-Roch « elle représente ma colline inspirée » confie-t-il.

Une création prolifique, une centaine d’albums pour enfants… Et parmi eux, un personnage, le Prince de Motordu : il déforme les mots, comme parfois le font les enfants, vit dans un beau « chapeau » au-dessus duquel flottent des « crapauds » bleu, blanc, rouge. Et bien sûr, son créateur prend un plaisir espiègle à les illustrer au pied de la lettre. « Je n’aurais pas créé ça si je n’étais pas dessinateur. L’émerveillement vient de la traduction graphique. Je suis bilingue en quelque sorte : de la prose et des dessins. L’écriture est une langue régie par des règles. Tandis que le trait, c’est de la poésie totalement libre. Je respecte les mots et j’aime en même temps les bousculer, les déranger. »

C’est dans cet esprit de fantaisie poétique que Pef a inauguré le jeu d’échecs géant créé par la classe de CM1-CM2 de Charrecey. Et de s’exclamer, au moment de couper le bandeau tricolore : « Quand on prend le ciseau, on lui met les doigts dans les yeux ? Il ne voit plus rien ! Quelle couleur dois-je couper d’abord ? »

« J’ai toujours su que les enfants existaient »

Pef a l’art de parler aux enfants, de les surprendre par sa plume et son trait, d’être véritablement « en contact » : « J’ai toujours su que les enfants existaient. Sans doute parce que j’ai vécu, jusqu’à l’âge de 21 ans, dans un logement de fonction – ma mère était institutrice – et ma chambre donnait sur la cour de récréation. Je les avais toujours sous les yeux. »

Premier contact avec les livres : souvenir d’enfance d’un auteur illustrateur

Impossible d’oublier les mots de Pef quand il narre avec une acuité extrême sa première expérience de lecture, qu’il voit comme « fondatrice d’une certaine magie » : « Très tôt, je me suis perdu dans la lecture des dessins. En 1939, quand je suis né, il n’y avait pas de livre pour l’enfance, à part les livres du Père Castor. Je ne savais pas encore lire, mais j’allais dans une classe désaffectée, où se trouvaient des livres du XIXe siècle comme Jules Verne, etc. La page de gauche portait le texte, la droite était illustrée. Je me souviens encore précisément d’une gravure dans un livre qui se passait au Far West. Il y avait un train lancé à toute allure, dont la route était coupée par le passage d’un troupeau immense de bisons et au loin, des Indiens qui chevauchaient en tirant des coups de fusil en direction du train. Pour moi, ça a été mon premier film. Je pouvais passer des heures, allongé au sol, sur ces images-là. Ç’a été comme un choc primal. »

Fred Mommée est sans doute celui qui parle le mieux de son ami Pef. Et il l’a fait dans un discours truffé de jeux de mots – un esprit qu’ils ont en partage – retraçant cette belle et longue « histoire d’humour » avec son « Pef spirituel ».

Par Nathalie DUNAND
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