Faits divers

TRIBUNAL DE CHALON - Les gendarmes viennent sensibiliser sur les risques de l'alcool.. et reçoivent une bouteille sur le toit de la voiture

Par Florence SAINT-ARROMAN

Publié le 05 Janvier 2023 à 20h47

TRIBUNAL DE CHALON - Les gendarmes viennent sensibiliser sur les risques de l'alcool.. et reçoivent une bouteille sur le toit de la voiture

Des gendarmes passent à la salle des fêtes de Saillenard, ce 31 décembre dans la soirée, pour dispenser une information sur les risques de l’alcool au volant. Alors qu’ils repartent, bim ! Une bouteille de bière s’écrase sur le toit de leur véhicule.

Une Desesperados, bigre. Les militaires sont trois, ils appellent des renforts, le PSIG les rejoint. Qui a lancé cette bouteille ? Des témoins désignent un jeune homme. Il est interpellé, placé en GAV, puis en détention provisoire. Il est jugé ce jeudi 5 janvier selon la procédure de comparution immédiate. Il reconnaît les outrages et la rébellion, conteste le jet de bouteille. Il a 20 ans, il vit chez ses parents à quelques kilomètres de Saillenard, il avait « un peu bu », il explique son agressivité et ses insultes par le comportement d’un gendarme qui après l’avoir menotté « m’a poussé contre un mur, cognant ma tête », « je ne suis pas devenu agressif pour rien ». 

Des conditions de vie sociales qui se dégradent

L’instruction ne s’attarde pas sur le contexte de vie du prévenu, c’est le procureur qui va le faire, relevant les éléments qui racontent une mauvaise dynamique : deux condamnations en 2022 dont l’une est définitive (appel en cours pour l’autre), inscrit à pôle emploi mais radié* deux mois pour avoir manqué deux rendez-vous, « je n’ai plus de téléphone depuis 2 ans », il vit chez ses parents, sa dernière mission en intérim remonte à août dernier, il vient d’en rater une puisqu’il était en garde à vue, et « il investit son peu d’argent dans sa consommation de cannabis ». 
« Ce jour-là, monsieur a lancé une bouteille sur le véhicule de gendarmerie – ‘Non, non’ entend-on venir du box où le garçon fait des signes de dénégation avec la tête -, on pourrait se dire que c’est une erreur d’un soir si on n’observait pas des problèmes d’insertion. » Alexandre Marey requiert la peine de 12 mois de prison dont 9 mois assortis d’un sursis probatoire de 2 ans, demande la révocation du dernier sursis à hauteur de 3 mois, et « au regard de son positionnement aujourd’hui », le maintien en détention. L’avocat de la défense, maître Lopez, plaide en faveur d’un aménagement de la peine.

6 mois en DDSE, un TIG, un stage de citoyenneté

Le tribunal déclare le prévenu coupable de tout, le condamne à la peine de 9 mois de prison dont 6 mois sont assortis d’un sursis probatoire pendant deux ans, avec obligation de travailler, de faire un stage de citoyenneté, d’indemniser le gendarme, de faire un TIG (travail d’intérêt général) de 105 heures. Le tribunal révoque en outre 3 mois du sursis de septembre dernier, et ordonne l’aménagement de la peine des 6 mois ferme en détention à domicile sous surveillance électronique (DDSE).

FSA

* On ne s’attardera pas sur cette pratique inouïe qui consiste à priver les gens de leurs revenus (pour avoir droit à des allocations de retour à l’emploi il faut avoir cotisé, de surcroît les ARE ne sont jamais une rente à vie, elles ont un début et une fin) en période de chômage, pour les dresser (on dit « activer » dans les milieux autorisés) un peu. On en parle d’autant plus volontiers qu’on a connu de l’intérieur le fonctionnement d’un PLIE (plan local pour l’insertion et l’emploi) en Saône- et-Loire et on a pu entendre le cynisme et l’ironie avec lesquels, dans cette structure précise et avec la direction qu’elle avait à l’époque, on ordonnait un « courrier du cœur ». La représentante de pôle emploi notait alors sur son listing, « R », pour radiation. Cette expérience n’autorise pas à généraliser le cynisme, mais illustre bien la violence du procédé, justifiée par une fin (le fameux « retour à l’emploi ») dont on sait désormais qu’elle échoue souvent, radiation ou pas. Le retour à l’emploi, c’est comme la désistance : quand ça arrive, les paramètres de la réussite échappent en majeure partie aux professionnels de l’insertion, quoi qu’ils en disent. Dans un cas comme dans l’autre il faut bien sûr des dispositifs d’encadrement et de soutien, mais le volontarisme affiché en matière d’insertion professionnelle n’est qu’une vitrine publicitaire, les choses se passent autrement dans la réalité. Cette remarque ne vient pas contrarier les observations très justes du procureur à l’audience : ce jeune homme est en spirale descendante pour ce qui le concerne.