portrait

Frédéric Mousset, directeur du CASINO JOA SANTENAY : l’homme des challenges

Frédéric Mousset, directeur du CASINO JOA SANTENAY : l’homme des challenges

Né à Aurillac dans la pratique familiale du rugby, Frédéric Mousset est passé du monde de la restauration à la direction d’établissements de jeux. Un parcours boosté par les challenges.

À première vue, le secteur de la restauration et celui des casinos ont peu de liens. Le parcours de Frédéric Mousset montre combien ils se rejoignent par certaines compétences essentielles de ses directeurs.

Car les échelons, Frédéric les a gravis un à un dans les deux secteurs. Son expérience dans les restaurants de luxe et hôtels grand standing lui ont donné les clés pour conduire au succès les différents casinos dont il a assuré la direction. Le maître-mot : aimer relever les challenges.

Formation dans la restauration

52 ans, un sourire à la Robert de Niro, Frédéric Mousset livre un peu de sa jeunesse dans le Cantal. Aurillac dans les années 70-80, le rugby dans le top 14, son père et son frère sur le terrain, et lui, dès 4 ans, chez les poussins, puis les benjamins, jouant même avec Sébastien Viars. On ne pratique pas un sport pendant une quinzaine d’années sans être empreint de ses valeurs : « Ce que j’aime dans le rugby, c’est qu’on se bat pour un maillot, un club, et toujours dans le respect des adversaires. Il y a un esprit familial très fort, bon enfant et convivial. L’amour du jeu réunit. »

Résultat : l’esprit d’équipe – le vrai, l’émulation collective – devient sa seconde nature, son moteur. Et partout où il passera, il laissera cette empreinte.

CAP service en poche, son apprentissage dans un restaurant gastronomique lui apprend les codes face aux clients – il a servi Giscard d’Estaing ! Puis, avec la bénédiction de son père « Si tu as 16 de moyenne, tu fais ce que tu veux », il s’envole pour Londres, il a 18 ans. Il sera commis dans deux restaurants 5 étoiles luxe « J’ai appris à être à la hauteur des exigences, à me comporter devant une clientèle de luxe. J’ai ainsi croisé Roger Moore, Franck Sinatra, Ursula Andress, Sean Connery… » se souvient-il avec amusement.

Management

Les expériences s’enchaînent et nécessitent une mobilité géographique que le jeune Frédéric accepte comme une évidence. L’une d’elles l’a particulièrement marqué, boostant toute son énergie de challenger. En 1994, le Groupe Partouche (1er groupe de jeux français en nombre de casinos) ouvre un restaurant gastronomique, l’Hôtel du Golf, à La-Tour-de-Salvagny, vers Lyon. « J’ai participé à une ouverture, c’est plutôt rare dans une carrière. Ce sont mes plus belles années de restauration ! Toute l’équipe se donnait à fond pour cette construction de A à Z. Je n’avais encore jamais fait de banqueting (resto, séminaire, réunions…) j’ai donc beaucoup appris. »

1994-2000, une expérience qui a façonné le management de Frédéric Mousset. « Les moments passés ensemble étaient tellement forts. On avait envie de faire plaisir aux clients, on y mettait toute notre ardeur. Il y avait un dynamisme de groupe étonnant, on ne comptait pas nos heures, on était fusionnels dans l’équipe. Sur 1 année, on a fait 42 mariages. On avait plus envie d’être au boulot qu’à la maison. C’était grisant. » Maître d’hôtel, responsable de restauration, les échelons se gagnent dans une intensité joyeuse. « Christian Benages, le directeur, et Alexandre Chirat, le responsable restauration, qui comptent aujourd’hui parmi mes meilleurs amis, m’ont donné les ficelles du management. »

C’est là aussi que Frédéric rencontre celle qui deviendra son épouse… De belles années, à tout point de vue.

Premiers pas dans les casinos : 2000-2007

Les restaurants sont obligatoires dans les casinos et c’est ainsi que Frédéric Mousset entre au casino Le Pharaon : « C’était le 1er avril 2000 et ce n’était pas une blague ! J’ai ouvert un 2e restaurant, mais on manquait de Mcd (membre du comité de direction des machines de jeux, sorte de responsable des salles), alors j’ai assumé les deux postes. On m’a donné un trousseau de clés, un technicien m’a dit : vas-y, débrouille-toi. J’ai appris sur le tas. Ce qui m’a sauvé, c’est mon côté relationnel avec les clients. J’ai découvert ce milieu, évolué, et quitté définitivement la restauration. »

Directeur de casino

À partir de 2007, une crise sans précédent plombe les casinos, mettant fin brutalement à vingt ans de croissance. L’interdiction de fumer dans les lieux publics, la crise économique, la concurrence des jeux en ligne, les causes sont plurielles.

Devant la baisse d’activité, le métier doit être repensé. Frédéric Mousset est entré dans les fonctions de directeur à cette période : « Avant, les directeurs focalisaient sur l’outil, les machines à sous, il y avait peu de contact avec le client. Aujourd’hui, on doit aller le chercher. De plus en plus de directeurs de casinos viennent de la restauration parce que le relationnel avec les clients comme avec l’équipe est devenu primordial. »

C’est en 2011 qu’il occupera son premier poste de directeur à Bourbon-l’Archambault, près de Moulin dans l’Allier. « Luc Le Borgne, président du groupe, m’a appris le métier, surtout le côté administratif. Côté relationnel, je faisais comme je le sentais. » Ses idées sont parfois jugées saugrenues, mais se révèlent d’une rare efficacité. « J’étais le seul du groupe, et un des rares en France à être en positif, pourtant dans un village de 1 200 habitants. Le JDD (Journal du Dimanche) était venu m’interviewer pour comprendre comment un petit casino – nous étions perdus au milieu des vaches – avait pu gagner tant de clientèle qui n’hésitait pas à faire 1 h 30 de route. La clientèle venait chercher du convivial. »

Directeur “sauveur”

Les offres s’enchaînent, Frédéric choisit selon son « feeling » qui le pousse, invariablement, vers les défis à relever. C’est ainsi qu’il accepte en 2014 la direction d’un casino à Aix-les-Bains, le Pokerball, en déficit depuis son ouverture en 2009. Il a 3 ans pour sauver la société.

« On m’avait donné une liste de 5 noms à licencier, jugés “bons à rien”. Non seulement je n’en ai viré aucun, mais 4 d’entre eux sont devenus les piliers de l’équipe. Avec un management à ma façon, ils se sont investis. Je n’hésitais pas à mettre la main à la pâte, faire le barbecue ou la plonge s’il le fallait. C’est ma nature : j’aime être actif et je suis quelqu’un de très positif. Je pense être bon dans la gestion du stress. Les idées farfelues me viennent à la pelle pour booster l’activité, gérer les imprévus. Et surtout, je me mets toujours à la place d’un client. »

Le résultat de ces efforts en symbiose ne se fait pas attendre : le déficit, de 270 000 € à l’arrivée de M. Mousset, se réduit à – 170 000 € seulement 4 mois après, et croît jusquà s’inverser en positif à + 270 000 €. « Sauver une société, c’est sympa. Je n’avais pas peur, je croyais en ma façon de faire. Analyser la situation, discuter avec chaque membre de l’équipe, mettre en place des nouveautés, connaître nos clients. Et ce qui est essentiel, c’est qu’on n’y arrive pas tout seul, mais en équipe. » L’aventure aura duré 2 ans.

« J’aime le challenge. Il ne me fait pas peur, au contraire, il me stimule. Je me fixe des objectifs progressifs, et j’essaie d’y parvenir. C’est quand la routine s’installe qu’on ne voit plus les petits détails à améliorer. On a besoin de renouvellement dans les casinos. »

Landes, Dax, Gruissan… les déménagements se succèdent au gré des postes. « Si j’en suis là aujourd’hui, je le dois aussi à ma femme qui a choisi de privilégier ma carrière et me suivre dans tous les déménagements. »

Le groupe JOA et l’arrivée à… Santenay

« 15 jours après avoir arrêté Gruissan, Joëlle Arrègle-Jaubert, directrice RH du groupe Joa, m’appelle pour prendre la direction du casino de Santenay. Avec mon épouse, nous voulions nous installer dans le Sud… » Mais décision est prise par le couple : ils s’établissent dans l’Héraut et, en février 2019, Frédéric prend ses fonctions à Santenay. Il fera la navette. « Mon fils a connu 7 déménagements en 10 ans, s’établir était devenu important. »

Le casino Joa de Santenay ? « C’est un casino petit en taille, mais très convivial et parmi les mieux classés en termes de PBJ (le Produit Brut des Jeux correspond aux mises des joueurs moins ce qui leur est reversé, NDRL). »

Pourtant, on peut le dire, l’année 2019 fut une année compliquée pour Monsieur Mousset. L’un après l’autre, ses parents tombent malades : « J’ai commencé le 1er février au casino et les problèmes de santé sont arrivés dès le 12. » Conjuguer ses nouvelles prises de fonction et les épreuves familiales est lourd, même si Frédéric, toujours professionnel, ne relâche pas ses efforts. Il s’est même entendu dire « prenez votre voiture et partez voir votre papa ».

« Ça s’est très vite enchaîné : le 31 mai, ma mère décédait, mon père a suivi en juillet. »

Le Covid s’impose en 2020 et paralyse toute activité économique. Mais la reprise sera éclatante.

Alors d’où vient cette ardeur ? « Je me bats d’abord pour mon personnel, l’esprit d’équipe, toujours. Ma force vient sans doute du fait que je suis proche des gens. J’aime les imprévus, les contacts. Un côté convivial, peut-être campagnard aussi ? Deux à trois fois par mois, nous organisons au casino de Santenay un repas avec l’équipe et les clients carte club. Nous nous connaissons bien. Nous créons une proximité avec la juste distance. »

Prochain challenge ? « Ça se présente comme ça, il faut que le challenge me plaise. On est dans une société où il faut bouger. »

En photo, Jacqueline et « son » sauveur

Oui, c’est ainsi qu’elle le nomme. Un jour que Jacqueline jouait aux machines à sous, elle est soudain victime d’un malaise. Elle essaie de rassurer F. Mousset, le dissuade d’appeler les secours avec des « ça va mieux ». Heureusement que le directeur ne l’a pas entendu de cette oreille : les médecins interviennent à temps, laissant entendre que l’issue aurait pu être terrible.

Frédéric Mousset a coutume de dire « J’ai une bonne étoile au-dessus de ma tête, partout où je suis passé, j’ai eu de très belles expériences. » On a envie d’ajouter que cette étoile se double d’une qualité rare : une attention vraie aux gens, employés comme clients.

Par Nathalie DUNAND
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