Chalon /autour de Chalon

L’étoile de Gérard Darmon a plus longtemps lui à Chalon, en y jouant cartes sur table…

L’étoile de Gérard Darmon a plus longtemps lui à Chalon, en y jouant cartes sur table…

Pour une fois l’alerte rire n’était pas le maître incontesté des Théâtrales. Pas complètement mis sous l’éteignoir, il s’en faut, mais au cours de la pièce « Un château de cartes » signée par Hadrien Raccah a-t-il été supplanté par un climat ambiant faisant la part belle à la douleur mentale ce dimanche après-midi 23 février …

Le cocufiage comme un cheveu dans la soupe

Tandis qu’en dehors de l’Espace des Arts la cavalcade de la 104ème version du Carnaval de Chalon-sur-Saône battait son plein, entre notamment pluie de confettis et flonflons, dans le temple de la culture c’était une autre histoire. Oui, une tout autre histoire. De fous. Encore fallait-il ne pas en perdre le fil, eu égard au fait qu’elle passait du coq à l’âne. Dans un premier temps la jalousie maladive du mari soupçonneux (Gérard Darmon, alias Adam), à l’endroit de sa chère et tendre dont il est fou amoureux (Isabelle Gélinas, Caroline de son nom de scène) introduisait le sujet en ménageant le suspense. Lorsque, dans des circonstances complètement irrationnelles, un troisième larron (Vincent, mais Serge Postigo dans la vraie vie) vint semer le trouble en endossant le rôle de l’amant, lui qui était censé être le meilleur ami d’Adam…Du classique. En apparence seulement…

Malade inconsolable

Vis-à-vis de cette épouse qu’il chérit tant et plus, Adam est en permanence entravé par la peur de la malheureuse, autant qu’irrémédiable, privation. Monomaniaque à coup sûr, il souffre dans sa chair, tout tournant autour de cette obsession incontrôlable. En se succédant, les scènes délirantes, alors qu’au premier abord elles ne semblaient pas l’être, ont progressivement amené le public à y voir plus clair dans ce méli-mélo émotionnel. A quel prix cependant ! Rongé à vie par la culpabilité, car se sentant coupable –indirectement- de la disparition accidentelle de sa moitié quelques années auparavant. Balayant d’un revers de la main dans le cas présent  l’aspect fictionnel, pour ne retenir que la réalité tangible…Et le pauvre de s’en mordre les doigts, de le payer au prix fort sous la forme d’un violent chamboule-tout…

Une détresse ostensible, semblant tellement naturelle…

Disons-le tout de go : Gérard Darmon campe à l’intérieur de ce drame psychologique un personnage en perdition avec une justesse, une finesse, une faculté à convaincre, simplement prodigieuses. La transcendance a été sa petite amie, qu’il a prise de bout en bout par la main, davantage encore à partir du moment où la situation est devenue carrément bouteille à l’encre. S’agissant des nuances de-ci de-là, elles aussi ont pris parti pour la plausibilité de la trame. Visiblement ému lors du salut -on ne personnifie pas le calvaire et l’affliction sans un certain retour de bâton-Gérard Darmon aura été l’objet d’une longue ovation debout, laquelle n’excluait évidemment pas ses compagnons de jeu, obligatoirement pour quelque chose dans le succès populaire de cette pièce vraiment à l’écart des autres. Dur de recouvrer ensuite totalement ses esprits…

                                                                                                                Michel Poiriault

                                                                                                                [email protected]