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Jean-Paul Cara a mal à sa France à cause du verdict de l’Eurovision

Jean-Paul Cara a mal à sa France à cause du verdict de l’Eurovision

Groggy debout, Il accuse sérieusement le coup, lui qui en compagnie de Joe Gracy a su faire de « L’oiseau et l’enfant » interprété par Marie Myriam en 1977 une étoile de la chanson française accrochée à tout jamais au firmament du Concours Eurovision de la chanson. C’était la dernière des cinq victoires du pays. La dernière édition en date –samedi soir à Copenhague- a fait toucher le fond à nos représentants. Une vision cauchemardesque qu’il déplore amèrement. Touché. Pas coulé toutefois ! L’espoir en des jours meilleurs renaît sous les cendres encore fumantes…

Présence, voix, émotion

« J’avais trouvé le trio gagnant : Pays-Bas, Autriche, Suède. Il faut reconnaître que l’Autrichien était également original et qu’il a chanté divinement bien. Il y avait de la mélodie, j’ai beaucoup, beaucoup apprécié », a constaté l’auteur-compositeur, auteur en 1976 du titre « 1, 2, 3 » chanté par Catherine Ferry,  laquelle devait échouer au pied de la première marche du Concours Eurovision, coauteur (avec Joe Gracy) de la chanson « Humanahum » défendue par Jean Gabilou en 1981, cette fois en 3ème position de l’Eurovision. Pour quelles raisons l’Autriche a-t-elle réussi dans son entreprise ? « Elle a gagné car il y avait une présence, une voix, une émotion. Ca va au cœur des gens. Là où je suis heureux, c’est que cette année les trois premiers l’ont emporté avec des chansons. Les jurés des autres pays ont la tradition des textes», a-t-il analysé.

 

 

Il y aurait à l’entendre pourtant de quoi pavoiser si d’aventure toutes les forces étaient jetées dans la bataille

Ecorché vif, Jean-Paul se perd en conjectures devant le pitoyable score français (la dernière place, avec 2 points) tout en ne prenant pas de gants pour signifier courroux et désappointement. « J’ai mal à mon pays, car on a pourtant de super auteurs-compositeurs, des voix fabuleuses. Je ne comprends pas bien, c’est la honte ! On a été minables ! J’ai l’impression qu’il n’y a pas l’amour du pays.» Un éclaircissement ? « Ce qui m’a gêné, c’est qu’il y a du Stromae dedans, du Jordy, il y a un mélange de tout. Toute la France ne croyait d’ailleurs pas en la chanson. La France, c’est la mélodie, la chanson, le romantisme, l’esprit latin, la création ... On ne fait pas appel aux auteurs-compositeurs. On a perdu de vue que c’est un Concours Eurovision de la chanson. Sincèrement, les gens n’y croient plus» Nullement homme à se laisser abattre longuement par l’adversité, Jean-Paul Cara fulmine contre une espèce de gâchis. «En France on a énormément de talents, je le vois partout. On ne leur donne pas leur chance, alors ils se découragent. Les programmateurs de radio suivent les modes, il est anormal qu’on ne les passe pas. Aux jeunes qui veulent faire de la chanson, je pose la question : pourquoi vouloir chanter ? Ils me répondent : pour devenir star et gagner de l’argent ! »

Que le public soit souverain

Un coup de griffe par-ci (« Depuis qu’il n’y a plus d’orchestre, l’Eurovision, c’est devenu n’importe quoi »), un autre par-là (« C’est triste à dire, mais en Allemagne, aux Pays-Bas, par exemple, quand ça marche bien, on aide les gens. Avec Marie Myriam, on disait de nous en France : ils vont se casser la gueule !), et l’artiste repart de l’avant.  A quelque chose malheur est bon. « J’ai bon espoir que ça fasse réagir en France les gens qui décident pour l’Eurovision. Il faut aller plus loin. Quand on tombe, on se relève. Maintenant, il n’y a plus rien, ça va à vau-l’eau, ça va tomber à l’eau. » Ce qu’il aimerait fortement, c’est qu’il y ait véritablement une note du public, gage de vérité absolue. « Le public, pour moi, c’est lui qui a un talent, qui nous met là. Auparavant, un jury sélectionnait. Là, ça dépend des personnes qui nous dirigent à France Télévisions. Ceux qui nous choisissent sont des marchands de blue-jeans. Mais la France, c’est Trenet, Aznavour…Je souhaite qu’ils ouvrent grand leurs oreilles.» Et si carte blanche lui était donnée pour redorer le blason national ? « Je ferais appel aux gens de ce métier. Il y aurait une présélection des auteurs-compositeurs, interprètes, pour arriver à quatorze, quinze ou seize. Puis, lors d’une émission, les gens voteraient régulièrement pour les 1/4de finale, les ½ finales, et enfin pour la finale. Alors là, je crois qu’on aurait des résultats. » Une idée à creuser ?

                                                                                               Michel Poiriault