Faits divers
TRIBUNAL DE CHALON - « Il méritait un peu plus d’humanité, ce monsieur »
Par Florence Saint-Arroman
Publié le 16 Mars 2022 à 08h31
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Cet homme-là, qui comparaît dans le box, à l’audience des CI*, ce lundi 14 mars, cet homme-là a « une terreur » : « Que mon fils me soit enlevé, qu’il aille en institution où il serait maltraité. » Le fils est autiste. Le père fut, lui, retiré à sa famille à l’âge de 6 ans, puis placé.
Voilà comment la situation plutôt catastrophique, pour chaque membre de cette famille, que les gendarmes ont mis à jour quand la mère les a appelés, le 9 mars dernier, s’est construite, petit à petit, année après année. La mère avait fini par vivre recluse avec son fils âgé de 15 ans. Sans la moindre aide extérieure, elle était à bout. A bout de forces. Le père avait pris ses quartiers à l’étage du dessous. Elle se négligeait, négligeait la maison. C’est pas le tout de se cloîtrer, il fallait quand même supporter ce que fils aux comportements si déroutants et si difficiles parfois à accueillir leur fait vivre. Le père ne le pouvait définitivement plus. « C’est devenu invivable, en fait. »
« J’ai perdu pied, j’ai perdu pied »
Pour autant il persistait à interdire à sa compagne d’aller chercher l’aide dont ils avaient cependant tous besoin. De colères en accès violents, la peur a pris le dessus. Elle a appelé les gendarmes. Ils sont venus. Le père est jugé pour violence sans incapacité sur conjoint et harcèlement (2020, 2021, jusqu’en mars 2022). Il est jugé pour ça mais la victime est absente. Il est jugé pour ça mais on plonge au cœur d’une situation familiale et sociale si douloureuse et complexe qu’on a du mal à y voir clair. « J’ai perdu pied, j’ai perdu pied », répète ce maçon âgé de 48 ans. Il dit des choses très sensées, y compris quand il fait le lien avec sa propre enfance.
« L’année dernière, j’ai pas su entendre, ni voir. On aurait dû, effectivement… »
Sa compagne et lui se sont connus adolescents. Il vivait une jeunesse à l’arrache, dans le droit fil (qui est un fil torturé) de son enfance arrachée. Elle, elle a ensuite fait sa vie, a eu un fils, aujourd’hui adulte. Puis ils se sont retrouvés, en 2003. Leur relation est déjà vive, si on écoute le prévenu. « On a cru qu’un enfant nous rapprocherait… Hélas, il est autiste. C’est terrible. » Il ajoute, touchant : « J’ai vu la psychologue, ce matin, à la maison d’arrêt. Elle m’a dit : ‘Mais, tous les parents doivent prendre des risques pour leurs enfants !’ Elle a raison, j’y pensais pas. J’ai perdu pied. J’ai été dépassé. L’année dernière, j’ai pas su entendre, ni voir. On aurait dû, effectivement, du fait qu’on avait un manque de confiance dans les services sociaux, aller voir les gendarmes. »
« Vous vous rendez compte jusqu’où ça va ? »
Il reconnaît un climat violent verbalement et quelques colères plus fortes, mais il répète surtout que sa femme et lui avaient convenu d’un commun accord de garder leur fils près d’eux, et qu’en cas de problème, l’un chargerait l’autre, pour que le fils reste avec l’un de ses parents. La présidente Verger ne semble pas convaincue par cette soi-disant stratégie et insiste sur l’état de sa compagne, « il m’insulte, il me menace ». Lui : « On a vécu dans la terreur pendant 10 ans, ça nous a.. » La présidente : « Mais ce n’est pas vous qui avez mis cette chappe sur tout le monde ? Vous vous rendez compte jusqu’où ça va ? » Lui : « J’avais si peur qu’on le mette dans une institution inadaptée que j’en ai oublié l’essentiel. »
« En faisant le choix de la CI on a manqué d’humanité »
Maître Ronfard a rencontré le prévenu juste avant l’audience. C’est comme ça, les comparutions immédiates. L’avocat est furieux, et il le plaide avec énergie et conviction. « En faisant le choix de la CI on a manqué d’humanité. Un dossier comme celui-ci n’a rien à faire en CI, car rien n’y relève de l’évidence. » Thomas Ronfard dénonce l’absence d’enquête, d’investigations plus poussées. « Toutes les questions de cette procédure tournent autour du fils, on n’a rien demandé à monsieur sur les violences physiques (alors que c’est l’objet de l’audience, ndla). Il fallait faire plus que ce qui a été fait. » Il reprend un PV et lit que madame déclare « il m’a tirée par les cheveux », puis plus tard elle raconte autre chose. « Cette cause nationale (les violences conjugales, ndla) nous a fait aller trop vite. »
Cette procédure d’urgence n’est en effet pas adaptée
« On est allé trop vite ! On est juste un dossier, une chambre d’enregistrement. On n’a pas vérifié ce qu’il dit, on n’a rien vérifié. » L’avocat conclut : « Il méritait un peu plus d’humanité, ce monsieur. » De fait, cette famille mérite toute l’humanité. Cette procédure d’urgence, violente, n’est en effet pas adaptée. Il y avait 7 dossiers au rôle ce jeudi, il est impossible de prendre le temps de juger convenablement, car même si le tribunal a pris du temps, ce n’est pas à la mesure de cette situation douloureuse au possible.
« La situation passait sous tous les radars »
La substitut du procureur n’avait évidemment pas raté monsieur sur sa présentation des positions de chacun : lui il travaille comme une bête, et elle, elle se vautre sur le canapé avec son ordinateur. Pourtant il est possible que la situation ait fini par aboutir à ça, et nul ne songerait à accabler cette femme d’être au bout de ses ressources. « C’est la détresse d’une femme, qui est venue nous chercher. Elle vivait repliée sur elle-même, sans contact avec l’extérieur. La situation passait sous tous les radars. » Angélique Depetris a requis une peine mixte et aménageable, et l’éloignement de monsieur du domicile.
« J’ai pas de bonnes réactions vis-à-vis du stress, de l’angoisse, tout ça »
Lui : « Finalement je suis content d’être là. Mon fils va trouver quelqu’un pour s’occuper de lui. » Il est très ému. Il poursuit : « Ma compagne, je l’ai toujours aimée, mais on a une relation toxique depuis qu’on est ados. Je l’ai blessée. J’ai pas de bonnes réactions vis-à-vis du stress, de l’angoisse, tout ça. Tout ne se justifie pas, c’est sûr, mais qu’on me laisse une chance de continuer mon entreprise et de pouvoir continuer à subvenir aux besoins de mon fils et de sa mère. »
Sursis probatoire pendant 3 ans, éloignement du domicile familial
Le tribunal le déclare coupable, le condamne à la peine de 12 mois de prison entièrement assortis d’un sursis probatoire pendant 3 ans. Obligation de soins psychologiques et interdiction de contact avec la victime, ainsi que de paraître à son domicile. Il devra lui verser 1 euro (qu’elle a demandé, à titre symbolique) pour son préjudice moral. « Pour voir votre fils, il faudra passer par un tiers. » Lui : « Je remercie le tribunal pour son humanité. »
Les institutions dédiées à l’enfance : il les identifie à des lieux de maltraitance
Le petit garçon que le condamné fut, n’a jamais connu son père. Après qu’il a été placé avec sa fratrie, sa mère a fait des misères au beau-père qui les élevait, et celui-ci s’est pendu. L’enfant a connu les institutions dédiées à l’enfance et il les identifie à des lieux de maltraitance. Il est loin d’être le seul. C’est quand même fou que ces questions-là soient si mal posées en France, ou plutôt, que chacun s’en défende au lieu de poser le problème et de regarder ce qui se passe. A croire que tout le monde s’en fiche plus ou moins, des enfants, au fond ? Il ne suffit pas de discourir sur un sujet pour que la réalité coïncide avec le sujet.
Florence Saint-Arroman



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