Faits divers
TRIBUNAL DE CHALON - « La vérité judiciaire qui apparaît à son casier… »
Par Florence SAINT-ARROMAN
Publié le 05 Avril 2022 à 20h48
Le 8 février dernier à 20 heures, un équipage police-secours fonce rue des Lancharres à Chalon. Une femme a subi des violences. Les policiers trouvent l’auteur présumé dans la rue, sirotant une bouteille de Vodka.
L’homme et la femme avaient à l’occasion une relation intime, et puis elle gardait le chien de monsieur quand il s’absentait. Or le 8 février elle se rend au commissariat pour dénoncer des maltraitances sur l’animal. La SPA intervient le jour même. Le soir, monsieur se pointe pour récupérer son chien. La victime dit qu’il est entré chez elle en forçant le passage, lui a demandé où était son chien en la frappant de quelques coups de poing. La victime dit également qu’il lui a jeté une chaise sur le dos, qu’il a arraché un radiateur, qu’il a volé une bouteille de Vodka. Elle lui fait croire que le chien est chez une amie, et propose d’y aller. Elle monte seule chez l’amie, elle appelle la police, il se fait arrêter dans la rue. Elle n’est pas venue à l’audience de comparution immédiate, ce lundi 4 avril, pour réaffirmer ses dires et sa position.
« Elle m’a dit : je ferai tout pour te mettre en taule »
Le prévenu a 30 ans. Il est défavorablement connu des services de police, comme on dit. Il a écrit un texte pour le tribunal. Il aurait pu comparaître librement mais il exécute une peine, il est « détenu pour autre cause », et comparaît dans le box, sous escorte. Tout d’abord il dit « bonjour », puis « ce sont de fausses accusations », « le chien était à jour, j’en ai toujours pris soin », « elle m’a dit : je ferai tout pour te mettre en taule », « le radiateur c’est pas moi », « je l’ai jamais volée », « je l’ai jamais touchée », « on a fumé un joint chez elle », « moi je voulais juste récupérer mon chien ». « Et comment ça se fait que j’ai attendu en bas pendant 40 minutes comme un guignol, avec la bouteille qu’elle m’a donnée ? Sans rien dire, sans monter ? »
Le chien : « ça me fait de la peine »
« Je voulais juste récupérer mon chien, je l’ai eu quand il était bébé, et… - Le chien, c’est pas le débat, monsieur. – Ben oui mais ça me fait de la peine quand même… » Il n’est pas du tout poursuivi pour maltraitances sur animal, allez comprendre : soit il y en a eu, soit pas ? Soit il y en a eu mais c’est impossible à prouver, soit il n’y en a pas eu, et donc la dame a dit et fait des choses graves ? Allez savoir.
Le certificat médical ? « Elle m’a tendu un piège ! Sur le trajet elle n’avait aucune trace. Comment on passe comme ça, du rire aux larmes ? Elle m’a apporté que des problèmes. » A son casier, 12 condamnations. Il vit seul, a deux enfants qu’il ne voit plus « parce que les visites médiatisées se passaient mal » dit la juge, il perçoit des ARE, il a des addictions, il dit qu’il a arrêté la drogue. L’enquêteur social dit qu’un aménagement de peine est possible, que l’incarcération n’est pas nécessaire, qu’il a des projets. Le juge de l’application des peines écrit que monsieur est sous deux mesures de sursis probatoire, que le tribunal peut en révoquer une partie.
« La vérité judiciaire qui apparaît à son casier montre des faits de violence »
Pour Anne-Lise Peron, substitut du procureur, le déroulement des faits penche en défaveur de monsieur, lequel était sorti deux semaines auparavant de prison, lequel avait bu ce soir-là. « La vérité judiciaire qui apparaît à son casier montre des faits de violence ». « Le certificat médical vient objectiver les violences. » La victime a une trace et des griffures à l’a temps, et 1 jour d’ITT. Elle demande une peine de 14 mois de prison dont 4 mois seraient assortis d’un sursis probatoire pendant 2 ans. Elle demande aussi la révocation partielle d’un des deux sursis probatoires qui sont en cours. Il y a 12 condamnations au casier du prévenu pour des délits routiers, des violences, extorsions, outrages, menaces de mort.
« Tout a été manigancé »
« Il y a un doute, dans ce dossier, et le doute doit bénéficier à l’accusé. » Maître Carole Fournier attaque sa plaidoirie par le témoignage de l’amie de la victime. Cette femme dit qu’elle avait accompagné son amie au commissariat pour l’affaire du chien, puis qu’elles sont rentrées « trouver une stratégie pour faire venir monsieur chez elle, pour pouvoir appeler la police » … « Tout a été manigancé » affirme l’avocate. « Si monsieur était l’auteur de violences, il n’aurait pas attendu dans la rue ! Vous n’avez aucune preuve de quoi que ce soit. » Maître Fournier demande une relaxe au bénéfice du doute.
« Elle le savait, que vous alliez pas me croire »
Le prévenu repart en un débit de paroles continu, plaidant son innocence mais anticipant sur sa condamnation, « si c’est ça la justice, vraiment.... ». La présidente le laisse parler. Silence de la salle, et cet homme qui se débat dans le box. « J’ai 5 mois à faire, elle le savait, que vous alliez pas me croire. »
10 mois ferme, mandat de dépôt
Le tribunal (une seule juge pour ce dossier) délibère sur siège. Prononce la relaxe du prévenu pour la dégradation de la fenêtre, le déclare coupable de tout le reste, le condamne à une peine de 9 mois de prison et décerne mandat de dépôt, « au vu de l’état de récidive légale ». Révoque 1 mois d’un des deux sursis probatoires en cours, ordonne l’incarcération immédiate. Dix mois de prison ferme. Voilà.
FSA
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