Chalon sur Saône

Info-chalon.com donne la parole aux travailleurs en temps de guerre virale - Un buraliste témoigne

Info-chalon.com donne la parole aux travailleurs en temps de guerre virale -  Un buraliste témoigne

À bientôt 3 semaines du début du confinement, décrété le mardi 17 mars, où en est le moral des Chalonnais ? En cette période de crise, les commerces autorisés à rester ouverts sont les baromètres de l’état d’esprit de la population. Adam Yilmaz, patron du Chiquito, bureau de tabac-presse situé au 57 avenue Boucicaut à Chalon, livre ses premières impressions.

Depuis le 17 mars, quels changements avez-vous mis en place dans votre commerce ?

A. Y. : Dès le lendemain, nous avons constaté une baisse importante de la clientèle, due à la localisation du magasin, qui drainait une forte clientèle de passage. Mon employé est donc en chômage partiel et j’ai dû modifier mes horaires d’ouverture : le magasin est ouvert le matin, de 7 h 30 à 12 h 30. La clientèle du quartier comprend tout à fait ce nouvel état de choses. Les gens, en général, sont même plus attentifs à mon égard, certains se montrent même attentionnés par des paroles comme « Prenez soin de vous ». Ça me touche beaucoup.

 

Avez-vous mis en place des précautions supplémentaires ?

A. Y. : Oui, bien sûr. Je pense qu’il faut prendre le maximum de précautions pour vaincre le virus. La confédération des buralistes nous envoie des affiches de prévention sanitaire qui rappellent les messages de prévention : distance de sécurité, lavage fréquent des mains, tous ces gestes barrières que chacun doit respecter pour soi et pour les autres. J’ai collé au sol des bandes adhésives pour indiquer ces distances de sécurité de 1 m 50 entre les clients. La confédération nous a annoncé la livraison de vitres plexiglas, gants et gel hydroalcoolique. Ces commandes sont en attente, peut-être les aurons-nous dans 15 jours, peut-être pas. Je comprends qu’en cette période, tout soit difficile pour tout le monde, alors nous attendons.

La FDJ (Française de Jeux) a modifié son annonce sur les écrans : au lieu du montant des gains potentiels, ce sont des messages sanitaires de prévention.  

Et quand le temps le permet, je laisse la porte du magasin ouverte pour éviter au maximum les contacts avec la poignée.

 

La clientèle a-t-elle modifié ses habitudes de consommation ?

A. Y. : Oui, je vends davantage de mots fléchés, mots croisés, magazines et presse en général. Pendant le confinement, les gens ont le temps de lire et de s’occuper paisiblement. De même, la vente de pains en dépôt est en hausse. Avant, je vendais environ 10 pains par jour, et depuis le confinement, c’est plutôt 20 à 25 par jour. Je pense que les gens, soucieux de limiter les risques de propagation du virus, concentrent leurs achats dans un même lieu.

En revanche, les jeux à gratter et les paris ont baissé. Il est vrai que l’activité PMU (les courses hippiques) a totalement cessé.

 

Votre chiffre d’affaires s’en ressent-il ?

A. Y. : Complètement. J’enregistre une baisse générale d’environ 40 %, c’est énorme. Dans le détail, ça se traduit par une baisse de 50 % pour la FDJ, 100 % pour le PMU et 20 % pour le tabac, puisque je n’ai plus la clientèle de passage.

 

Observez-vous un changement dans l’attitude de vos clients ?

A. Y. : Bien sûr, j’ai observé deux changements majeurs dans ma clientèle. D’une part, une tension visible, non à mon égard, mais dans leurs échanges : le ton est plus grave depuis 8 jours. On sent une exaspération croissante contre les incivilités, une méfiance accrue.

Par ailleurs, je le répète parce que ça aussi, c’est important, les gens sont plus attentifs entre eux et envers moi. Certains ont eu des paroles et des gestes pour me témoigner leur reconnaissance. L’un m’a apporté des gants de son garage parce que la veille, il a vu que les miens se sont déchirés ; une infirmière m’a donné 2 ou 3 masques… Ces gestes et ces paroles me touchent beaucoup parce que ça prouve qu’il y a des gens généreux, et je me dis que je ne travaille pas pour rien, que je suis utile à mes clients.  

 

Un dernier mot ?

A. Y. : J’ai envie de dire que nous sommes tous embarqués sur le même bateau. Il faut prendre son mal en patience et respecter les gestes sanitaires. Si on ne le fait pas pour soi, on doit le faire pour respecter les autres. Et on s’en sortira grandi, ce sera mieux après.

Propos recueillis par Nathalie Dunand

[email protected]

 

Le PMU fait savoir que toutes les courses hippiques sont interrompues en France jusqu’à nouvel ordre. Plus aucun pari n’est enregistré. Toutes les informations ici.