Opinion de gauche

Emmanuel Macron vole les slogans de Philippe Poutou…

Hier, au cours de l’unique meeting d’Emmanuel Macron de ce premier tour, à Nanterre, dans une Arena à moitié vide, le président candidat s’est montré au sommet de son art d’usurpateur, faisant preuve d’une démagogie, d’une suffisance, d’une hypocrisie, encore jamais égalées.

Le président-candidat a déroulé son discours comme si rien ne s’était passé au cours des cinq dernières années. Comme si personne n’avait compris le fond des politiques néolibérales qu’il propose, ni observé son penchant réactionnaire sur les questions pudiquement qualifiées de « régaliennes ». Pendant deux heures, il s’est présenté comme un homme neuf, jonglant entre les formules creuses et les affirmations définitives, face à un public conquis, agitant des drapeaux français et européens.

Mais le clou du spectacle c’est lorsque notre « surdoué » de l’imposture, s’est transformé en Tartuffe pour mieux clamer sa flamme envers les causes écologistes, solidaires et mêmes anticapitalistes. Oui, anticapitalistes ! Emmanuel Macron a osé piquer le slogan de Philippe Poutou « Nos vies valent plus que leurs profits », évoquant à mi-mot le scandale des EHPAD Orpéa. Ce qui a suscité une réponse cinglante et amusée de la part du candidat du Nouveau Parti anticapitaliste (NPA) : « Pendant que ses copains les riches volent l’argent public, Macron nous vole nos slogans. Décidément, ces gens osent tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît. ». Bientôt il racontera que son ennemi, c'est la finance ! Ce personnage ne manque vraiment pas d’air.

Mais comme il a rallié à sa cause une bonne partie de la "troupe du PS", il se croit légitime de pouvoir emprunter ce type d’étendard bien gauchiste. On sait jamais, il y en a qui au bout de cinq ans de macronnie croient encore au précepte du « en même temps »…D’ailleurs, hier, aux côtes des grandes figures du gouvernement, se trouvaient en bonne place, au premier rang, les Valls, Rebsamen, Guigou, Delanoë, Marisol Touraine. Des has been qui tentent de surnager dans le naufrage de leur génération ! Pathétiques ! Ridicules !  Hantés par un opportunisme compulsif, ils n’ont plus aucun scrupule à étreindre ceux qu’ils ont combattus pendant plusieurs décennies et à épouser leurs idées conservatrices. Le grand philosophe Jacques Dutronc l'avait chanté dans « L'opportuniste » qui a la grande souplesse de retourner sa veste toujours du bon côté. Allez à la soupe ! Fermez le ban !

Face à ce champ de ruine où l’on ne compte plus les trahisons, les reniements, les ralliements, à droite et à l’extrême droite, au PS, le paysage politique se trouve dévasté, où la plupart des repères ont été détruits. Emmanuel Macron est le principal précurseur de cette désolation, jouant tout au long de son quinquennat avec les peurs qui ont attisé les haines, les exclusions, faisant preuve d’un autoritarisme décomplexé pour réprimer les contestations. Il s’est évertué, à l’horizon de cette élection présidentielle, à entretenir ce duel avec Marine Lepen, en alimentant inlassablement toutes les polémiques qui gravitent autour de l’identité, le séparatisme, l’islamisme, l’immigration, l’insécurité, pour mieux se présenter comme le seul rempart à cet insoutenable extrémisme. La ficelle est un peu grosse, l'arnaque déjà bien connue.

Le deuxième tour Macron/Le Pen qui se profile sera donc un deuxième tour entre deux visions rétrogrades et conservatrices, car c'est bien de ce côté-là qu'il faut classer un chef d’état, autocrate, qui a engendré une paralysie sociale historique (le mouvement des gilets jaunes), conséquence de l'injustice et de la violence de sa politique qui méprisait les plus faibles. Le mécontentement populaire a été châtié avec une violence rare, laissant maintes personnes éborgnées, estropiées. Impardonnable. On n'en finirait pas de faire le bilan catastrophique pour la démocratie d'un individu qui a protégé sans vergogne les Benalla, Darmanin, Dupont-Moretti, Sarkozy, Solère, gouverné seul, au mépris de son propre gouvernement, des représentants du peuple, sous les conseils de cabinets américains qui ont coûté un pognon de dingue ! Par-dessus tout, de l'arrogance, de la suffisance, des mensonges, caractéristiques de toute tyrannie, un manque total de scrupules et de sincérité.

Alors oui il est difficile de faire la part des choses, de choisir entre un roitelet tout-puissant aux accents bonapartistes et une bourgeoise xénophobe, groupie du grand rouquin Donald. Alors oui, si Emmanuel Macron se retrouve au deuxième tour face à Marine Le Pen, sa légitimité à réclamer un front républicain sera nulle.

Face à ce désastre annoncé, il nous faut préparer des lendemains de lutte et d'espoir, construire une grande force anticapitaliste qui combattra toutes les oppressions, toutes les agressions qui veulent anéantir les dernières solidarités qui persistent dans notre société héritière des grandes avancées du Front Populaire et de mai 68, reconquérir d'anciens droits pour en conquérir d'autres qui nous paraissent légitimes (partage du temps de travail, partage des richesses, socialisation des grandes entreprises...)

Philippe Poutou et le NPA, en toute humilité, veulent porter cet espoir durant cette campagne présidentielle. Ils ont besoin de votre soutien, de votre enthousiasme pour montrer que tout est encore possible, même si l'on sait parfaitement que ce ne sont pas les élections qui vont profondément changer le cours des choses, mais la pression sociale, les mouvements populaires, la rue.

Nos vies, ne valent pas leurs profits !

 


Jean-Guy Trintignac NPA 71.