Agglomération chalonnaise

À l'approche du printemps, n'attendez pas pour lutter contre le frelon asiatique !

À l'approche du printemps, n'attendez pas pour lutter contre le frelon asiatique !

Samedi 18 février, une vingtaine de personnes de Givry et des alentours, dont une poignée d'apiculteurs amateurs, ont assisté à l'ancienne gare à une réunion d'information tenue à la demande de la mairie de Givry, représentée par Jean-Pascal Lebrat, lui-même ayant quelques ruches dans son jardin du centre-bourg.

Arrivé dans le sud-ouest de la France par l'importation d'une poterie au début des années 2000, ce prédateur s'est littéralement senti pousser des ailes et cause depuis un véritable génocide chez les abeilles de toute l'Europe.

 

Un peu plus de deux heures ont été nécessaires à Franck Calvo, technicien sanitaire du Groupement de Défense Sanitaire Apicole (GDSA) 71, et à M. Dubois, pratiquant également en amateur à Mellecey et commissaire aux comptes du GDSA, pour passer en revue l'ensemble des éléments à savoir sur Vespa velutina nigrithorax, le nom scientifique du frelon asiatique.

Au programme, le mode de vie de l'insecte, ses besoins, ses techniques de chasse, et les moyens pour enrayer le fléau.

« Connais ton ennemi… » (Sun Tzu, L'Art de la guerre)
Sa biologie, d'abord : de la même famille que les guêpes et abeilles, il se différencie de son cousin européen Vespa crabro par sa taille plus réduite mais surtout par sa tête et son thorax noirs, sa face et ses pattes jaunes et son abdomen noir avec une large bande orangée. Et dispose, contrairement à nos chères butineuses, d'un dard de 6 mm, rétractable à l'envi.

Concernant son mode de vie, il s'organise sur un cycle d'un an : la fondatrice d'une colonie, qui a survécu à l'hiver en se cachant ailleurs que dans le nid de l'année passée, soit dans un mur ou sous un tas de bois, part à la recherche de sucre (nectar, fruits) pour se refaire une santé, d'autant plus que certaines cultures sont déjà en fleurs depuis plusieurs semaines.

Elle construit en parallèle un nid primaire pour y pondre et accueillir les ouvrières, qui sont opérationnelles au bout d'un mois pour créer un nid secondaire. Intervient le moment de la reproduction au plus fort de l'été. Enfin, l'automne finissant est synonyme de mort des ouvrières et des mâles, ne reste qu'une nouvelle reine pour répéter ce cycle… quand il n'en reste pas plusieurs, comme cela a pu être découvert grâce à la miniaturisation.

Désormais présent en altitude et dans des îles de Bretagne de par des hivers de plus en plus cléments, le frelon asiatique bâtit en général son nid dans les arbres et en seulement 10 jours à partir d'un mortier de salive et de cellulose. Signe distinctif, la sortie est sur le côté alors que l'européen place la sortie en bas.

Et si le primaire fait à peine 10-15 cm de diamètre, le secondaire passe à 40 cm ! Ceux-ci sont vides en ce moment, aucun risque donc pour les décrocher durant ce mois de mars : vulnérable car très occupée, chaque fondatrice de prise est un nid en moins. Mais ce ne sera pas la même histoire à partir d'avril…

Répit l'hiver, carnage l'été
Car si la fondatrice et les ouvrières ont besoin de sucre pour travailler, le couvain demande des protéines carnées jusqu'au mois de novembre, et cet éco-terroriste sans foi, ni loi, ni prédateur (hormis quelques oiseaux) est sans pitié avec guêpes et abeilles tant en Europe (4 à 5000 espèces) qu'en Afrique et aux Amériques, puisqu'il se jette comme un vorace sur ses proies pour ne manger que l'abdomen et laisser la tête. Tel le film La Grande Bouffe, pourquoi s'embêter quand la nourriture est à profusion et qu'on sait sa propre fin proche ?

Au départ, le frelon prélève au sol des abeilles mortes ou faibles avant d'attaquer plus fréquemment en vol stationnaire devant la ruche, ce dont les abeilles sont incapables. Lorsqu'un frelon attaque seul, les abeilles se défendent et lui font passer un sale quart d'heure. S'il a survécu, il lui suffit de rameuter ses frères d'armes pour forcer l'entrée de la ruche et arracher la tête de la reine, voire piller les réserves.

Si les abeilles se barricadent, qu'importe, les agresseurs en bande organisée se placent sous la ruche pour bourdonner bruyamment et faire monter le stress des abeilles, lesquelles n'osent plus sortir et ne nourrissent plus la colonie, qui s'affaiblit et périclite. Et avec l'excellente arrière-saison 2022, les ruchers sont décimés.

Certains supposent que, contrairement à Apis cerana, Apis mellifera ne sait pas se défendre car trop domestiquée par l'homme, et parce que les gros professionnels ayant accès à des moyens de fécondation artificielle auraient sélectionné des souches productives et non agressives. Il se pourrait par ailleurs que le frelon soit attiré par les phéromones des abeilles, fonctionne pareillement en communiquant les lieux d'approvisionnement et garde ceux-ci en mémoire.

Aux armes, citoyens écologistes !
La lutte contre le frelon s'articule entre une stratégie défensive de protection des abeilles et sur une stratégie offensive de chasse au prédateur, que certains ne veulent pas totale au nom de l'écologie, bien qu'une éradication en Europe ne vaudrait pas une extinction mondiale et que le continent a très bien vécu jusqu'ici en son absence.

Malheureusement, la filière pèse 1% de l'agriculture et les ravages du frelon asiatique ne semblent pas être la priorité pour l'État, qui parle pourtant sans arrêt de protection de la biodiversité et du rôle de pollinisatrices des abeilles. Il aurait été plus facile de traiter un territoire circonscrit à la Gironde il y a vingt ans, mais comme la grenouille s'accoutumant néfastement à la casserole d'eau qui bout, la situation est devenue hors de contrôle.

La protection des ruchers repose donc un peu sur le système D. Des grilles anti-frelons existent, tout comme des plateaux anti-varroa, aux ouvertures plus petites, mais qui n'empêche pas le vol stationnaire stressant et même la prédation pendant la récolte des rayons, en présence de l'homme. Quant à une sorte de moustiquaire entre la ruche et les fleurs, oubliez, le cercle de cueillette des abeilles va de 800 m à 3 km. Au vu de diverses vidéos sur Youtube, les poules semblent cependant faire de bonnes défenseuses.

Avant de faire venir un spécialiste pour détruire le nid, assurez-vous d'en avoir repéré un malgré la végétation qui obstrue souvent la vue. Si la concentration de frelons est élevée, le nid n'est pas loin, mais si vous n'en avez pas vu l'année précédente, ne les attirez pas pour autant avec un piège odorant !

Pour le piège, rien de plus simple : un tiers de bière, un tiers de sirop genre grenadine, et un tiers de vin blanc, qui est un répulsif pour les abeilles et évite de les intoxiquer inutilement. À l'automne, privilégiez les résidus protéinés (déchets de poisson, viande, crustacés). Adaptez bien sûr la recette selon vos expériences sur le terrain.

Autre solution chimique, un coup de bombe contre le nid primaire, que l'on mettra sans attendre dans un sac plastique hermétiquement fermé car les produits ne pénètrent pas jusqu'au fond et certaines larves peuvent éclore plus d'une semaine après. Les pesticides sur les cultures sont par contre inutiles puisque le frelon ne butine pas. Fonctionnent également la raquette et la harpe électriques, malgré le coût de cette dernière, en plus de la batterie et du panneau solaire nécessaires.

Vient enfin la destruction du nid, le plus souvent de type secondaire. Ne tentez pas le diable ni les milliers d'individus à l'agressivité maximale en voulant en décrocher un vous-même en plein été ! C'est un travail de spécialiste III, qui interviendra en priorité tard le soir ou au petit matin, lorsque tous les individus seront rentrés au bercail. Le GDSA étant en relation avec chaque mairie, c'est à cette dernière que vous devez vous adresser.

Qu'il s'agisse d'un prestataire privé ou des pompiers (parfaitement habilités pour l'exercice), le prix d'une intervention dépendra notamment du matériel nécessaire (drone, nacelle, etc. — n'acceptez pas les solutions flashball avec insecticide car elles manquent de précision). Vous n'aurez cependant rien à payer car les départements disposent d'un budget spécifique, parfois vite dépassé mais qui permet des interventions gratuites pour les particuliers.