Chalon sur Saône
Lutte contre le narcotrafic : «Le trafic local existe au travers de quelques groupes criminels bien identifiés par les enquête» assure Patrice Guigon
Par Florence SAINT-ARROMAN
Publié le 19 Mars 2025 à 07h33

Patrice Guigon, procureur de la République, chef du parquet du Tribunal judiciaire de Chalon-sur-Saône, est intervenu lors de la conférence initiée par le sénateur Jérôme Durain sur le thème de la lutte contre le narcotrafic. «Un exercice assez inédit» pour le magistrat, «mais le Garde des Sceaux a fixé comme priorité la lutte contre le narcotrafic».
Le mot de « narcotrafic » n’est pas un terme juridique. Le milieu judiciaire parle d’infractions à la législation sur les stupéfiants.
Le procureur de la République fait un point rapide sur la situation dans le ressort du TJ de Chalon (soit les deux-tiers du département de Saône-et-Loire)
Ce qui favorise « la logistique des trafiquants »
Particularité qui compte : le territoire est traversé par deux grands axes de circulation, l’A6 et l’A39 (dont on entend régulièrement parler à la faveur des saisies de stupéfiants par les douanes, ndla). Ces axes autoroutiers « favorisent la logistique des trafiquants ».
Sur l’arrondissement de Chalon, « on trouve encore des points de deal, mais aujourd’hui les dealers font beaucoup de livraisons ».
Les villes de Montceau-les-Mines, Le Creusot, et Chalon-sur-Saône, forment « un triangle qui attire les consommateurs de Saône-et-Loire et du sud de la Côte d’Or ».
« La violence est prégnante »
Le ressort du TJ de Chalon « ne connaît pas encore l’escalade dont a parlé le sénateur Durain. Dans le Doubs et en Côte d’Or il y a eu des règlements de compte violents, et on a connu en 2019 au Creusot des règlements de compte par arme à feu, mais depuis on semble épargnés. »
« Pour autant, poursuit Patrice Guigon, la violence est prégnante, et l’usage d’armes blanches (type couteaux, ndla) est régulier. »
« Le trafic local existe au travers de quelques groupes criminels bien identifiés »
« Le trafic local existe au travers de quelques groupes criminels bien identifiés par les services d’enquête. Ces groupes sont parfaitement rôdés aux techniques d’investigation des enquêteurs. Ils utilisent des messageries cryptées, ils sous traitent les vols de véhicules (dont ils ont besoin pour commettre des délits), ils utilisent des brouilleurs de balises, ils opèrent des replis dans des zones rurales pour transformer ou stocker les produits, ils ont recours aux plateformes pour recruter leur main d’œuvre, soit pour tenir des points de deal, soit pour intimider. »
« Le parquet de Chalon compte sept magistrats dont l’un est plus spécifiquement chargé de ces questions, en lien avec les services d’enquête (mais naturellement ne peut pas, vu la charge de travail, ne faire que ça, précise en incise le procureur). Et quand l’enquête aboutit, alors la réponse pénale est systématique. »
Les procureurs de Chalon ont des contacts réguliers avec le JIRS*.
« Les réponses pénales sont systématiques »
Les réponses pénales se font via des CRPC déférement, ou des comparutions immédiates, ou, s’il y a besoin d’investigations supplémentaires, on ouvre une information judiciaire (l’enquête est alors confiée à un juge d’instruction).
Les peines, en moyenne, sur l’année 2023, vont de 9 mois de prison (pour usage répété), à 18,9 mois de prison pour des trafics mais pour le haut du spectre, les peines sont forcément plus lourdes, se comptent en années de prison (on en donnera deux exemples dans le dernier article sur ce sujet, ndla).
Le procureur fait le même constat que la commission d’enquête sénatoriale : « Mais le trafic se poursuit aussi à l’intérieur des établissements pénitentiaires. Régulièrement on procède à des saisies entre les murs. »
Une préoccupation : ne pas voir les juridictions locales démunies au profit d’un parquet national
Son devoir de réserve interdit au magistrat de commenter le projet de loi actuellement en débat, il appliquera la loi quand elle sera votée, dans l’état où elle le sera, néanmoins le procureur précise ceci :
« L’organisation nationale envisagée est nécessaire mais ne sera pas suffisante car des enquêtes continueront à devoir être gérées au niveau local. Le national ne pourra pas tout absorber. Une de mes inquiétudes, c’est ça : qu’on donne des moyens, oui, mais pas au détriment des juridictions locales. »
Derechef, explosion du trafic de cocaïne
« Il y a dix ans, la saisie d’une tonne de cocaïne, c’était exceptionnel. Aujourd’hui, c’est une affaire courante » a déclaré la procureure générale de Paris au journal Le Monde**.
Le procureur en chef du TJ de Chalon illustre à son tour l’immense alerte que constitue ce nouvel état de fait. Il donne pour exemples : la saisie récente de « 227 kg de cocaïne pure à 80 % » fin février sur l’A6 dans le Jura », et la saisie encore plus récente (le 15 mars) de « 826 kilos de cocaïne dans un ensemble routier, sur l’autoroute A7, dans la Drôme ».
« Il faut pouvoir protéger les techniques qui permettent d’arriver à des résultats »
Le sénateur Durain explique comment la commission a imaginé de protéger les enquêtes sans supprimer le débat contradictoire.
« Il faut pouvoir protéger les techniques qui permettent d’arriver à des résultats, il ne faut pas les éventer. Par contre il faudra toujours d’autres éléments qui viendront conforter ce qu’on a trouvé (et qui seraient, eux, versés à la procédure accessible au mis en cause ou en examen ainsi qu’à son conseil, ndla). »
Le bâtonnier intervient. Il est bon qu’un avocat prenne la parole, puisque les travaux de la commission d’enquête préconisent des mesures qui circonviendraient certains droits de la défense, par exemple au travers du « dossier-coffre » ou « PV distinct ».
« Des avocats qui franchissent la ligne rouge, vous en aurez toujours »
Maître Benoît Diry, bâtonnier de l’Ordre des avocats de Chalon-sur-Saône, constate qu’une telle disposition pourrait « laisser penser que l’exercice des droits de la défense peut être une entrave au but que vous poursuivez (= coincer les têtes de réseau et se donner les moyens de les condamner, ndla).
La profession est questionnée par cette idée-là. Or des avocats qui franchissent la ligne rouge, vous en aurez toujours, de même que vous aurez toujours ici ou là, des policiers, des gendarmes, etc., qui la franchiront. » Bon.
Sur le projet de PV dit « distinct » : « Il faut protéger l’enquête, c’est une nécessité, mais pendant le temps du jugement il faut qu’il y ait un contrôle », en d’autres termes : « Les auxiliaires de justice se feront garants de toutes les procédures, à condition qu’ils le puissent (= qu’on leur en donne les moyens) »
As usual, il faut savoir ce qu’on veut…
… mais quand il faut trouver l’équilibre entre des moyens d’enquête qui leur donnent toutes les chances d’aboutir, et l’effectivité réelle des droits de la défense, alors le montage d’un projet de loi qui doterait les premiers d’une efficacité que les forces de l’ordre réclament depuis longtemps, sans porter atteinte aux seconds (qui sont eux aussi d’intérêt général), alors on se trouve devant un casse-tête, littéralement, et ce n’est pas le moindre mérite des sénateurs Durain et Blanc que de s’y être confrontés.
La France n’est pas un « narco-Etat » mais il est désormais urgent de prendre conscience que cela pourrait arriver si elle ne se donne pas les moyens légaux de réprimer à coup sûr les têtes des différents réseaux qui ont pris le pli de jouer avec le système tel qu’il existe actuellement.
FSA
Un dernier article viendra illustrer au travers d’affaires locales jugées, les différentes facettes de ce milieu, les décisions des tribunaux, et les misères exploitées ainsi que celles que la toxicomanie ne manque pas de provoquer.



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