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Après avoir vécu dans plusieurs pays étrangers, retour aux sources pour Marion Schrotzenberger

Après avoir vécu dans plusieurs pays étrangers, retour aux sources pour Marion Schrotzenberger

Découvrez son parcours à l’occasion de la Journée Internationale des Droits des Femmes.

Marion Schrotzenberger débute sa formation en danse contemporaine au Conservatoire à Rayonnement Régional de Chalon sur Saône, puis à celui de Lyon dans la classe de Françoise Bénet. Elle intègre ensuite la formation « exerce » au Centre chorégraphique de Montpellier sous la direction de Mathilde Monnier. Cette formation lui donne l'occasion de travailler avec des chorégraphes de réputation internationale : Maguy Marin, Mark Tompkins, Odile Duboc, Lisa Nelson…. Sa formation terminée, elle s'installe à Bruxelles. Suite à un travail d'interprète pour Edith Depaule (assistante de Michèle Anne de Mey) le Théâtre de L'l lui propose de créer son premier spectacle : « Arizona » en collaboration avec Ismaël Colombani (musicien compositeur du « groupe Sages comme des Sauvages »). Ils fondent le collectif multidisciplinaire Lookatmekid. Ils s'installent ensuite à l'Île de la Réunion, dont la famille maternelle de Marion est originaire. Elle y développera un travail chorégraphique où danse, théâtre et musique y sont toujours en dialogue. Elle réalise également plusieurs films de danse. Le collectif Lookatmekid mènent de nombreuses résidences de territoire en intégrant des néophytes de toutes générations au sein de leurs créations professionnelles. Sa dernière pièce « Si Pina m'avait demandé » est une auto fiction racontant l'histoire d'une chorégraphe mère célibataire tentant de monter un spectacle autour de l'oeuvre de Pina Bausch. Depuis le mois de janvier Marion est revenue s'installer à Chalon sur Saône et devient la nouvelle responsable programmation et diffusion au Conservatoire du Grand Chalon.

3 questions à Marion Schrotzenberger : 

Que pensez-vous de cette Journée Internationale des Droits des Femmes ? 

J'aime que l'on nomme cette journée « Journée internationale des droits des Femmes » car nous avons plusieurs droits et nous sommes plusieurs femmes. Nous ne vivons pas toutes notre féminité de la même manière. Nous sommes multiples, mère, célibataire, sans enfants, hétéro, lesbienne, jeune, vieille, veuve, mariée, avec ou sans emploi… Et pourtant quelle que soit la femme que nous sommes, nos droits en tant qu'individu, en tant que citoyenne sont souvent remis en cause. Nos droits sont encore précaires. Particulièrement lorsqu'une femme traverse une situation particulière (grossesse, IVG, divorce, recherche d'emploi...) Une femme doit encore aujourd'hui prouver sa crédibilité, ses choix, ses envies, ses besoins… Alors oui, nous nous en sortons souvent bien, et la tête haute mais la force que nous réussissons à développer malgré les embûches ne doit pas être une excuse pour ne pas faire évoluer nos droits de façon encore plus forte. De plus, je suis mère de deux filles et cette journée est pour moi l'occasion de leur rappeler leur valeur, leur spécificité, leurs droits. J'espère qu'elles auront accès aux droits dont profite ma génération et à ceux que nous n'avons pas encore. J'espère qu'elles seront fières de leur genre et de la force que nous avons en nous ; qu'elles grandiront et s'émanciperont dans un monde où femmes et hommes arrivent à dialoguer, à coopérer pour les droits de chacun. 

Professionnellement et personnellement, quels impacts a eu la crise sanitaire de la Covid 19 ?

Je vivais à l'Ile de la Réunion lors du premier confinement. J'étais avec mes deux filles, je débutais à peine une création. Ce fut assez violent d'être soudainement coupé du monde sans pouvoir travailler. Avec toute l'inquiétude financière qui allait avec. Puis très vite parce que la pratique artistique quand elle est notre métier est une nécessité, j'ai commencé avec mes filles un travail photographique autour de la danse. Il fallait rester créatif tous les jours au même endroit et dans une disponibilité totale pour mes deux enfants. Faire de cet arrêt général un temps créatif, un temps positif pour que les enfants continuent tout de même à s’épanouir. Nombreux de mes amis artistes ont eu de grandes difficultés pour ensuite mettre leurs projets en place, pour poser leurs représentations, cette situation a un peu plus créé des écarts entre des petites compagnies et des compagnies soutenues, entre artistes intermittents ou non... L'impact de cette crise a encore un réel écho dans la profession artistique. La précarité de nos métiers et particulièrement pour les femmes artistes a été augmentée. Néanmoins, ces confinements ont démontré à quel point la pratique artistique était nécessaire pour l'épanouissement général de toutes personnes, l'accès à la culture comme un droit, les espaces créatifs primordiaux pour la construction du bien être ensemble de nos sociétés. Dans de nombreux quartiers ou structures (hôpitaux, prisons, maisons de quartier) l'absence forcée des artistes a eu un réel impact négatif dans les vies des gens. Chacun a le droit à une vie poétique comme acteur ou spectateur de l'art. Ce n'est pas accessoire, ce n'est pas un plus mais bien une nécessité.

Quelle est votre actualité ou quels sont les objectifs à venir ?

Mon actualité, c'est cette prise de poste au CRR (Conservatoire à Rayonnement Régional du Grand Chalon) en tant que chargée de diffusion au sein d'une magnifique équipe. Je suis ravie de qu'on me donne la chance de l'exercer.  C'est une suite dans mon parcours, je viens du terrain et en tant que chorégraphe, j'ai conscience des difficultés de créer et de se produire. Je pense qu'une salle de spectacle est avant tout un lieu de rencontres et de découvertes et non de chiffre ou de pouvoir. Une scène, c'est avant tout un lieu d'expression qui se doit d'accueillir une « parole » diversifiée. C'est également le lieu de découvertes, de surprises, de dialogue, de débat. J'espère répondre au plus près aux besoins des artistes et à une diversité dans la programmation pour les spectateurs.  Programmer, c'est aussi transmettre, pour les élèves du conservatoire, c'est une chance inouïe d'avoir accès à des oeuvres au sein du CRR. C'est également l'occasion de participer à la mise en valeur des femmes. Trop peu d'artistes féminines sont produites et diffusées. J'espère pouvoir contribuer à leur développement artistique et à la mise en valeur de leur travail.

Propos recueillis par SBR - Photo : SBR