Givry

TRIBUNAL DE CHALON - Le fin mot de l'histoire des blessures par couteau à Givry

TRIBUNAL DE CHALON - Le fin mot de l'histoire des blessures par couteau à Givry

Le 31 mai à 1h50, les gendarmes se sont déplacés rue de la République à Givry. On les appelait pour une rixe, la rixe était finie. Un homme était allongé sur un canapé, blessé de derrière l’oreille gauche jusqu’au milieu de la joue. Il faudra cinq points de sutures. Qui, pourquoi ? Un homme de nationalité algérienne âgé de 33 ans est jugé ce mardi 2 juin 2020 en comparution immédiate.

L’auteur (il reconnaît son geste) vit à Strasbourg. La victime, elle, se déclare sous des identités différentes aux gendarmes, des nationalités différentes également. « Il est algérien, affirme le prévenu, pas palestinien. » Difficile de s’y retrouver, y compris, dit le président Dufour, avec l’aide des témoignages car ils sont si différents « qu’on a l’impression que ces gens n’assistaient pas à la même soirée ».

 

Il défendait son frère, dit-il

 

Ils se connaissaient tous. Il est question d’alcool, ils avaient tous bu, « complètement bourrés » dit le prévenu. Il dit aussi qu’un des hommes, bouteille et verre en main, menaçait son frère, « je vais te tuer ». Le prévenu aperçoit alors un tesson de bouteille au sol et atteint une tête. « Je voulais défendre mon frère, mais je ne visais personne. »

Le blessé remonte en courant chez lui. L’auteur du coup et son frère filent en voiture. Mais un dénommé H. les rappelle, les menace de mort, « il disait je vais tuer ta mère, ta sœur, ton frère, etc. » Que font les frères ? Hop, demi-tour, ils retournent sur les lieux. Pourquoi ? voudrait opportunément savoir le président Dufour. « Pour savoir pourquoi il menaçait sa mère, sa sœur. » (Elles vivent à chalon)

 

Didier l’embrouille habite ce dossier

 

Le président ne comprend pas bien quel était le problème « à la base ». Nous, de notre place, nous ne comprenons rien, si ce n’est que Didier l’embrouille et toute sa famille ne sont pas une exception française. Les versions de la victime et du prévenu diffèrent, évidemment.

On entend son frère J., « audition... euh.., ses propos sont un peu confus », précise le président, qui en résume le contenu pour les juges assesseurs. « Si vous vous sentiez en danger, je ne vois pas pourquoi vous êtes revenus », insiste le président.

La victime aux identités et nationalités variables n’est pas présente à l’audience, ni représentée, mais, étonnamment, se constitue partie civile et demande un renvoi sur intérêt civil.

 

« Je m’excuse et vraiment je regrette »

 

« Réellement, je regrette et je m’excuse pour la victime que je n’ai pas visée en personne. Juste à cause de l’alcool, et bourré, pour défendre mon frère, c’est pour ça. » Le prévenu n’a pas de casier judiciaire en France. Il a déposé une demande d’asile à Strasbourg, il était venu voir sa sœur et sa mère à Chalon mais le confinement l’a maintenu ici. Il est arrivé en France en juillet 2019. Pourquoi ? « J’ai reçu des menaces en Algérie, parce que je suis le fils d’un commandant des forces spéciales assassiné en 1994, et moi aussi j’ai été combattant de 2007 à 2012. »

Il dit avoir un bac littéraire, puis s’est engagé 5 ans dans la marine, où il a passé un diplôme de mécanicien bateau. « Bon, l’alcool, vous en consommez, parce que vu la soirée..., hein.
- Juste les week-ends. Je m’excuse, et vraiment je regrette, monsieur. »

 

Une histoire en vrac, trop de récits et de versions

 

Christel Diez, substitut du procureur, se lance courageusement dans le récit de la soirée, en spécifiant toutefois que l’exercice n’a rien d’aisé. En tout état de cause le prévenu a lui aussi donné des versions différentes. La procureur s’en tient aux faits objectifs, observe que la blessure est plus impressionnante que grave. Requiert 8 mois intégralement assortis d’un sursis probatoire et interdiction de contact avec la victime.

 

« Une victime qui n’a pas le nez propre », « un dossier nébuleux »

 

Maître Marceau, lui, a « du mal avec une prévention de violence en réunion alors qu’il n’y a qu’un seul prévenu », il a également du mal avec « une victime qui souffle sur les braises pendant au moins 15 minutes », « une victime qui n’a pas le nez propre, qui se trompe volontairement sur son identité ». Son client est jugé, « parce que c’est sans doute le plus honnête ». « Un dossier nébuleux, et finalement qui fera plus de mal que de bien parce que la préfecture est très attentive au parcours des demandeurs d’asile. Il se retrouve mêlé à une bagarre pour défendre son frère, et compromet son avenir, d’autant qu’il est débrouillard et était capable de s’en sortir. Maintenant c’est foutu pour lui, du moins on peut le craindre. »

 

Une peine avec sursis et interdiction de paraître à Givry

 

19h45, le tribunal se retire pour délibérer. 20 h., le tribunal requalifie la prévention en violence avec arme (au lieu de violence aggravée par deux circonstances) déclare le prévenu coupable, le condamne à 8 mois de prison avec sursis. Interdiction de séjour à Givry pendant 3 ans et interdiction de porter une arme pendant 5 ans. « Qu’on ne vous revoie plus et qu’on n’entende plus parler de vous. » L’homme réitère ses excuses, « je respecte la loi française ».

 

Florence Saint-Arroman