Faits divers

Shit, chaussures de contrebande, et violences

Shit, chaussures de contrebande, et violences

Il a 45 jours d’ITT mais ne voit pas pourquoi. Il avait déjà filé quand les gendarmes sont arrivés sur les lieux, le 16 février dernier. Ceux-ci n’ont trouvé que deux frères, qui ont reconnu « une altercation ». Ils sont jugés ce lundi 20 février à l’audience de comparution immédiate.

D., 34 ans, et M., 26 ans, des allures de gamins, les deux. « Je reconnais ma part de responsabilité, madame. J’aurais pas dû taper, j’aurais pas dû. » Ce sont eux qui ont appelé les gendarmes, ce 16 février peu avant minuit, à Saint-Germain du Bois, et, s’ils avaient piqué une chaussure à la victime, « c’était pour montrer la contrefaçon aux gendarmes ». Le contexte : un homme qui vend du shit et des chaussures de contrefaçon, insistent les prévenus qui mettent là le départ de leur énervement.

Ils disent que « c’est lui qui a commencé » 

Le 16 février les deux étaient ivres avec des alcoolémies supérieures à 2 grammes. Ils avaient demandé à ce voisin de les retrouver au lac puis de les raccompagner chez l’un d’eux. Ils ont bu, ils ont insulté le voisin. Après son départ, des messages : « Viens te battre ». Les prévenus disent que c’est lui, le voisin, qui a commencé. Ils sont crédibles à un détail près, que relève la présidente Caporali : la victime porte pas mal de lésions sur tout le corps, sur le visage, a une cheville fracturée, alors que l’un des frères n’en a aucune, et l’autre, seulement deux. 

Des vies entraperçues

Ils sont pères tous les deux. Le plus jeune a un fils, l’aîné à trois enfants d’unions différentes dont l’aînée a 15 ans. Le plus jeune était cariste mais sans emploi faute de permis de conduire, l’aîné fut bûcheron puis manutentionnaire : le travail de force lui a bousillé des vertèbres cervicales. Il prend un traitement, fort, parce qu’il n’est pas opérable, dit-il. Il fut 7 fois condamné dont deux fois pour violence, une fois pour conduite sous l’empire de l’alcool. Son petit frère a eu, mineur, des rappels à la loi, une mise sous protection judiciaire l’année de ses 14 ans, un avertissement pour vol en réunion. Ils consomment occasionnellement du cannabis, du CBD. 

« L’acharnement »

Ils parlent de leur « peur », parce que le voisin dit connaitre pas mal de « gitans », « et c’est pour ça qu’on a appelé les gendarmes ». Ambiance. N’empêche que l’intervention de maître Andali pour la victime, puis les réquisitions de Thierry Bas, procureur, font pencher la barque du côté de « l’acharnement ». « Des coups de pieds sur tout le corps et le visage alors qu’il était à terre ». Il a eu « des dents cassées, son appareil dentaire cassé aussi », outre sa cheville fracturée, « sa tête a cogné au sol, et depuis il est comme sourd de l’oreille droite », et puis il a été menacé, rappelle maître Andali. Le procureur requiert contre l’aîné, une peine de 18 mois dont 12 assortis d’un sursis probatoire, et contre le plus jeune, sans casier, 12 mois dont 10 mois assortis d’un sursis probatoire. 

« Cette rixe faite de coups réciproques »

Maître Dijon plaide pour redresser la barque : elle revient sur le rôle de la victime, vendeur de shit et d’objets type chaussures. Ils avaient tous un discernement altéré par une consommation excessive d’alcool. Ils commencent à se disputer à cause du prix des chaussures (tarif trop labile, sentiment de se faire avoir), et c’est la victime elle-même qui envoie le message suivant : « Je suis là ! Descends, qu’on s’explique ». L’avocate demande un partage des responsabilités et des peines de sursis, pour « cette rixe faite de coups réciproques ».

Le tribunal prononce deux peines mixtes

Pour l’aîné : 15 mois dont 9 mois assortis d’un sursis probatoire pendant 2 ans. Obligations de travail, de soins, d’indemniser la victime, interdictions de contact avec la victime et de paraître à son domicile. Aménagement ab initio des 6 mois ferme en détention à domicile sous surveillance électronique (DDSE). Pour le plus jeune : 10 mois dont 5 mois assortis d’un sursis probatoire pendant 2 ans. Obligations de travailler, d’indemniser la victime, interdictions de contact et de paraître au domicile de la victime. Aménagement des 5 mois ferme en DDSE. 
Ils sont dits être entièrement et solidairement responsables des préjudices causés à la partie civile. Renvoi sur intérêt civil en septembre prochain.

FSA