Opinion de gauche
"Nos vies valent plus que leurs profits" pour le NPA Saône et Loire
Publié le 25 Mars 2020 à 19h10
Depuis quelques jours la crise sanitaire que traverse le pays s'accélère. Pour nous, l’équation à résoudre est la suivante : ne pas nier la gravité de la crise sanitaire, ne pas nous opposer à des mesures de bon sens au prétexte qu’elles seraient proposées par les autorités, mais refuser toute forme d’union nationale et participer à la construction d’une mobilisation indépendante autour d’un plan d’urgence sociale et sanitaire. Cette épreuve qui nous sidère est la manifestation d’un chaos mondial croissant, produit du système capitaliste qui ne cesse de l’amplifier.
Après avoir banalisé l’épidémie, le pouvoir est contraint de prendre acte de sa réalité, et des effets désastreux des contre réformes de la santé qu'il a imposé. Il a défini une stratégie : confiner Macron dans une solennelle mission de chef de guerre contre le virus et de rassembleur de la nation, comme en témoigne son discours pétri de références à « l’union nationale », « l’union sacrée ». Cette rhétorique est le prélude à des mesures autoritaires de la part de l’État sur l’organisation du travail et de la vie sociale, culturelle et démocratique, sur la base de critères qui ne sont pas les nôtres : le maintien de la production, l’absence de débat démocratique sur les mesures à prendre, l’abandon des travailleurEs précaires, des plus démunis, des SDF.
L’exécutif espère aussi reprendre la main dans une crise politique et sociale qui s’enlisait depuis des semaines avec la mobilisation contre la réforme des retraites puis le débat parlementaire.
L’épidémie est là. Elle va avoir des effets sur l’économie et l’ensemble de la vie sociale et le rôle des anticapitalistes dans cette situation est d’en dénoncer bien sûr les causes réelles et les conséquences pour notre camp social. Mais il est avant tout de tracer une perspective et des objectifs d’action pour agir et à ne pas rester tétanisés par une situation anxiogène. C’est aussi le seul moyen de limiter le développement de peurs irrationnelles, attisées par la droite et l’extrême droite qui cherchent à canaliser les angoisses et les frustrations vers des boucs émissaires.
Macron refuse le confinement général car cela ferait perdre beaucoup d'argent aux entreprises. Il ferme les écoles, évoque des solutions de gardes (lesquelles ? exceptées celles légitimement prévues pour les personnels soignants), alors que les salariéEs vont continuer à aller travailler, pour la plupart sans aucune mesure de protection. Macron parle de l’État providence et des services publics qui doivent se situer en dehors des logiques des marchés… après avoir passé son mandat à les détruire. Et il n’y a aucune annonce budgétaire sur la rallonge pour l’hôpital, aucune mesure concrète, vérifiable, sur la compensation des chômages partiels et les licenciements. Les mesures prises vont se traduire, comme d’habitude, par un transfert de richesse des poches des classes populaires vers celles des grandes entreprises, du patronat et des banques.
Une mobilisation indépendante et solidaire
Pour l’exécutif, ce sont les « premiers de cordée », ceux qui savent, qui prennent les bonnes décisions que le peuple doit docilement écouter, au nom de « l’unité nationale ».
Notre positionnement général est de ne pas nier la crise sanitaire tout en refusant l’union nationale et un chèque en blanc à des pouvoirs dont les politiques néolibérales, sur le terrain de la santé, du maintien des services publics en général, ont renforcé la crise. Nous n’avons aucune confiance en ce pouvoir pour organiser la lutte contre l’épidémie. Là encore, nous ne pouvons compter que sur nous-mêmes, sur la solidarité concrète, sur l’auto-organisation des salariéEs et de la population.
Le contrôle et la vigilance de la population (avec ses organisations associatives, syndicales...) sont d’autant plus de mise qu’il y a un danger réel que les mesures prises et justifiées par la lutte contre l’épidémie, révèlent d’autres buts moins avouables, comme celui de restreindre les libertés démocratiques, d’empêcher toute forme de contestation et de mobilisation sociale, ou de faire tourner à tout prix la machine économique dans l’intérêt des possédants. Même si ce gouvernement, ramassis « d'apprentis sorciers », prend à dessein des accents marxistes en émettant l'éventualité de « renationaliser » de grandes entreprises en difficulté, d'interdire les licenciements, ce n'est que pour mieux masquer sa perfidie, son cynisme.
Certes, encore une fois, l’appel au civisme est nécessaire et même indispensable. Mais il ne peut y avoir de civisme sans respect absolu par l’État des règles d’honnêteté, de transparence dans la prise de décision et de mise en place des moyens nécessaires à la sauvegarde des personnes. Or, si les moyens nécessaires à la sauvegarde de l’économie sont mis en place, ceux nécessaires à la sauvegarde des personnes ne le sont toujours pas.
Lorsque nous aurons surmonté cette crise majeure, la question des priorités absolues devra impérativement être rediscutée. Il est évident que la priorité donnée à la réduction du déficit budgétaire a été tragique pour l’hôpital et pour l'ensemble du service public sanitaire. Par ailleurs, ce choix se révélera très probablement à long terme comme infiniment plus coûteux pour les dépenses publiques que ne l’aurait été le maintien à niveau élevé du service public hospitalier. Le même constat peut être fait dans d’autres services publics comme la police, la justice, l’éducation. Le retour aux besoins fondamentaux d’une Nation, à un service public digne de ce nom sera une exigence incontournable.D'autres choix sont possibles. L'expérience que nous traversons révèle au grand jour notre vulnérabilité, mais aussi notre insouciance face aux périls qui nous attendent si nous ne réagissons pas tous ensemble. Réagir pour dessiner un monde plus respectueux des équilibres environnementaux, économiques et sociaux.
Nos vies valent plus que leurs profits !
Jean-Guy Trintignac (NPA 71)
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