Faits divers
TRIBUNAL DE CHALON - Rue Paul Eluard, la dispute conjugale avait nécessité l'intervention de la police
Par Florence SAINT-ARROMAN
Publié le 21 Avril 2022 à 20h51
Un équipage de police s’est rendu le 19 avril en soirée rue Pau Eluard à Chalon, le requérant les attend. L’homme explique que sa voisine du dessous a reçu des coups sur le palier. Les policiers se rendent à l’appartement. La femme confirme. Son mari, lui, parle d’une dispute, c’est vrai, mais avec des violences réciproques. Les policiers constatent des traces rouges sur madame, rien sur monsieur, il est placé en garde à vue où manifestement il reconnaît les faits sans accepter de répondre aux questions.
Il garde le silence
Il garde cette ligne à l’audience de comparutions immédiates, ce jeudi 21 avril. Il dit que ce n’était pas la première dispute, mais qu’il veut garder le silence. Le tribunal regrette évidemment que le prévenu ne permette pas aux juges d’apprécier la situation , mais il a le droit de garder le silence, dont acte.
D’autres voisins rapportent que la victime s’est défendue en rendant des coups. La fille du couple, mineure, dit que cette dispute n’était pas la première.
Insultes quotidiennes, cris, et parfois coups
L’épouse n’est pas à l’audience. Le mari a scruté la salle, peut-être la cherchait-il. Elle ne veut pas se constituer partie civile, donc ne demandera aucune réparation aux préjudices subis, et pourtant, son époux est poursuivi pour des violences depuis le 1er janvier 2020 (tirer les cheveux, gifler, prendre à la gorge, et insultes quotidiennes), et pourtant la victime n’a aucun jour d’ITT. Elle a 28 ans et deux enfants avec lui. Il est né en Arménie en 1985, il parle français mais tout de même pas suffisamment pour se passer de l’assistance d’un interprète. Il ne travaille pas en ce moment. Il n’a pas de casier. C’est un homme de taille moyenne au corps sec, avec un port de tête impeccable.
« Ça peut arriver dans toutes les familles »
« Je regrette vraiment beaucoup mais ça peut arriver dans toutes les familles. » Outch. Un juge assesseur lui demande s’il a d’autres solutions d’hébergements que chez lui. « Je n’ai pas d’autres moyens mais si vraiment je ne peux plus vivre avec ma femme je ferai le nécessaire pour avoir au moins une chambre. » Le même juge lui demande s’il a subi des violences enfants ou vu ses parents être violents l’un envers l’autre. Pas particulièrement. A-t-il déjà travaillé en France ? Oui, 4 mois à Emmaüs, en contrat d’insertion, pour 800 euros par mois.
Mandat de dépôt est requis
Le parquet salue la réaction immédiate du voisinage du couple qui permet un flagrant délit et « des constations à chaud ». « Des voisins l’ont vu frapper madame. » Pour la scène du 19 avril, c’est plié. Mais pour les violences habituelles, madame en parle (propos rabaissants, surveillance), mais aussi une voisine qui a témoigné de plusieurs scènes qui corroborent la position de la victime. Pas de plainte : « Par crainte, par peur ». Il aurait menacé de la tuer si elle sollicitait les autorités publiques. « Aucune réaction, aucune explication » de la part du prévenu, qui encourt 3 ans de prison. « On peut craindre la réitération des faits » poursuit Marie-Lucie Hooker qui requiert une peine mixte, soit deux ans de prison dont 1 an assorti d’un sursis probatoire de 2 ans, avec interdiction de tout contact avec la victime, interdiction de paraître à son domicile, obligation de porter un bracelet anti-rapprochement (BAR), et mandat de dépôt pour la partie ferme.
« S’il change de comportement... »
Maître Reynaud déplore lui aussi le mutisme du prévenu. L’avocat explique que la scène est survenue après qu’une de leurs filles ait fêté son anniversaire. « C’est un gâchis parce que monsieur avait tout pour être heureux. » ... Pour la peine, « il faut réfléchir au futur ». Il cite une déclaration de la victime : « Je veux lui laisser une chance. S’il change de comportement... » Donc : « Il faut mettre monsieur à l’épreuve, qu’il travaille et suive des soins. »
Décision - Peine mixte avec mandat de dépôt
16 mois de prison dont 8 mois sont assortis d’un sursis probatoire pendant 2 ans, avec obligation de travailler, de suivre des soins, interdiction de contact avec la victime ainsi que de paraître à son domicile. Il sera incarcéré à l’issue de l’audience pour 8 mois.
On songe aux deux petites filles du couple, à leur mère si jeune qui se retrouve seule, mais on songe aussi à Edouard Durand, ancien juge et auteur de « Protéger la mère, c’est protéger l’enfant », lorsqu’il affirme qu’« un mari violent est un père dangereux. »
FSA
*Juridiquement, explique la substitut du procureur, on ne peut pas retenir les violences habituelles en l’absence d’incapacité de travail. Cela explique la qualification juridique de « violence sans incapacité par une personne étant ou ayant été conjoint ».
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