Chalon sur Saône

Tribunal correctionnel de Chalon-sur-Saône - Des chèques en bois sur trois départements

Tribunal correctionnel de Chalon-sur-Saône - Des chèques en bois sur trois départements

Un couple et plus d’une vingtaine de victimes. Quinze mois d’emprisonnement pour des concubins qui avaient le chèque souple et le compte clos. Au total, près de 42.000 euros de préjudice pour des particuliers et des personnes morales de trois départements en un mois.

C’est un peu un inventaire à la Prévert mais l’utilisation presque totale d’un chéquier, sur un compte qui était clos a généré beaucoup de tracas à plus d’une vingtaine de personnes. Un toboggan gonflable loué mais jamais restitué, un VTT acheté à Givry, une demi-douzaine de motos, un poële à bois, de l’électro-ménager, des plateaux de charcuterie, un lave-linge... Ce couple, issu de la communauté des  gens du voyage et âgé de 33 et 26 ans avait ouvert un compte postal en 2012, fermé par la banque dès 2013 pour cause de découvert. Il fait usage des chèques d’une manière intensive en février 2014.  Les deux concubins ne sont pas présents à l’audience. Celle-ci est déjà bien entamée quand leur avocat, Me Yves Revellin, du barreau de Lyon et mandaté par l’ARTAG (1) arrive au palais de justice. « Mes clients ont peur et se trouvent actuellement sur un chantier » plaide le Lyonnais en retad.

Anthony ne sait ni lire ni écrire mais a rempli quelques chèques. Sa compagne, Sabrina a complété la plupart des chèques frauduleux. Quelques victimes ont fait le déplacement. Elles expliquent au tribunal, la perte de temps et d’argent, comme la multiplication des démarches pour la procédure. Une mère de famille raconte la déception de son fils mineur qui revendait sa première moto sur le Bon Coin. Un chèque en bois pour fêter sa première transaction. Plusieurs salariés perdent une journée de travail pour venir à la barre. Des complications quotidiennes qui attisent la colère des victimes, un peu grognon de voir que les prévenus n’ont pas daigné les affronter. Le gérant d’un magasin de cycle givrotin a parcouru toutes les brocantes de la région, en vain, pour retrouver son VTT de luxe impayé. Me Bibard, qui représente une partie civile, s’emporte sur le banc : « ce sont des voyous de grand chemin qui ont abusé toutes ces victimes !». Un qualificatif un peu fort pour le bricolage bancal de l’escroquerie. Sabrina et Anthony ont déjà été condamnés pour recel notamment et escroquerie. Le parquet balaie l’excuse de la méconnaissance par Anthony de la clôture de son compte. « Le couple a acheté pas moins de huit motos et pensait faire fructifier les reventes. » Le couple aurait reconnu avoir gagné 5000 euros, sur un préjudice total estimé à 43.000 euros, ça ne colle pas. Le ministère public requiert deux ans de prison dont un avec sursis et mise à l’épreuve pendant deux ans, avec obligation de travailler pour rembourser les victimes.

« Ce sont des cas soc’, s’emporte dans une plaidoirie passionnée et un peu folklorique Me Revellin. C’est l’infraction la plus imbécile qu’on puisse faire, jamais enquête n’a été si facile ! Ils vivent dans la misère, intellectuelle et sociale, et pendant quelques semaines, ils ont vécu comme des riches, comme Bernard Tapie ! Ils se sont fait plaisir. Ce sont des victimes de la société. » Des arguments qui passent mal du côté des parties civiles, qui elles, avancent leur honnêteté et auraient bien voulu que leurs biens vendus à autrui soient payés au juste prix...

Le couple a été condamné solidairement à quinze mois de prison. D’après leur avocat, ils ont déjà élaboré un plan de surendettement pour rembourser leurs victimes. Toutes les parties civiles ont été reconnues.

 

Florence Genestier

(1)    ARTAG (Association rhodanienne des Tsiganes et de leurs amis Gadgé) : http://www.artag-asso.org/