Opinion

Le député de Saône et Loire, Raphaël Gauvain, répond à la lettre ouverte

Mesdames, Messieurs,

 

Je fais suite à votre lettre ouverte du 19 février dernier par laquelle vous m’interpellez à la suite de notre réunion du 9 février sur le projet de loi Asile/Immigration présenté ce matin en conseil des ministres.

 

Selon vous, ce texte serait inquiétant et irresponsable. Vous me reprochez par ailleurs une méconnaissance du sujet, de vous avoir instrumentalisé et même d’être le porte-voix d’une « minorité active hostile (..) aux positions les plus extrêmes ».

 

Je tiens à vous apporter les précisions suivantes.

 

Permettez-moi d’abord de faire un constat pour expliquer la nécessité de légiférer sur le sujet. L’année dernière, le nombre de demandes d’asile a atteint un record en France avec plus de 100.000 dossiers déposés, soit un doublement depuis 2010. Conséquence immédiate de cette situation, des délais moyens de traitement des demandes d’asile qui se sont considérablement allongés (18 à 24 mois aujourd’hui). Ensuite, la saturation de notre système d’accueil et d’hébergement d’urgence, encore aujourd’hui inacceptable. Nous avons toujours sur notre territoire national des hommes, des femmes et des enfants en situation de détresse absolue, livrés à eux-mêmes dans des campements sauvages.

 

Autre constat alarmant, l’efficacité des procédures d’éloignement : en 2016, sur 91.000 étrangers en situation irrégulière interpellés, seuls 31.000 se sont vu délivrer une obligation de quitter le territoire français, et 16.500 ont effectivement été éloignés en baisse de 40% sur 5 ans. De fait, et c’est tout autant inacceptable, nous laissons ces personnes se construire une vie dans l’illégalité et un entre-deux extrêmement dangereux.

 

Qu’allons-nous faire ? Par ce projet de loi, nous allons faire en sorte de pouvoir trancher en l'espace de six mois toute demande d’asile. Nous allons faire en sorte d’éloigner plus efficacement les personnes en situation irrégulière et les débouter du droit d’asile. Nous allons enfin faire en sorte de mieux intégrer les personnes à qui nous accordons le statut de réfugié, pour ne pas renouveler les échecs passés de l’intégration. Mieux accueillir, mieux raccompagner et mieux intégrer. C'est cela que nous essayons de trancher par une loi qui soit juste et équilibrée, entre humanité et fermeté.

 

Les Français attendent des réponses concrètes. Ils veulent que l’on agisse. Notre pays a laissé trop longtemps les choses dérivées. Les principes affichés ne fonctionnent plus en pratique. L’immigration est un sujet difficile, où les positions sont extrêmement tranchées et souvent caricaturées. Je veux sortir des coups de menton.

 

Lors de notre rencontre du 9 février dernier, nous avons acté de nos différences politiques. Cette opposition n’exclue pas un dialogue constructif sur le sujet. A ma demande, vous avez d’ailleurs fait des propositions concrètes sur l’accès au travail des demandeurs d’asile, la problématique de la présence des enfants dans les centres de rétention, ou encore le « délit de solidarité » (art. 622-1 et suivants du CESEDA).

 

Ce sont des pistes de réflexions extrêmement pertinentes pour enrichir le texte que j’entends, avec mes collègues de la Majorité, porter dans le cadre des discussions parlementaires à venir. De même, sur la mesure phare de passage de 45 à 90 jours de la durée de rétention, je vous ai dit que nous serons extrêmement vigilants et que nous amenderons le texte du gouvernement si la preuve de la nécessité opérationnelle de cet allongement ne nous était pas rapportée.

 

Loin des polémiques inutiles, des violences oratoires et des transgressions permanentes, je suis à 100% concentré sur mon travail parlementaire : être à l’écoute et sur le terrain pour nourrir mon travail à l’Assemblée.

 

Sur la loi Asile/Immigration, outre le Collectif Chalon-Solidarité-Migrants, j’ai eu ces dernières semaines des échanges nourris avec le service des Migrations et de l’intégration de la préfecture de Saône et Loire, avec notre Préfet, avec les agents de la PAF et les associations du CRA de Lyon Saint Exupéry, et avec les associations chalonnaises que sont la LDH, Emmaüs, ADOMA ou encore la Croisée des Chemins.

 

Ce travail d’écoute sur le terrain, je l’ai initié en septembre dernier pour la préparation de la loi de lutte contre le terrorisme. Je le conduis actuellement sur les Chantiers de la Justice en allant à la rencontre des magistrats, avocats et forces de sécurité à Chalon. Je le poursuivrai demain, par exemple sur la réforme de l’apprentissage, et ce à chaque fois que cela sera nécessaire à mon travail parlementaire.

 

Je vous le redis. Ma porte reste ouverte, et je suis toujours disposé à vous recevoir à nouveau pour approfondir vos propositions pour que « l’asile soit un droit réel ». Sans invectives, dans le dialogue et le respect mutuel.

 

Dans l’attente,

 

Je vous prie de bien vouloir recevoir, Mesdames, Messieurs, mes salutations républicaines les plus chaleureuses,

 

Raphaël GAUVAIN

Député