Faits divers
Montpont-en-Bresse : Ivre et défoncé il agresse un adjoint au maire
Par Florence SAINT-ARROMAN
Publié le 06 Janvier 2022 à 22h05
« Bonjour, vous le démenottez, s’il vous plaît ? » Un des gendarmes prend la clé, le prévenu peut s'asseoir. Il donne son état civil. Il vit à Louhans mais c’est à Montpont-en-Bresse qu’il a, le 17 décembre dernier, agressé un adjoint au maire, sans connaître sa qualité.
Ça ne faisait pas un mois qu’il était sorti de prison… Le prévenu est né en 1985 à Montbéliard. Clémence Perreau, substitut du procureur, donnera une vue d’ensemble de son casier judiciaire. Ce 6 janvier, c’est sa 20ème comparution, « et on tourne en rond », résume la magistrate. En rond : 7 fois condamné pour conduite sans permis. Absence de permis en lien avec les conduites sous l’empire de l’alcool. 8 fois condamné pour des violences. Avec le cumul d’infractions le 17 décembre dernier, le prévenu réalise un Grand Chelem : violences, en état d’ivresse, conduite d’un véhicule sans permis, conduite en ayant fait usage de stupéfiants, le tout en état de récidive légale. C’est ainsi que, comme l’eau revient à sa source, cet homme - dont le père était alcoolique et violent avec sa femme – revient devant des juges. Il a 36 ans.
Le gars est de plus en plus agressif, il gifle l’adjoint
Le 17 décembre dernier, c’est soir de conseil municipal à Montpont-en-Bresse. Un des adjoints sort sur le parking devant la mairie, il est environ 22h30. Il voit des sacs Mac Do éparpillés par terre avec leurs lots de déchets divers et un casque. Il ramasse le tout, jette dans une poubelle les détritus, pose le casque par-dessus. Un type arrive, « où est le casque ? ». Le gars est de plus en plus agressif, il gifle l’adjoint, le traitant de « voleur d’enfant », l’accusant d’avoir « caché » son neveu. On n’aura pas le fin mot de ce délire, le président n’interroge pas le prévenu sur la question de ce neveu, pourtant le mis en cause vocifère : « On a enlevé mon neveu, vous ne faites rien pour le retrouver. » Il se calme quand d’autres sortent de la mairie. Il ne savait pas qu’il frappait un élu (ce qui aurait été un facteur aggravant).
Il s’était sablé à la 8.6
On donne aux gendarmes un vague signalement et la description du véhicule de l’agresseur. Sur la route qui relie Louhans à Romenay, on repère le break sur un parking. Le conducteur dit immédiatement ne pas avoir de permis. Sur le reste, les militaires qualifient ses déclarations de « compliquées ». En gros, il avait un ami en difficulté sur Montpont-en-Bresse. Et, alors qu’il s’était sablé à la 8.6*, ni une ni deux il prend les clés du véhicule de sa compagne (qui a voulu l’en empêcher) et il file s’emplâtrer dans les soucis judiciaires en veux-tu en voilà. Alcoolémie ? 2 grammes. Pourquoi vous vous en prenez à ce monsieur ? lui demande le président Dufour. « Je ne sais pas, monsieur, je me rappelle de rien. » Il dit qu’il avait arrêté de boire, il dit ça, il dit que du coup il n’a pas tenu l’alcool. Mais bon, 2 grammes c’est pas rien non plus. Il était ivre et encore défoncé.
L’écart important entre son discours et sa capacité à tenir les cadres
Il est sorti de détention en novembre dernier. Il avait bénéficié d’un placement sur un chantier d’insertion, mais y a eu des ratés, un peu de cannabis, de l’alcool aussi, une fois. Le juge de l’application des peines relève l’écart important entre son discours et sa capacité à tenir les cadres imposés. Le prévenu veut convaincre le président que tout est différent, maintenant, parce que « avant, j’avais pas de famille, j’étais seul. Là, c’est pas pareil, ma famille est là. » Sa compagne est assise au premier rang de la salle, accompagnée par un homme. « Vous dites toujours ça », objecte le président. Le prévenu est sûrement sincère dans son vœu de bien faire, d’arrêter de se mettre en infraction et de ruiner sa vie, mais il y revient, et ça doit être désespérant pour lui.
Il n’est « pas capable aujourd’hui de se prendre en charge »
Ça l’est aussi pour le parquet. Clémence Perreau rappelle que la victime a subi les conséquences de cette agression, elle requiert 12 mois de prison, « ça lui permettra de suivre des soins en prison et de régler ce qui l’empêche d’avancer », et la révocation des 6 mois du sursis antérieur, avec un mandat de dépôt. « Il a besoin d’être confronté à la vie et à ses réalités, plaide maître Faure-Revillet. C’est quelqu’un qui n’est pas capable aujourd’hui de se prendre en charge. Le dispositif AIR peut l’aider. Il est bienveillant et intelligent (il a quelques diplômes, ndla), il a besoin de se sentir utile. Il a écrit à la victime, pour s’excuser, mais il a besoin qu’on lui tienne la main. »
Incarcéré 15 mois, puis deux ans de probation avec un suivi judiciaire et social renforcé
Le tribunal déclare le prévenu coupable et le condamne à une peine de 18 mois de prison dont 9 mois sont assortis d’un sursis probatoire renforcé (obligation de travailler, de suivre des soins, d’indemniser la victime, et d’intégrer le dispositif AIR – accompagnement individuel renforcé), décerne mandat de dépôt pour la partie ferme, révoque le sursis de 6 mois prononcé en 2018, ordonne son incarcération immédiate. 15 mois. 15 mois de prison en tout.
La compagne du condamné est effondrée. Les jeunes militaires de l’escorte remenottent l’homme qui à cet instant n’est plus que deux yeux profondément malheureux sous un front luisant.
Florence Saint-Arroman
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