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J'ai tout lu Cécile Duflot.... « De l'intérieur, voyage au pays de la désillusion »

J'ai tout lu Cécile Duflot....  « De l'intérieur, voyage au pays de la désillusion »

L'ancienne ministre du Logement et ex-secrétaire nationale des Verts a publié fin août « De l'intérieur, voyage au pays de la désillusion » chez Fayard. Si on dépasse le style qui s'apparente hélas à celui d'un journal de collégienne faussement naïve, parfois agaçante, le témoignage de l'ex-ministre écologiste est précieux pour qui connaît (ou pas) les arcanes du pouvoir et cruel pour François Hollande.

Ce lundi 1er septembre, au micro de Jean-Jacques Bourdin sur RMC et BFM TV, Cécile Duflot a défendu son travail ministériel, malmené par le Premier Ministre ces derniers jours. En renonçant à l'encadrement des loyers, mesure phare de « sa » loi ALUR (accès au logement et un urbanisme rénové), Manuel Valls agace la femme politique de gauche et désole la bosseuse diplômée d'urbanisme qui rêvait d'inscrire une vraie loi sociale à son palmarès.

 

La parution du livre de Duflot, en parfait minutage avec l'université d'été de son parti et la « rentrée » politique française a agité le petit monde politicomédiatique.

 

Le quatrième de couverture est accrocheur : « J'y ai cru. J'ai cru en François Hollande, en sa capacité de rassemblement. J'ai cru en nous tous. Je me suis trompée. J'ai essayé d'aider le président de la République à tenir ses promesses, de l'inciter à changer la vie des gens, de le pousser à mener une vraie politique de gauche. Et j'ai échoué. Alors je suis partie. » Ou encore : « François Hollande passe son temps à fixer des objectifs qu'il ne parvient pas à tenir. L 'effet est dévastateur ». Rien de terriblement fracassant ne se trouve dans le récit duflotien. C'est plutôt, au fil des pages, la description d'un mécanisme et d'une logique proprement « hollandaise » qui retient l'attention du lecteur. Rien d'imprévisible non plus, à ce que le divorce surgisse à l'arrivée à Matignon de Manuel Valls. Il s'agit aussi pour elle de raconter son histoire, sa version de son passage au gouvernement.

 

La députée, qui n'exclut pas de fédérer une force à la gauche du parti socialiste d'ici à 2017, raconte sans fard, sinon celui du besoin qu'ont les politiques professionnels de se donner en permanence le beau rôle, son quotidien et son ressenti. Les conseils des ministres, les apartés avec François et Jean-Marc, les discussions moins publiques avec les associations, les petites manœuvres des lobbies, les repas entre potes chez Hamon, Montebourg et Taubira ou les filouteries et vacheries de ses gentils camarades. Comme Jérôme Cahuzac, ministre du budget titulaire d'un compte en Suisse mais qui a eu, de mai 2012 à sa démission droit de vie et de couperet sur les budgets des ministères...

 

On aurait tout de même souhaité de la part de la députée un minimum d'esprit critique face à sa propre action. Cette lacune est par exemple criante quand Cécile Duflot parle de son parti Europe Écologie Les Verts. Qui a suivi les soubresauts du parti écologiste ces derniers mois décèlera sans difficulté de la mauvaise foi ou un manque de précision opportun : quand elle évoque le départ de Pascal Durand du Secrétariat National, se présente comme victime expiatoire du « méchant » Dany Cohn-Bendit ou veut apparaître comme n'ayant rien cherché, surtout pas le pouvoir et les responsabilités...

 

Reste son constat et sa parole libre qui pourraient s'intituler : « La vie quotidienne d'une ministre minoritaire dans un gouvernement majoritaire ». Son témoignage est intéressant et questionneur, sans concession toutefois pour autrui. On notera, pour les saône-et-loiriens, les piques envoyés à Arnaud Montebourg, ex-ministre anti-écolo et productiviste farouche [après avoir un temps, été passionné par les thèses environnementalistes d'Al Gore...]

Ainsi, le 24 septembre 2013, les déclarations de Manuel Valls au sujet des Roms suscitent de l'émoi jusqu'aux rangs gouvernementaux : « Beaucoup viennent me dire : « Ce n'est plus possible », mais personne ne veut aller plus loin.  Arnaud Montebourg dénonce les propos du Ministre de l'Intérieur le mercredi matin, puis dîne avec lui le soir et revient sur ses déclarations le lendemain matin. » (Page 171)

 

Cécile Duflot évoque dans son récit bien davantage la gauche que l'écologie. Elle reviendra sans doute sur ces sujets à d'autres occasions.

 

Florence GENESTIER

 

Cécile Duflot « De l'intérieur, voyage au pays de la désillusion », Fayard, 17 €. Écrit avec Cécile Amar, journaliste au Journal du Dimanche.